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Groupe LDLC : opportuniste et long-termiste à la fois ?
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 11/07/2019 à 10:39

Jérôme Lieury
Jérôme Lieury

Jérôme Lieury

Olier Etudes & Recherches

Analyste financier, membre du Cercle des analystes

https://www.olier-etudes-recherche.fr/

Il faut bien se l'avouer : investir en Bourse a toujours quelque chose d'aléatoire, puisqu'on ne peut jamais maîtriser tous les paramètres.

Il faut bien se l'avouer : investir en Bourse a toujours quelque chose d'aléatoire, puisqu'on ne peut jamais maîtriser tous les paramètres.

Il faut bien se l'avouer : investir en Bourse a toujours quelque chose d'aléatoire, puisqu'on ne peut jamais maîtriser tous les paramètres. Ce qui vaut dans les deux sens, d'ailleurs : si le risque auquel on s'expose est avant tout de voir le cours de ce que l'on possède baisser, il y a aussi le risque de rater une affaire, et de voir monter ce que l'on aurait pu, et dû, posséder. Ce qui est aussi désagréable, sinon plus. C'est d'ailleurs ce qui semble arriver ces derniers temps à nombre d'investisseurs : échaudés par l'épouvantable dernier trimestre boursier 2018, et donc repliés sur des positions très sûres en principe, voire très "cash", en début d'année, ils ont regardé le marché monter depuis (sauf au mois de mai), les grands indices Actions réalisant des performances exceptionnelles sur le 1er semestre 2019.

Ceci à l'étonnement général, puisque les grandes gestions sensées faire le marché ont "décollecté" dans l'ensemble, c'est-à-dire plutôt perdu sur la période des clients et des capitaux à gérer : l'aversion au risque est en principe toujours forte, et alimentée par un ralentissement conjoncturel global de plus en plus patent il est vrai.

De fait, personne, et surtout pas les stratégistes, n'a de réponse sérieuse à la question : qui achète et tire le marché vers le haut ? et cette belle hausse du début d'année reste un peu mystère, même s'il y avait bien sûr un potentiel de rattrapage après la baisse de fin 2018, qui pouvait paraître exagérée à bien des égards. Mais l'imprévisibilité est dans la nature même des marchés, et c'est même à ça qu'ils servent : plus que du papier contre de l'argent et vice-versa, on échange avant tout des anticipations sur les bourses de valeurs, et les anticipations ne sont que des anticipations, c'est bien connu.

Ceci étant, même si on ne peut pas maîtriser tous les paramètres et si on est toujours plus intelligent après (hélas!), bien suivre ses investissements garantit en principe un peu contre les mésaventures. Notamment celles qui arrivent quelque fois aux "darlings", ces sociétés que tout le monde aime bien, qui sont engagées dans une belle dynamique, dynamique qui se révèle un peu plus tard un peu trop belle parfois, et que donc personne n'aime plus ensuite.

Groupe LDLC, dont le cours a bien baissé depuis trois ans, mais ne veut plus baisser apparemment depuis quelques temps, est éventuellement un bon exemple de ce phénomène. Ex-LDLC.com, la société est de fait le premier e-tailer high-tech (autrement dit distributeur en ligne de PC et de tout ce qui va autour) en France, soit un chiffre d'affaires de plus de 500 millions d'euros sur le dernier exercice clos fin mars, plus de 1 000 collaborateurs, dix enseignes et des sites qui adressent les consommateurs d'informatiques et autres appareils numériques aussi bien particuliers (ldlcl.com, materiel.net, bimp.fr, hardware.fr) que petits professionnels et artisans (ldlc.pro, bimp.fr), ainsi quelques offres/sites/catégories annexes plus ou moins en test, quelque fois depuis un certain temps déjà (Anikop, DLP Connect, etc..).

Les sites proposent en tout 50 000 références et 1 700 marques, dont toutes les grandes, et la société, qui a aussi sa marque de PC en propre, est un des premiers revendeurs en France de barrettes de mémoires et de cartes graphiques. L'ensemble s'appuie sur une logistique très intégrée avec trois entrepôts, un ERP "maison", et un service après-vente d'excellence, car souvent primé (Qualiweb, etc…). Sans parler de larges communautés de "fans" sur les médias sociaux, un terrain bien occupé aussi grâce au sponsoring de l'Asvel, club célèbre et champion de France de basket, et une équipe d'e-Sport, Team LDLC, présente dans les grandes compétitions de jeu vidéo. Et ce n'est pas tout : LDLC est "click and mortar", ou plutôt "multicanal", et développe avec succès un réseau de boutiques franchisées à son enseigne, qui est en croissance constante depuis plusieurs années, soit 4, 5, voire 6 ouvertures par an, et 45 unités à fin juin 2019.

Pour être tout à fait complet, il faut aussi mentionner que Groupe LDLC est une société familiale, lyonnaise et contrôlée et gérée par ses fondateurs depuis 1996. Lesquels, non contents d'avoir créé, fait grandir et pérennisé un beau modèle d'affaire dans un métier à marges structurellement faibles, ce qui n'est pas rien, n'hésitent pas à saisir toutes les opportunités de croissance, même si le prix à payer est relativement élevé dans un premier temps. Et, de fait, les développements se sont succédés à cadence rapide depuis trois ans : à commencer par le rachat d'un concurrent sérieux opérant principalement dans le Grand Ouest, Domisys, avec son site materiel.net, son entrepôt, et une dizaine de boutique, achat payé en partie en actions nouvelles LDLC, suivi par l'ouverture d'une école interne, la société ayant du mal à recruter les bons profils, puis par la construction d'un nouveau siège social, un investissement de 22 millions d'euros dans la périphérie de Lyon. En parallèle, la société a fait un gros effort de rénovation de l'infrastructure informatique des sites, notamment pour les adapter au m-commerce, et un autre gros effort pour robotiser les entrepôts. Et elle s'est aussi lancée sur le marché espagnol, qui manque de compétiteurs a priori, avec deux ouvertures de boutiques, pour enfin faire il y a un an une autre acquisition : Olys, un revendeur Apple parisien B to B opérant avec deux enseignes : bimp.fr, et iTribu, exploitant 16 boutiques dont 11 Apple Premium Reseller. Cette dernière opération apportant au groupe tout entier une bien meilleure puissance d'achat chez ce fameux constructeur de matériel devenu finalement incontournable.

Bref : l'accélération a été forte, et le prix à payer tout autant, puisqu'en investissant plus que sa capacité d'autofinancement (désolé d'insister sur ces détails un peu mesquins) ces dernières années, Groupe LDLC a quelque peu dégradé son bilan, avec un ratio d'endettement Dette financière Nette/Fonds Propres (une mesure démodée, mais qui montre bien quel pouvoir les banques peuvent avoir dans une société) passé de 66% il y a deux ans à 85% il y a un an à 116% fin mars 2019, ce qui est un peu beaucoup éventuellement.

Un ratio qui s'est dégradé aussi parce que le groupe a été en perte sur le dernier exercice, la conjonction néfaste d'une croissance un peu trop rapide, voire échevelée, avec une exploitation devenue tout d'un coup plus compliquée étant finalement assez fréquente dans la vie des affaires. Compliquée notamment par i) la crise d'offre sur le marché des barrettes de mémoire en 2017, les prix explosant et devenant dissuasif pour l'acheteur final client de LDLC, ii) suivi d'un grand désordre sur le marché des cartes graphiques Nvidia, boosté dans un premier temps par la forte demande liée au minage des crypto-monnaies en plein boom, puis ravagé par l'entrée de nouveaux fournisseurs chinois à prix cassés, et, iii) aussi par quelques ratés chez Intel, qui n'arrivait pas à graver ses nouveaux micro-processeurs en 7 nanomètres, le tout se terminant par iv) des ventes de Noël décevantes, suite aux problèmes chez les fournisseurs, et avec aussi, pour couronner le tout, des perturbations dans la logistique interne, suite aux différents rachats de sociétés.

Ceci n'aidant pas, on s'en doute, pour absorber une base de coûts fixes en forte augmentation.

Autant de mauvaises nouvelles qui ont bien pesé sur le cours de Bourse, et qui appellent des mesures fortes pour redresser la barre. Ce que semble bien faire la direction, qui s'emploie tout d'abord à alléger le bilan, avec la vente des murs de l'entrepôt de Nantes et du siège social, et qui travaille aussi les coûts. Avec selon elle un levier significatif sur les frais de personnels ou assimilés, avec la fin des grands travaux de développement pour les sites, le système d'information et la logistique.

Une direction qui n'a pas perdu son optimisme, peut-être parce qu'elle ne gère apparemment pas les yeux rivés sur le cours de Bourse (ce qui est plutôt bon signe en général) : le deuxième semestre de l'exercice 2018-2019 était à peu près à l'équilibre, avec l'aide d'une nette reprise des ventes grand public au quatrième trimestre, le consommateur français ayant le moral, et les nouvelles cartes graphiques AMD un franc succès. Et une direction qui voit toujours loin en principe : l'Espagne et le réseau de boutiques, qui peut encore doubler de taille, sont de vrais relais de croissance selon elle. Sans parler de la future place de marché en ligne, qui doit héberger d'autres commerçants avec des offres connexes à l'offre du groupe, selon un modèle qui a déjà fait ses preuves par ailleurs (suivez mon regard).

Comme quoi on peut être à la fois opportuniste et long-termiste.

Ce qui est bon à savoir, surtout sur des marchés imprévisibles.

J. Lieury - Analyste Senior - Olier Etudes & Recherche - Membre du Cercle des Analystes Indépendants – www.olier-etudes-recherche.fr

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