
Wall Street a préféré prêter plus attention à la réalité du terrain qu’aux commentaires des experts qui n’ont cessé de prédire les pires catastrophes depuis la réélection de Donald Trump fin 2024.
Notre portefeuille de valeurs américaines fête son troisième anniversaire. Depuis sa création début juin 2022, il affiche une performance de 50,8%. C'est mieux que le Dow Jones (+36,6%), mais moins bien que le Nasdaq 100 en progression de 82,2% sur la même période. Les 100.000 dollars investis il y a trois ans ont permis de porter l'actif à 150.254 dollars, ce qui en tenant compte de la baisse de la devise américaine conduit à un capital de 128.130 euros. Un montant à comparer à une mise de fonds initiale pour un investisseur européen de 93.454 euros. Le parcours est honorable, mais il aurait pu être bien meilleur si nous n'avions pas sous-performé tous les indices de la Bourse de New York au cours du premier semestre de cette année. Sur les six premiers mois de l'année, notre portefeuille a en effet baissé de 7,7% alors que les valeurs américaines ont enchaîné les records de hausse, avec 7,1% de hausse pour le Nasdaq 100 et 4,1% pour le Dow Jones.
L'écart de performance est important, il mérite une explication. Celle-ci peut se résumer en quelques mots : nous n'avons pas cru à la bonne étoile de Donald Trump. Le président des Etats-Unis a « la baraka » et jusqu'à présent tout lui a réussi ! Ses succès fulgurants sur le plan militaire, diplomatique et économique sont indiscutables. Le nouveau locataire de la Maison Blanche est même parvenu à rallier la majorité du Congrès à sa « grande et belle loi » budgétaire, un projet pourtant jugé totalement déraisonnable par la quasi-totalité des économistes. En dépit des doutes et des accidents de parcours, les investisseurs ont fait preuve de pragmatisme en jouant la carte Trump sans retenue aucune. Résultat, le Nasdaq ne touche plus terre à près de 20.500 points, il entraîne avec lui le S&P 500 également au zénith. Même chose pour le Dow Jones qui tutoie lui aussi les sommets.
Wall Street a préféré prêter plus attention à la réalité du terrain qu'aux commentaires des experts qui n'ont cessé de prédire les pires catastrophes depuis la réélection de Donald Trump fin 2024. Les craintes portant sur la dégradation de la note financière des Etats-Unis, les tensions inflationnistes, l'effondrement de la croissance en relation avec la hausse des droits de douane, ne se sont pas concrétisées. Pas plus que les prévisions les plus pessimistes portant sur l'imminence d'une troisième guerre mondiale.
L'économie américaine ralentit, comme c'est le cas dans les grandes régions du monde, mais elle n'a pas versé dans le bas-côté. Le premier souci des détenteurs de capitaux était de mesurer l'impact des premières hausses de droits de douanes sur les résultats d'entreprises. Sur cette question cruciale, le bilan n'a pour l'instant rien de dramatique. Selon les dernières données collectées par la société Facset, il ressort que les profits des sociétés de l'indice S&P 500 ont augmenté de 5% au deuxième trimestre. Cette progression, la plus faible depuis le quatrième trimestre de 2023, peut paraître décevante. Toutefois, en dépit d'un récent train de révision à la baisse des prévisions bénéficiaires, les attentes portent toujours pour 2025 sur une hausse de 9,1% des profits annuels et de 5% pour les revenus, ce qui reste très solide. Les marges se maintiennent surtout à un niveau très satisfaisant de 12,3% en moyenne.
L'autre sujet de préoccupation reste bien sûr l'évolution des taux d'intérêt qui refusent obstinément de baisser la garde autour de 4,34% pour les Fed Funds à 10 ans. Sans détente significative des rendements obligataires, difficile en effet d'espérer voir les actions poursuivre leur marche en avant. Les marchés restent confiants, l'inflation est tombée à 2,4% sur 12 mois à fin mai, ils anticipent toujours une baisse de 25 points de base des taux directeurs de la Fed au cours du troisième trimestre.
Force est de constater qu'en ayant maintenu depuis la mi-avril une stratégie de très grande prudence et de protection du portefeuille, alors que les indices américains repartaient vivement à la hausse, nous avons cédé au narratif anxiogène largement déployé par les médias. En conservant une forte proportion de liquidités en portefeuille, nous n'avons pas pu pleinement profiter de la hausse de Wall Street. Nos choix d'allocation d'actifs exclusivement ciblés sur le secteur technologique étaient bons, mais ils se sont révélés bien trop timides. En ayant pris beaucoup trop tôt nos bénéfices sur certains titres comme Coinbase Global Inc., Amazon ou Micron Techonology, nous sommes à l'évidence resté très en-dessous de la main par rapport au potentiel de rebond du marché.
Quelle stratégie pour le second semestre de l'année ? En Bourse, lorsqu'il est question de rattraper son retard, la tentation est forte de renforcer les positions sur les valeurs ayant le mieux marché au cours des derniers mois dans l'espoir de continuer de bénéficier de la bonne orientation du marché. C'est le cas des valeurs technologiques, celles-ci ne sont pas destinées à constituer notre seule classe d'actif, mais pour l'heure elles devraient continuer de représenter l'essentiel de nos investissements. A plus de 32 fois les profits attendus pour l'année en cours, le secteur de la « tech » explose tous les compteurs, mais cette différence de valorisation s'explique par des performances hors du commun : les attentes bénéficiaires du compartiment des services de communication ont été revus à la hausse pour l'ensemble de l'année et celles du vaste secteur « information technology » n'ont été revues à la baisse que de 1,5%, ce qui reste très limité dans un contexte de ralentissement général de l'activité. Avec des marges nettes de 25%, deux fois supérieures à la moyenne des valeurs du S&P 500, la prime dont elles disposent n'est pas usurpée. Nous objectif est de conserver en portefeuille et, selon des opportunités qui se présenteront, de renforcer la part des valeurs technologiques peu concernées par la hausse des droits de douane, comme Coinbase, Amazon, Netflix, Netease ou Microsoft.
Parallèlement, de nombreuses valeurs traditionnelles appartenant au secteur de l'énergie, de la finance, des utilities, de la santé ou des matériaux se traitent très en-dessous de la moyenne du marché qui se situe pour le S&P 500 autour de 24 fois les attentes de profits pour l'année en cours. Notre stratégie va consister à faire progressivement entrer certaines de ces valeurs qui n'ont pas raison de rester à l'écart de la hausse si la résilience de l'économie américaine se confirme dans les mois à venir. Le récent rebond de 18% sur les trois derniers mois du Dow Jones, essentiellement composé de valeurs traditionnelles, montre les écarts de performance entre la « tech » et le reste de la cote appelle à un certain rééquilibrage.
Bonne lecture net rendez-vous pour un autre point mensuel début août.
Roland Laskine
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