La stratégie de gestion alternative la plus ancienne et la plus connue reste le « Long/Short actions ». Elle consiste à prendre des positions acheteuses (Long) sur des actions considérées comme sous-évaluées et des positions vendeuses (Short) sur d’autres actions estimées surévaluées.
De plus de plus d’investisseurs s’interrogent sur la gestion alternative. «Long/Short», « Global Macro», «Arbitrages»… les stratégies sont multiples et peuvent sembler compliquées voire même faire peur. Comment appréhender cette classe d’actifs ?
Quels sont les différents types de gestion alternative ?
La Financière de l’Echiquier propose par exemple un « CTA » qui peut aussi être qualifié de fonds « suiveur de tendance ». Lorsqu’une tendance claire se dégage, le fonds la suit et récolte la performance. « Les CTA sont une brique essentielle qui permet de couvrir un portefeuille tout en lissant la performance du fonds quand l’environnement n’est pas favorable » explique Alexis Grutter, Gérant à La Financière de l’Echiquier du fonds QME (Quantitative Multi Edge).
De son côté, JP Morgan AM gère un fonds Global Macro où la performance va se faire non pas sur la direction des marchés mais sur les écarts entre les différentes zones géographiques et classes d’actifs. « C’est une autre forme de performance : il faut concevoir JP Morgan Global Macro Opportunities comme un grand planisphère et y voir un fonds qui va investir partout et sur toutes les classes d’actifs » illustre Stéphane Vonthron, Directeur Commercial pour les Conseillers financiers.
« Je préfère parler de performance absolue que de gestion alternative » fait savoir Pascal Gilbert, gérant de DNCA Invest Alpha Bonds. Depuis quelques mois, la société DNCA a ainsi choisi de développer une solution « Absolute Return ». Celle-ci se distingue des autres propositions du marché en faisant le choix d’investir sur les obligations internationales.
La stratégie de gestion alternative la plus ancienne et la plus connue reste néanmoins le « Long/Short actions ». Elle consiste à prendre des positions acheteuses (Long) sur des actions considérées comme sous-évaluées et des positions vendeuses (Short) sur d’autres actions estimées surévaluées. Mais les investisseurs associent souvent le « Long Short » au « Market Neutre » où l’exposition nette théorique aux actions est de 0%.
Or, certaines sociétés de gestion proposent des fonds Long/Short ayant un biais directionnel. « On ne vend pas une décorrélation totale des marchés mais un amortissement de la baisse et une proportion importante de la hausse » indique Gilles Sitbon, Gérant de Sycomore Long/Short Opportunities. Mais pourquoi avoir un biais « Long » plutôt qu’un positionnement « Market Neutre » ? « Si l’on regarde les marchés sur 100 ans, c’est dans la nature humaine de construire de la valeur. Mais ce n’est pas une ligne droite » ajoute Gilles Sitbon qui insiste sur l’horizon de temps. Le gérant se donne au moins 12 à 18 mois pour « gagner de l’argent. »
Pour quels résultats et pour quel type d’investisseur ?
Toutes ces solutions semblent prometteuses mais on peut remarquer que le fonds JP Morgan Global Macro Opportunities a déçu lors du second semestre 2016 alors le marché montait, tandis que Echiquier QME n’a pas délivré de performance depuis 18 mois.
Dans un marché haussier, le fonds Global Macro participe donc modestement à la hausse. « Mais c’est logique car on fait le même niveau de performance sur un marché baissier » justifie Stéphane Vonthron. En effet, il est plus compliqué pour un gérant Global Macro d’avoir un marché homogène. Le fonds fait donc en moyenne plus de performance sur un marché baissier car les actifs sont souvent plus dispersés dans ce contexte. « La construction de ce portefeuille, il faut la voir comme une assurance » image la société de gestion.
« Etre décorrélé, c’est aussi être anti-corrélé », reprend Alexis Grutter. Ainsi, alors que 90% des fonds dans le monde sont « Long Only » (ayant donc uniquement un portefeuille acheteur dépendant de la direction des marchés), le gérant va surtout chercher à générer de la performance positive même dans une année compliquée. Sur des années sans grande tendance comme 2017, il a modifié 6 fois la direction de la poche taux. Dans cette situation, il passe en mode protection du capital. « Il faut savoir pourquoi on achète un CTA : on va capter de la tendance mais on ne sait jamais vraiment quand elle démarre ou quand elle finit. En revanche, il faut être là au début pour en profiter » détaille le gérant.
Selon Gilles Sitbon, les fonds de gestion alternative sont souscrits par 2 types de personnes : les gens qui ont des fonds actions purs et qui veulent se désensibiliser un peu et ceux qui n’en ont pas et veulent légèrement se réexposer. « On ne vend pas la martingale. Ce qu’on fait est assez simple, on passe 75% de notre temps à rencontrer les entreprises. Pour nous allocataire, le risque est sur la capacité du gérant à choisir les bonnes valeurs » prévient Sycomore AM.
Dans ce cadre, DNCA met l’accent sur l’importance de la marge de manœuvre du gérant. Pascal Gilbert n’investit donc pas sur les obligations s’il estime que la valeur n’est pas là. Son idée est d’avoir la volatilité d’une obligation à 10 ans soit un niveau inférieur à 5%. « Beaucoup de gérants ne réfléchissent plus car ils sont contraints par les benchmark. Nous, on ne l’est pas et on n’achète pas un risque si on n’est pas payé pour. Après on peut se tromper » reconnaît-il.
Quels avantages apportent ces stratégies alternatives ?
L’objectif annoncé de performance annualisé à long-terme de Echiquier QME est de 10/15%. Mais le gérant ambitionne ce résultat en réalisant une belle année tout en ne perdant pas trop durant les autres car c’est lorsque l’option s’active qu’il y gagne beaucoup. « La différence avec un fonds Global Macro est que nous n’avons pas de boule de cristal » caricature Alexis Grutter, qui considère que le marché a toujours raison. « Un CTA, c’est une grosse dose de performance, une dose de volatilité et 2 doses de drawdowns » résume-t-il. Via Echiquier QME, il va donc chercher à limiter ces pertes maximales.
« On ne lit pas l’avenir dans des entrailles de poulet » réplique Stéphane Vonthron, arguant que la perte maximale de son fonds Global Macro a été de 14%, et ce… dans un marché haussier. Cependant, le délai de recouvrement a été d’un an, ce qui reste cohérent avec son horizon d’investissement recommandé de 5 ans. Une preuve supplémentaire, s’il en est, de sa décorrélation avec les marchés, mais également avec les autres fonds de la place. « On a une corrélation de -3% avec H2O Multistrategies ! Mais la gestion ne s’arrête pas à H2O et on a un comportement très autonome par rapport aux autres fonds qui composent vos portefeuilles » commente Stéphane Vonthron. Une décorrélation qui n’est selon lui « pas un mot pour faire joli » mais permet d’aider l’investisseur à détenir des actions dans la durée tout en lissant ses pertes.
Ce positionnement tranche fondamentalement avec celui du gérant de DNCA. « Nous, on est là pour faire de la performance d’abord » martèle Pascal Gilbert qui gère depuis 1987 et rappelle que sur ces 30 dernières années, le marché obligataire a fait mieux que le marché actions. Pour les prochaines années, il juge avoir un modèle qui est clair et permet de générer 4% par an. « Mais on ne regarde pas dans le rétroviseur et on ne regarde pas les autres fonds ni la décorrélation qui va avec. Le client me confie de l’argent alors je veux lui rendre de la performance positive » assure-t-il.
Une conception du marché obligataire qui reste tout aussi importante sur les actions où, par définition, l’investisseur peut théoriquement tout perdre. « Chez Sycomore, on essaie de vendre aux investisseurs le fait de s’affranchir du timing de l’entrée ou de la sortie » avance Gilles Sitbon. Bien entendu, sous réserve qu’il reste investi au moins 12/18 mois.
La flexibilité : caractéristique indispensable pour appréhender la gestion alternative
Si les approches et les conceptions du marché diffèrent selon les sociétés de gestion, celles-ci s’accordent néanmoins sur un paramètre commun : la flexibilité, et son pendant, la réactivité.
« L’intérêt d’un CTA est simple: quelques envolées lyriques au milieu d’années plus sombres… On va donc être extrêmement dynamiques pour pouvoir couper le portefeuille et gérer activement. C’est pour cela que l’on ne peut pas piloter beaucoup d’argent » précise le gérant d’Echiquier QME dont l’encours atteint désormais près de 100 millions d’euros.
Par ailleurs, la remontée des taux aux Etats-Unis fait craindre une baisse des actions, ce qui offre une alternative à ce marché. Gilles Sitbon suggère donc un véhicule très souple et flexible car la réactivité y est importante. « Il ne faut pas creuser un trou si profond que l’on ne peut remonter » alerte-t-il.
Une vigilance d’autant plus nécessaire que l’on entre dans une phase de grand changement. « On a vécu une période formidable après une crise formidable » souligne Pascal Gilbert. Ce qui signifie que l’on doit aujourd’hui prendre du risque pour être payé et qu’il faut être extrêmement liquide pour être flexible. Et pourquoi pas via ces stratégies alternatives ? « Ce n’est pas de la gestion alternative obscure. Je suis là pour expliquer ce que l’on fait simplement. Et quand l’investisseur comprend… il adhère » rassure le gérant de DNCA.
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