Pétrole bouillant, missiles volants
En l’absence des Américains nous nous sommes donc improvisés EXPERTS EN GUERRE ET EN MISSILES et aussi un peu en pétrole. Nous avons digéré le discours de Powell, on a compris que l’on va pouvoir parler taux pendant des mois avant de voir une baisse effective se produire sur les marchés et depuis hier, notre seule obsession c’est de savoir si la guerre est là pour durer, si ça va s’éterniser pendant des mois ou si la solution viendra des States et de leur fantasque Président. En attendant, on regarde le baril qui est devenu l’asset le plus sexy du moment, bien loin devant le Bitcoin ou une autre cryptomonnaie quelconque. Durant toute la séance d’hier, le brut a eu des vapeurs et on se retrouve gentiment à des niveaux qu’on avait plus vu depuis le mois de janvier. Alors il est vrai que le fait qu’un hôpital israélien ait été touché par un missile iranien a provoqué la réponse d’Israël qui est allé cibler un réacteur nucléaire en Iran. Il n’y avait pas besoin d’avoir fait West Point pour savoir qu’à ce rythme-là, non seulement nous étions en train de partir en mode « escalade » militaire et loi du talion à go go et qu’en plus, la guerre risquait bien de coûter plus cher en pétrole qu’en bombes. Et puis, il n’y avait surtout pas besoin d’avoir fait West Point pour savoir que si ça continuait comme ça, les Iraniens pourront venir à Genève tant qu’ils veulent pour négocier la paix, mais tout ce qu’ils pourront faire « à la limite », c’est de mettre les pieds dans l’eau du lac pour se rafraîchir. Mais pour ce qui est de négocier la paix, autant essayer de traverser Genève en voiture à 17h30 en moins de 4 jours, ils ont plus de chance de réussir.
Réflexion avant action
Bref, les tensions pétrolières ne sont jamais bonnes et même si les experts sont tous d’accord pour déclarer unanimement que fermer le détroit d’Ormuz serait la c*nnerie suprême à ne pas faire pour les Iraniens – puisque cela correspondrait à un suicide commercial et économique – le trader moyen n’écoute pas et préfère paniquer tout en s’angoissant sur le sujet – ce matin le WTI est à 73.71$ et le Brent frise les 77$ et tout le monde a les yeux rivés sur Trump et ses réseaux sociaux, histoire de savoir s’il va bombarder l’Iran ce week-end ou s’il va d’abord attendre que la fête de la musique soit derrière nous. Selon les dernières informations que l’on possède, le génial président Trump se donne deux semaines pour prendre une décision. Dire que si Obama était encore là, Téhéran serait déjà un parking et on réfléchirait à construire un parc d’attraction avec une souris qui danse et des burgers à 35 balles pour amuser les foules. Quoiqu’il en soit, tant que Trump est en mode « le penseur de Rodin », les marchés sont sur leurs gardes, parce qu’ils sont parfaitement conscients que le jour où Trump se décide peut arriver à tout moment et que s’il décide d’y aller – au moment où il l’annoncera, les bombardiers et lance-missiles seront déjà en place depuis longtemps. La tension sur le pétrole est donc palpable et lorsque le pétrole monte, on reparle d’inflation qui va monter aussi et plus on parle d’inflation qui va monter, plus on se dit que les deux baisses des taux de la FED que l’on attend pour cet automne, on va pouvoir bien se les accrocher derrière les oreilles. Et quand tu penses que les taux ne vont plus jamais baisser, c’est jamais bon pour les marchés qui sont quand même remontés au plus haut de tous les temps sur le précepte que Powell allait faire comme Martin Schlegel (patron de la BNS) : ramener les taux à zéro, c’est tellement plus simple.
L’Europe baisse la tête… et les taux
Pendant que les bombes tombaient là-bas, les banques centrales, elles, déminaient ici. La Banque nationale suisse a baissé son taux directeur à 0%. Oui, zéro, comme en 2015. Martin Schlegel, président de la BNS, a même dit qu’il évitait de repasser dans le négatif, mais qu’il n’hésiterait pas à le faire si le franc continuait de jouer les Rambos côté devises. En parallèle, la Riksbank suédoise a aussi coupé son taux, tout comme la Norges Bank (première fois en 5 ans, champagne !). Et la Banque d’Angleterre, ben elle, elle a tenu bon… pour l’instant et faisait comme Powell : rien, en attendant de voir. Mais avec un marché du travail qui part en sucette et une inflation qui s’inquiète aussi des droits de douane, tout le monde s’attend à ce qu’elle lâche l’affaire d’ici août. Pendant ce temps, la BCE fait du surplace – ce qui était attendu – mais François Villeroy de Galhau commence à parler de baisses de taux « d’ici six mois ». Traduction : « On attend de voir si ça pète pour appuyer sur le bouton. Et Jerome Powell dans tout ça ? Bah lui, il a pris sa journée. Enfin, presque. Puisque Trump a encore balancé dans la presse que le taux directeur devrait être « 2,5 points plus bas » – oui, bien sûr – je dirais même direct à zéro comme ça on n’en parle plus.