(AOF) - Parmi les plus fortes baisses de l’indice SBF 120, Ubisoft recule de 5,72% à 11,625 euros au lendemain de l’avertissement sur ses revenus. L’éditeur de jeux vidéo en difficulté a également annoncé avoir "mandaté des conseils de premier plan pour étudier et poursuivre diverses options stratégiques et capitalistiques transformantes". L’action Ubisoft a perdu près de la moitié de sa valeur au cours de l’année écoulée après avoir accumulé les mauvaises nouvelles dans un contexte difficile pour le secteur: pertes, avertissement, performance décevante de Star Wars Outlaws, décalage de jeux…
Dans le même temps, le groupe français a bénéficié de rumeurs de presse à propos d'un possible rachat par ses 2 principaux actionnaires, Tencent et la famille Guillemot.
S'agissant des "options stratégiques et capitalistiques transformantes" destinées à "extraire la meilleure valeur possible pour les parties prenantes", aucun détail n'a été donné, souligne TP Icap Midcap. "Le management a balayé d'un revers de main toutes les tentatives de questions sur ce sujet lors de la conférence téléphonique" avec les analystes.
Ubisoft sauve les meubles grâce aux partenariats
A l'occasion de son point de stratégie de jeudi, Ubisoft a de nouveau reporté le lancement d'Assassin's Creed Shadows. Le dernier opus de la principale franchise de l'éditeur de jeux vidéo sortira à quelques jours de la fin de l'exercice 2024/2025, le 20 mars. Fin septembre, sa sortie avait été déjà été décalée du 15 novembre 2024 au 14 février 2025.
Ubisoft a expliqué qu'il souhaitait "mieux intégrer les retours des joueurs recueillis au cours des trois derniers mois, et créer les meilleures conditions possibles pour le lancement du jeu".
Le groupe français a par ailleurs averti que le net bookings - l'équivalent du chiffre d'affaires - du troisième trimestre de l'exercice 2024-25 était désormais attendu à environ 300 millions d'euros, sachant qu'il visait auparavant 380 millions d'euros. Le marché anticipait 385 millions d'euros. Ubisoft a enregistré des ventes plus faibles que prévue pendant les fêtes de fin d'année, notamment pour Star Wars Outlaws, et a arrêté XDefiant, son jeu de tir à la première personne en free-to-play.
Ce faible troisième, cumulé au décalage d'AC Shadows "aurait pu entraîner un gros avertissement sur les chiffres de l'année en cours", souligne TP Icap Midcap. "Il n'en sera rien grâce à la signature de partenariats sur la fin d'année monétisant notamment le portefeuille des droits d'Activision acquis l'an passé".
L'éditeur de jeux vidéo anticipe ainsi dorénavant un net bookings d'environ 1,9 milliard d'euros sur l'exercice 2024-2025 contre environ 1,95 milliard d'euros auparavant. Ubisoft prévoit par ailleurs toujours un résultat opérationnel ajusté et un flux de trésorerie libre proches de l'équilibre pour l'exercice 2024-25.
"Ces objectifs seront atteints grâce à un mix de chiffre d'affaires plus profitable (back-catalogue et partenariats), ainsi que par un objectif de réduction de coûts revu à la hausse", explique Invest Securities. Le groupe français prévoit désormais de dépasser les 200 millions d'euros de réduction de sa base de coûts fixes d'ici l'exercice 2025-26 par rapport à l'exercice 2022-23, sur une base annualisée.
"L'absence de génération de free cash flow sous-jacent survient dans un contexte difficile s'agissant du calendrier de remboursement de la dette", prévenait UBS début octobre après l'avertissement du groupe.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Points clés
-Troisième éditeur mondial indépendant de jeux vidéo, attirant 138 millions de joueurs uniques, créé en 1986 et détenant les marques phares Assassin’s Creed, Just Dance, Watch Dogs, The Division, Far Cry, For Honor, Tom Clancy, the Crew, Ghost Recon, Rainbow, Brawlhalla… ;
- Chiffre d'affaires de 2,3 Mds€ réalisé en Amérique du nord pour 53 % et en Europe pour 35 % ;
- Activité répartie entre les consoles pour 56 %, les ordinateurs pour 32 % et les téléphones pour 6 % ;
- 5 ambitions : détention de la totalité des marques, intégration des nouveautés technologiques dans la politique R&D, maîtrise de la production interne à 96 %, puis montée en puissance de la récurrence des revenus (64 % apportés par le « back catalogue ») et de la rentabilité via la digitalisation ;
- Capital détenu à 25,42 % % du capital et 29,64 % des droits par 2 actionnaires agissant de concert -les frères fondateurs et la famille Guillemot avec 15,48 % des actions d’une part, le chinois Tencent avec 9,99 % d’autre part- puis par les salariés (3,6 %) ;
- Présidence et direction générale du conseil de 11 membres assurée par Yves Guillemot ;
Enjeux
- Agilité du modèle d’affaires :
- réorganisation industrielle avec une réduction nette de 200 M€ de la base de coûts fixes par fermeture de bureaux et baisse des effectifs, suppressions de jeux & ventes d’actifs non-essentiels, construction de marques et de services Live plus puissants et sélectivité accrue, au prix de dépréciations, dans la R&D ;
- depuis juin, engagement fort dans les jeux d’aventure en monde ouvert, avec objectif de regagner le leadership mondial, et dans les expériences natives ou GaaS,
- « redoublement d’efforts sur l’exécution », intégration des avis des joueurs par le biais de Title Updates et focus sur la génération de trésorerie,
- valorisation des jeux et streaming par les partenariats BtoB sur le back-catalogue ;
- innovation fondée sur des technologies de pointe (Anvil et Snowdrop pour les moteurs, Ubisoft connect et I3D.net pour la distribution), le Voxel et le cloud computing avec Scalar…, accélérée par le soutien aux start-ups -6 à 10 incubées chaque année- et le déploiement de « Lead associate » pour les studios de création et Motion Pictures pour l'animation et le film ;
- Stratégie environnementale :
- recours aux énergies renouvelables pour les centres de données français et canadiens,
- séquestration des émissions de GES et réduction constante des émissions par employé, (10,8 % en 2024 vs 2019) ;
- Visibilité de l’activité avec un net booking quasiment égal au chiffre d’affaires annuel ;
- Bilan un peu tendu : 1,7 Md€ de fonds propres, endettement net de 1,1 Md€ et capacité d’autofinancement négative de 291 M€ à fin septembre.
Défis
- Activité concentrée sur septembre-janvier, d’où la clôture des comptes à fin mars ;
- Spéculations sur les liens capitalistiques de la société holding Guillemot Brothers, fondatrice d’Ubisoft, avec Tencent, titulaire de 49,9 % de son capital et de 5 % de ses droits de vote ;
- Après les succès de Rainbow Six Siege et des franchises The Crew et Ghost Recon, attente de la réaction du public à la sortie fin 2024 de Assassin’s Creed Shadows ;
- Impact sur les ventes des améliorations, via Title Update, du nouveau jeu Star Wars Outlaws ;
- Après un repli de 20 % des revenus, une hausse de 12 % du net booking et une perte nette de 272 M€ au 1er semestre, objectif 2024-25 d’une hausse solide du net booking autour de 1,95 Md€ et d’un résultat opérationnel proche de l’équilibre, comme l’autofinancement libre ;
- Société ne distribuant pas de dividende.
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