Mais c’est pas tout
Alors oui, il y a des signes comme quoi tout n’est pas fini. Mais il y a quand même d’autres signes qui disent que la FED a tenu des réunions top-secret avec les banques de Wall Street, parce que le marché du financement à très court terme commence à grincer. Tout d’abord le recours massif à la facilité de rachat (le repo) de la Fed, signe que les banques ont besoin de cash en urgence. Ensuite, le QT qui aspire du cash hors du système bancaire et ce, même s’il est censé se terminer en décembre. Et il y a aussi, l’émission massive de dette par le Trésor US qui « siphonne » de la liquidité. Pour être clair, moins de cash dispo, plus besoin de cash urgent, tout ça stresse le petit monde de la banque et donc, la Fed intervient discrètement – undercover – pour anticiper l’escalade. Alors bien sûr, ce n’est pas encore une crise comme en 2008 ou 2020… mais ce sont des signaux sérieux que quelque chose pourrait déraper si la Fed ne calme pas le jeu.
Et puis, comme s’il n’y avait pas assez de mauvaises nouvelles comme ça, on apprend ces derniers jours que la crise immobilière 2025 serait parmi nous. Les fore clo sures (autrement dit, les saisies immobilières) ont explosé de 20%. Là non plus, c’est pas encore 2008, mais ça commence à sentir le souffre. On parle de 37’000 maisons parties en procédure le mois dernier. Et en tête, on retrouve la Floride. Là-bas, 1 maison sur 1’829 finit dans les bras de la banque. Mais alors pourquoi ça déraille, me direz-vous ? Parce que les Américains se prennent des hausses de taxes, d’assurance et de coût de la vie à répétition et c’est pas les déclarations de l’agent orange qui dit que tout va bien qui paie l’augmentation d’à peu près tout au supermarché du coin. Je vous donne juste un exemple : l’assurance habitation a pris-50% en cinq ans. À ce niveau-là, c’est plus une prime, c’est une punition. Et puis il y a aussi le génie de l’investissement immobilier qui ont acheté avec des taux à 7% en se disant : “T’inquiète, je refinance quand ça redescend.” Sauf que, c’est jamais redescendu. Sur une maison à 400’000$, la récente baisse des taux leur aura fait économiser 100$… En conclusion, les gens sont surendettés, paumés, et commencent à lâcher prise. Et ce n’est que le début. Entre le marché du travail qui tremble, le shut-down fédéral qui a foutu le bazar dans les salaires, et les factures qui explosent, les défauts vont répondre “présent” dans les prochains mois. Bref, les Américains ont vécu comme si tout était illimité.
Sauf que maintenant, c’est la réalité qui leur présente la facture.
Alors oui, je sais, vous auriez voulu des annonces plus chouettes pour commencer la semaine, c’est pas faute d’en chercher, mais là on tourne en rond et malgré tout ce que l’on veut bien nous dire, tout ne va pas si bien et ça commence à se voir. La semaine commence donc avec plein de questions dans la tête et pour l’instant, les marchés ont l’air de s’être levés du bon pied. Les futures sont en hausse et on ne parle que des chiffres de Nvidia qui sortiront mercredi soir. Et tout le monde flippe, tout le monde a peur : « et si c’était légèrement moins bon ? ». SoftBank a tout vendu, Burry est short, Peter Thiel s’est tiré avec du cash. Avec une valorisation à 5’000 milliards, on n’a vraiment pas besoin de la moindre déception.
En Asie
L’Asie démarre la semaine en mode « merci, mais non merci ». Le Japon ouvre avec un PIB en baisse de 1,8% — c’est moins pire que prévu, mais ça reste quand même pas terrible. Le Nikkei est en baisse de 0.3%, la consommation est molle, les exportations sont plombées par les tarifs de Trump… Seul point positif : l’investissement des entreprises limite la casse. Du coup, une hausse des taux au Japon en décembre semble peu probable et ça, c’est une bonne nouvelle. Comme si le Japon n’avait pas assez de problèmes, voilà que la Chine entre en scène. Pékin déconseille désormais à ses citoyens d’aller au Japon après des propos de la Première ministre sur Taïwan. Résultat : carnage dans les valeurs touristiques japonaises et marchés chinois dans le rouge. Heureusement, la Corée du Sud apporte un peu de soleil : le KOSPI rebondit de 1,7% grâce aux semi-conducteurs. Samsung et SK Hynix voient leurs stocks fondre — signe que la demande explose — et Samsung annonce encore plus d’usines.
Le pétrole est à 59.53$, l’or est à 4083$, le Bitcoin continue de ramer à contre-courant et se traite à 95’000$, en équilibre instable sur des zones où il vaudrait mieux qu’on n’aille pas chercher plus bas et le rendement du 10 ans américain est de 4.15%.
Les nouvelles du jour
Dans les nouvelles du jour, on notera qu’il y a des bruits de couloirs sur le rachat de WPP. Selon le Sunday Times, Havas – la maison Bolloré – serait en train de réfléchir à mettre la mais sur l’ex-roi de la pub qui est devenu trop bon marché. Rien d’officiel, mais on entend tout de même dire ici et là, que des grands noms du Private Equity seraient sur le coup pour racheter des morceaux de la boîte. WPP est devenu tellement bon marché que même les géants du private equity se demandent s’ils ne devraient pas sauter sur l’occasion, Bolloré renifle la bonne affaire, les Hedge Funds sont shorts et on se demande qui va tirer en premier. Le roi de la pub est officiellement passé en rayon “liquidation”.
Une des grandes questions du week-end, c’et aussi Berkshire Hathaway qui a annoncé une prise de participation dans Alphabet. 4,3 milliards investis dans Alphabet. Oui, Warren Buffett — allergique historique à la tech et qui part en retraite — devient actionnaire de Google. Évidemment, ce move ne vient pas de Warren lui-même, mais de ses deux snipers, Ted Weschler et Todd Combs, déjà responsables du pari Amazon en 2019. Et vu qu’Amazon pèse encore 2,2 milliards chez Berkshire, les deux compères savent ce qu’ils font. La seule question que « le marché » se pose, c’est pourquoi Alphabet ? Non, parce que le titre a déjà pris +46% cette année, dopé par l’IA et le cloud. Ce n’est pas la première incursion de Berkshire dans la tech, puisqu’Apple est déjà la plus grosse position. Mais l’entrée dans Alphabet, c’est un signal clair : Berkshire ouvre grand la porte aux géants du numérique et le départ de Buffet pourrait renforcer la chose. Buffett n’aimait pas la tech, mais la tech l’a rattrapé.
Les chiffres et le reste
On commence donc la semaine en équilibre instable : les chiffres économiques arrivent en retard, le shutdown a mis un merdier monstrueux dans nos têtes, la liquidité se fait la malle et l’immobilier commence à craquer. L’IA tient encore la baraque, mais même là, on voit des fissures. Et malgré tout ça, les marchés font semblant d’être détendus, alors qu’ils transpirent abondamment. Tout le monde attend mercredi soir pour « savoir » sur Nvidia. Point final.
Cette semaine, Nvidia c’est le juge de paix. La banque centrale non officielle du marché. On n’a pas droit à la déception et jeudi matin, plus rien ne sera jamais pareil, soit on repart pour un tour, soit c’est le bain de sang. L’indicateur Greed and Fear, nous dit qu’on a trop peur pour que ça finisse mal, mais le marché actuel n’est plus celui qu’on a connu et la seule certitude de ce lundi matin, c’est que tout peut arriver et si quelque chose arrive, ça sera mercredi soir.
Côté chiffres, il y aura le PIB en Suisse, le New York Empire Manufacturing Index, le construction spending et plusieurs membres de la FED qui vont parler. Dont Waller. Pour le moment les futures sont en hausse de 0.45% et la semaine commence bien, on serre les fesses, on a des œillères, mais ça commence bien…
Bon lundi, bon début de semaine et à demain pour un nouvel épisode de « l’Intelligence Artificielle, c’est quand même vachement cool, même si, selon chatGPT, elle peut détruire l’humanité! »
À demain !
Thomas Veillet
Investir.ch