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Altheora (ex-Mecelec) : mieux que faire du neuf avec du vieux ?
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 14/10/2021 à 16:00

Jérôme Lieury
Jérôme Lieury

Jérôme Lieury

Olier Etudes & Recherches

Analyste financier, membre du Cercle des analystes

https://www.olier-etudes-recherche.fr/

Le pole composites est un des trois métiers d'Altheora. (crédit  : Altheora)

Le pole composites est un des trois métiers d'Altheora. (crédit : Altheora)

La Bourse change de saison aussi, apparemment

Les marchés d'actions nous ont fait passer un été 2021 tranquille, voire serein, mais quelque chose a changé au mois de septembre, lequel a fini en baisse alors que l'on s'était habitué à des mois boursiers toujours en hausse depuis quelques temps : l'insouciance n'est plus de mise, c'est évident.

Peut-être parce que, tout simplement, la belle saison est passée et sentir la lumière baisser graduellement n'est pas bon pour le moral.
Peut-être aussi parce que la période de forte reprise économique, et de redressement fort des résultats des entreprise, de tous temps un des grands moteurs des marchés d'action, est terminée : les 1er et 2ième trimestres 2021 ne pouvaient que se comparer que très favorablement à des 1er et 2ième trimestres 2020 très catastrophiques pour cause de confinement, ce qui n'est plus le cas pour le 3ième trimestre 2021. Et pour cause : la conjoncture, l'activité des entreprises et tout ce qui s'ensuit, étaient déjà plus ou moins revenues à la normale au 3ième trimestre 2020, nonobstant les prévisions souvent quasi-apocalyptiques des économistes. Ce qui nous ramène à une vérité première : il faut prendre les prévisions que pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire des prévisions (puisqu'il faut bien en faire).

Difficile de comprendre ce que dit le marché en ce moment

Mais ce n'est pas tout : on a manifestement un peu de mal à comprendre ce que dit le marché, puisque celui-ci ne montre pas de tendance évidente, notamment si l'on regarde les secteurs boursiers : lorsqu'elles sont contrastées, les évolutions des différents compartiments de la cote, peuvent donner des idées sur le futur, puisque la Bourse où s'échangent (en principe) les anticipations des uns et des autres.
Mais ne surnagent sur le mois de septembre que les compagnies pétrolières et les banques, deux secteurs assez mal vus pour toutes sortes de raisons sur lesquelles nous ne nous étendrons pas, alors que la plupart des autres, qu'ils soient cycliques, ou défensifs, ou à chouchouter en principe puisque ils sont bien dans la grande thématique du "reopening", le retour à la normale post crise sanitaire, contre-performent nettement sur la période. Ce qui paraît d'autant plus curieux que le reopening est bien là dans notre beau monde occidental, les vaccinations aidant.

Un peu de souci à se faire dans la sphère réelle, éventuellement : Chine, Banques Centrales, et inflation

Bref : difficile d'y voir clair dans la sphère financière, mais on ne peut que constater que les soucis ont tendance à se multiplier dans la sphère réelle, et peuvent inquiéter quelque peu les investisseurs.

Tout d'abord avec toutes sortes de mauvaises nouvelles venant de Chine, pays qui est toujours un sujet pour les stratégistes, et aussi les gérants de fonds "global macro", dont le métier est d'investir dans le monde entier dans tout ce qui n'est éventuellement pas cher parce qu'en bas de cycle économique. Or la Chine i) essaie de se dé-carboner un tant soit peu, ce qui fabrique des pannes d'électricité, qui perturbent l'industrie, et les consommateurs aussi, ii) re-règlemente sérieusement ses géants de l'internet, ce qui inquiète un peu à l'Ouest, même si on aimerait bien en faire autant , iii) a un problème avec la faillite de son promoteur immobilier n°2 : Evergrande, ce qui n'est pas rien dans un pays où la construction est un très gros secteur de l'économie, et fait ressurgir dans les esprits un peu chagrins le spectre d'une cata "systémique" à la Lehman Brothers.

Ensuite, puisque tout va mieux en principe (…), les Banques Centrales devraient en toute logique arrêter les aides exceptionnelles mises en place face au covid, c'est-à-dire leurs taux d'interventions nuls, voire négatifs, pour alimenter les banques, et leurs rachats massifs d'obligations pour soutenir les gouvernements. Ce qui est de plus en plus certain, mais peut être néanmoins redouté comme un grand saut dans l'inconnu.

Enfin, pour ne rien arranger, le spectre de l'inflation vient aussi hanter les esprit angoissés : il y en a, c'est sûr, soit 5,3% en rythme annuel en août aux USA, et 3% en Europe, dont 4,1% en Allemagne, toute la question étant de savoir si cela va durer ou pas. Avec des nouvelles peu encourageantes pour le moment, entre les goulots d'étranglements dans l'industrie des composants électroniques, qui fournit toutes les industries, la désorganisation des ports et des coûts de transport très élevé, et des coûts d'énergie en forte hausse avec un pétrole à plus de 80$/baril et un prix du gaz naturel multiplié par 3 depuis le début de l'année sur le marché à terme, ce qui ne peut que se répercuter dans les tarifs consommateurs. D'où là aussi une floraison de scénarios qui aimeraient bien voir sombrer le monde dans la stagflation, qui est comme chacun sait un mélange hautement toxique de stagnation économique et d'inflation.

Ne pas céder à la morosité : l'inflation n'est peut-être que de la reflation, et on en a éventuellement bien besoin. Pour, par exemple, relocaliser.
Histoire de ne pas trop se laisser gagner par ce qui pourrait être un début de délectation morose générale, on peut rétorquer à ce qui précède que i) la Chine gère à l'évidence plutôt bien son économie de marché, même si ça peut paraître paradoxal pour une pays anti-libéral, et il ne faut donc pas trop s'inquiéter pour elle, ii) les Banques Centrales peuvent revenir à des politiques monétaires conventionnelles vraisemblablement sans trop de heurts et de malheurs, pour peu que l'on pense (ce qui suppose un peu d'imagination ?) que nos autorités monétaires et économiques contrôlent un tant soit peu la situation, iii) on est encore très loin du grand dérapage inflationniste, dont le risque est encore lointain, même si on n'est jamais sûr de rien.

D'autant qu'après plusieurs décennies de pressions déflationnistes, le retour d'un peu d'inflation, soit 3-4% par an ne ferait éventuellement pas  beaucoup de mal dans nos économies. Ceci alors que l'objectif de 2% d'inflation assigné depuis très, voire trop, longtemps aux Banques Centrales n'est plus aussi sacro-saint qu'avant, puisqu'on parle à présent de moyenner autour de 2% dans la durée aussi bien à la Fed américaine qu'à la BCE européenne, soit un net assouplissement de la doctrine qui n'est peut-être pas aussi anodin qu'il en a l'air.
Et il pourrait s'agir surtout de moins de déflation importée en fait , et donc de reflation avant tout, dans un monde où on raccourcit et re-régionalise les filières d'approvisionnement, et où on songe fortement à relocaliser nombre de productions parties en Asie il y a bien longtemps déjà.

Si ce mouvement de relocalisation se confirme et s'amplifie, ce qui est assez possible même si la polémique fait rage sur le sujet dans notre beau pays, on devrait assister à une revitalisation du tissu industriel qui pourrait profiter aussi à ceux qui n'ont jamais délocalisé leur production. C'est en tout cas le discours que tient la direction d'Altheora.

Un mini-groupe industriel

Altheora est une PME industrielle basée à Mauves, en Ardèche qui a semble-t-il réussi à se faire depuis longtemps une place au soleil en tant que fournisseur des grandes entreprises malgré sa taille modeste, soit un chiffre d'affaires de 32 millions d'euros attendu pour cette année avec 220 salariés sur 4 sites en Auvergne Rhône Alpes et un autre en Roumanie.

Altheora semble bien maîtriser a priori des savoir-faire d'un niveau élevé dans la conception et la fabrication de pièces en matériaux composites, matériaux difficiles à travailler qui allient des matières plastiques à de renforts à base de fibres, fibres naturelles ou matériaux à hautes résistances comme le carbone ou le kevlar. Des matériaux qui, une fois formés et durcis dans des presses (dans les filiale Mecelec Composites et MPC Roumanie), et peints de revêtements ignifuges, isolants, anti-bactériens, anti-ondes radar, etc…(chez Altheora Coating) permettent de fabriquer des pièces très solides, souvent en substitution de l'acier ou de l'aluminium. La société fabrique notamment des coffrets en tous genres pour équipements électriques (le métier historique) et équipements de réseaux gaziers, des bouts de carrosseries complexes, des carénages et des pièces de structures pour véhicules variés, du camping-car au TGV en passant par les engins de BTP, les bus, les trains, les avions, les poids lourds ou les machines agricoles, des coques d'appareils électroménager ou médicaux, et réalise aussi des commandes sophistiquées et emblématiques comme les toits pointus des colonnes Morris des rues de Paris.

La société sert des clients prestigieux mais difficiles comme Alstom, Thales, Schneider Electric, Iveco, Trigano, JC Decaux, Nexans, et d'autres un peu moins connus, comme Ligier, qui est pourtant le leader français de la voiture sans permis, ce qui n'est pas rien, et des équipementiers ferroviaires comme Vossloh et Ansaldo STS. Ce qui, vu de l'extérieur, semble relever de l'exploit étant donné la taille modeste de l'affaire, mais peut s'expliquer par une grande capacité à faire du sur-mesure (6 000 références produits, selon la direction) et un outil de production puissant (32 presses de 100 à 2 000 tonnes) et bien automatisé et robotisé : on n'a rien sans rien.

Rentabilité et bilan : peut mieux faire

Altheora a dégagé un résultat opérationnel (: le chiffre d'affaires moins toutes les charges courantes : achats, salaires, etc….) nul ou presque (7k€) en 2020, année de très forte récession, on s'en souvient, qui avait fait reculer l'activité de -12%, soit une marge opérationnelle (le rapport entre ce résultat opérationnel et le chiffre d'affaires) nulle aussi, après une marge opérationnelle de 2,7% en 2019. Les comptes consolidés du premier semestre 2021 montrent une bonne activité a priori, soit un chiffre d'affaires de 17 millions d'euros, mais une marge opérationnelle toujours un peu sous-standard à 2,1%. Ce qui devrait bien se rattraper au deuxième semestre toutefois, à en croire en tout cas le consensus, qui table sur une marge opérationnelle de plus de 4% sur l'année.

Le bilan du groupe n'est pas parfait non plus, avec un ratio d'endettement financier net/Fonds Propres de 83% au 30 juin, ce qui peut se comprendre après la dure année 2020, mais est un peu lourd pour qui considère qu'un ratio de 50% et moins est plus présentable, puisqu'à ce niveau plus agréable à regarder les banques aident bien la société, mais sans prendre trop de place au détriment des actionnaires.
Bref : autant de métriques à améliorer dans un futur que l'on espère proche, et des améliorations qui s'imposent si l'on veut que le marché, qui a toujours raison (en principe, mais ce n'est pas toujours le cas en pratique, Dieu merci) accorde un jour une valorisation améliorée aussi au titre.

Encore un bon avenir, apparemment

Avant de changer de nom en mai 2021, Altheora s'appelait Mecelec, fabricant d'équipements de réseaux électriques créé en 1934 et devenu grand spécialiste du composite dans les années 1970 avec sa filiale MCR (pour Mecelec Composites & Recyclage). Altheora est donc une vieille société qui a survécu à tous les aléas conjoncturels, ce qui est déjà beaucoup. Mais c'est aussi une société en plein transformation, sous l'impulsion d'un direction nettement rajeunie depuis quelques temps. Laquelle direction vient d'annoncer un nouveau plan stratégique qui vise une taille de 100 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici 2026. Elle mise non seulement sur les compétences actuelles de la société, qui semble de fait bien placée pour profiter du mouvement de re-régionalisation/démondialisation des chaînes de valeur, mais aussi sur une capacité de R&D élargie, avec une nouvelle structure Altheora Shift. Cette entité combine les ressources de la société en la matière avec celles d'autres bureaux d'études établis ou start-up, pour enrichir toujours plus l'offre produits du groupe et sa capacité à répondre aux demandes. Avec déjà un premier résultat : le Gendzo Process, un procédé hybride innovant pour le traitement de surface des pièces en composite.

Inutile de préciser qu'Altheora est membre de la French Fab, le nouvel étendard de l'industrie française, qui rallie les industriels en mouvement (sous l'égide de Bpifrance). Ce qui augure plutôt bien de la suite, si cette nouvelle dynamique qui semble bien se mettre en place se matérialise vraiment.

Et pourquoi pas, après tout : on n'arrête pas le progrès, c'est bien connu.

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