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Serge Ferrari : des fondamentaux plus qu'agréables à regarder
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 15/09/2022 à 08:28

Jérôme Lieury
Jérôme Lieury

Jérôme Lieury

Olier Etudes & Recherches

Analyste financier, membre du Cercle des analystes

https://www.olier-etudes-recherche.fr/

Serge Ferrari fabrique des surfaces en composite souple, non déformable et ignifugé, livrées sous forme de bobines, ou au contraire en préfabriqués, et utilisées principalement dans la construction : toitures tendues, protections solaires, solutions acoustiques, écrans d'étanchéité. (crédit : Serge Ferrari)

Serge Ferrari fabrique des surfaces en composite souple, non déformable et ignifugé, livrées sous forme de bobines, ou au contraire en préfabriqués, et utilisées principalement dans la construction : toitures tendues, protections solaires, solutions acoustiques, écrans d'étanchéité. (crédit : Serge Ferrari)

Avec un Cac 40 à -13% depuis le début de l'année, un Dow Jones à -14% et le reste à l'avenant, les temps sont un peu difficiles sur les marchés d'actions. Ce qui peut se comprendre, puisque les grands paramètres de l'économie : les taux, les changes, les matières premières, le pétrole, etc…  et l'inflation par-dessus tout, s'agitent un peu dans tous les sens, sans parler de la perplexité affichée à présent par les économistes eux-mêmes. Lesquels se doivent de faire des prévisions, et n'ont dans l'ensemble pas eu beaucoup de chance avec ça depuis deux ans, il faut le dire.

Ceci étant, il faut partir du principe qu'une prévision est toujours fausse (surtout en économie, qui est vraisemblablement assez loin d'être une science exacte) et sert juste à se donner un peu de confort (intellectuel) face à une conjoncture compliquée. Et que la "macro" ne fait pas tout pour expliquer l'évolution des cours de Bourse, bien au contraire : la "micro", analyser les chiffres de base de la société cotée sur laquelle on envisage de parier, a aussi largement son mot à dire. Car, indubitablement, le marché, dans son infinie sagesse, regarde ces fondamentaux et les valorise, ou les sanctionne aussi sans pitié au besoin.

Moins regarder les marchés, et plus regarder les comptes des entreprises, revenir au basique, en quelques sortes, est donc éventuellement ce qu'il y a de mieux à faire en ce moment : ça ne mange pas de pain, en tout cas.

L'analyse financière : pas tant de chiffres que ça, en fait

D'autant que ces fameux fondamentaux sont aussi relativement peu de choses une fois réalisé le travail d'extraction (et d'élagage) des chiffres des comptes consolidés publiés par la société en question. Ce qui n'est pas toujours évident, les normes comptables étant ce qu'elles sont : les analystes ne volent pas leur pain, croyez-moi.

Il s'agit d'une part de quelques chiffres sortis du compte d'exploitation i) le chiffre d'affaires, et comment il progresse année après année, ii) la marge opérationnelle (le rapport entre le solde chiffre d'affaires diminué des charges d'exploitation : achats, salaires etc…, soit le résultat opérationnel courant, et ce chiffre d'affaires) et comment cette marge se tient par rapport au secteur et comment elle évolue dans le temps, iii) les frais financiers et combien ceux-ci consomment de ce résultat opérationnel, et enfin iv) le résultat net, c'est-à-dire l'argent que la société a gagné (après impôt) pour ses actionnaires en travaillant dur.

Les bons fondamentaux, c'est aussi un bilan avec pas trop de dettes financières rapportées aux Fonds Propres, qui sont le capital mobilisé par les actionnaires. Ce ratio Dette Nette/Fonds Propres étant raisonnablement présentable quand il fait moins de 50%, c'est-à-dire quand la société ne dépend pas trop des banques : c'est aussi simple que cela.

La bonne mesure de la création de valeur : le cash

Et enfin et surtout, les fondamentaux, c'est la richesse créée année après année par l'entreprise : la génération de trésorerie libre, le "free cash-flow" en bon franglais financier, que l'on peut mesurer grossièrement (voire en faisant hurler les puristes de la théorie financière, et Dieu sait s'il y en a) en soustrayant les investissements bruts à la capacité d'autofinancement (laquelle est tout simplement le résultat net + les amortissements du compte d'exploitation).

Free cash-flow qui est merveilleux quand il est positif année après année, et d'autant plus merveilleux quand la société en question fait en plus de la croissance, une croissance qu'elle peut donc financer sans faire appel à ses banquiers et sans demander à ses actionnaires de remettre au pot.

Des actionnaires qui, de fait, s'enrichissent. Ce qui se retrouve un jour ou l'autre dans le cours de Bourse, même si celui-ci a tendance à évoluer de façon un peu erratique d'un jour à l'autre, ce qui est bien normal après tout, surtout avec la nouvelle grande perplexité des économistes.

Inutile de préciser que l'analyse des fondamentaux est le plus souvent plus simple quand il s'agit de PME cotées, des "smallcaps" ou des "midcaps", que quand il s'agit d'un grand groupe aux activités globales et variées. Et que les PME cotées étant souvent des affaires familiales, les fondamentaux y sont souvent meilleurs. C'est ce que l'on peut constater très notamment chez Serge Ferrari Group, une société industrielle basée à La Tour-du-Pin (Isère), et cotée sur Euronext à Paris.

Serge Ferrari : six usines, et toutes sortes de produits en toile composite

Serge Ferrari fabrique des surfaces en composite souple, non déformable et ignifugé, livrées sous forme de bobines, ou au contraire en préfabriqués, et utilisées principalement dans la construction : toitures tendues, protections solaires, solutions acoustiques, écrans d'étanchéité, etc. pour toutes sortes d'applications, depuis les couvertures de stades jusqu'aux structures légères pour l'évènementiel, le mobilier outdoor et les tops pour bateaux de plaisance, en passant par les bâtiments industriels, les entrepôts, les hangars, les bâtiments tertiaires, etc… Serge Ferrari Group produit aussi pour l'affichage de grande dimension, ainsi que des matériaux barrières pour des industries comme les bioénergies, le recyclage des eaux usées, etc… Le tout pour un chiffre d'affaires de 335 millions d'euros attendu pour 2022 avec 1 200 collaborateurs dans 6 sites de production (1 en France : le site historique, 2 en Suisse, 1 en Allemagne, 1 en Italie et 1 à Taïwan), 5 centres de R&D, des bureaux de représentation dans 14 pays et un réseau de 100 revendeurs dans 80 pays.

La société commercialise ses produits auprès de 4 000 clients, principalement les grands prescripteurs que sont les agences d'architecture et les designers de mobilier, les organisateurs de salons et d'évènements en tous genres, et les constructeurs de bâtiments industriels.
Elle développe enfin de nouveaux produits en permanence avec 50 salariés en R&D, et a plusieurs gammes qui lui permettent de bien se différencier et de bien adresser ses niches de marchés : Précontraint pour les toiles tendues pour grandes infrastructures, Soltis, pour les écrans de protection solaire, Batyline AW pour les solutions acoustiques, Stamisol pour les écrans d'étanchéité, et ainsi de suite.

Une bonne maîtrise de la technique en principe

La société produit en partie avec sa propre technologie, laquelle permet de fabriquer en très grandes largeurs éventuellement. La production est très intégrée avec la fabrication du micro-câble en PET (en Suisse), puis son tissage (en France), la fabrication de polymères d'enduction et enfin l'enduction de l'armature tissée (en France et en Suisse) pour arriver au produit final. Serge Ferrari produit aussi avec d'autres technologies (Stamskin, Stamisol, SK, et verre-PFTE) dans ses autres usines en Suisse et en Allemagne, et utilise aussi l'extrusion, un procédé classique pour fabriquer des matériaux souples, utilisés notamment dans le mobilier, dans son usine française et dans son usine italienne. La société a aussi développé une technologie de recyclage des matériaux composites (chutes de fabrication ou matériaux récupérés en fin de vie) : Texyloop, qui produit des matières premières de bonne qualité a priori.

Des agrandissements de périmètre au besoin : nouvelles technologies et nouveau marchés

La société a fait deux acquisitions en 2020 qui ont élargi son offre en apportant la maîtrise d'un nouveau matériau : le verre-PFTE (alias Teflon pour les produits grand public), avec FIT, petite société (8 millions d'euros de chiffre d'affaires) basée à Taïwan, et aussi et surtout Verseidag-Indutex GmbH, société allemande basée à Krefeld (57 millions d'euros de chiffre d'affaires), qui fabriquent toutes deux des membranes incombustibles. Elle vient aussi de prendre au premier semestre 2022 des participations majoritaires dans trois petites sociétés : son distributeur en Lituanie, ainsi que deux sociétés hollandaises : MSE, et DCS, des concepteurs installateurs de membranes pour centrales de biogaz, qui renforcent l'activité qu'a déjà Serge Ferrari en Allemagne dans ce domaine, et donne a priori une part sérieuse de ce nouveau marché, de plus en plus porteur en Europe.

Des chiffres plutôt agréables à regarder : croissance, rentabilité…

Contrôlée à près de 75% par sa famille fondatrice, qui est toujours aux commandes (au Conseil de Surveillance), la société produit année après année de bons résultats. A commencer par un chiffre d'affaires en croissance organique régulière, améliorée par les acquisitions (et très notamment Verseidag-Indutex en 2021, année où l'activité a progressé de +46%), avec encore une belle progression au 1er semestre 2022, soit +17%. Laquelle doit avant tout, il faut le dire, aux hausses de prix que la société a réussi à passer auprès de ses clients pour répercuter les fortes hausses de coûts matières, de coûts d'énergie, et de coûts de transport du moment. Pour des volumes stables, mais avec une demande bien orientée cependant, notamment dans l'architecture tendue, et les structures modulaires pour l'évènementiel, deux activités qui ont bien redémarré en 2022.

Serge Ferrari dégage aussi une rentabilité plutôt solide, puisque la marge opérationnelle est passée de 4% en 2019 à 3,4% en 2020, soit une belle résistance dans cette année un peu épouvantable pour tout le monde, pour rebondir à 6,7% en 2021, et se tenir au 1er semestre 2022 à peu près au même niveau qu'au 1er semestre 2021, avec une base de coûts fixes sous contrôle a priori, avec l'aide de rationalisations industrielles, et des capacités mieux utilisées aussi.

… et bon bilan

On peut par ailleurs constater que la société présent des finances de bonne qualité, avec à son bilan un ratio Dette Financière Nette/Fonds Propres de 23% à fin décembre (et, pour les fins connaisseurs, un levier Dette Nette/Ebitda de seulement 0,7x). Ratio qui s'est toutefois un peu dégradé au 30 juin tout en restant dans les limites du raisonnable, soit 42%, principalement pour cause de plus de stocks à financer. Des stocks qui sont toutefois au plus haut de l'année, la saisonnalité de l'activité étant ce qu'elle est, et valent aussi plus cher avec la hausse générale des prix des matières premières, un phénomène que tout le monde connaît.

Comme on peut s'en douter, ces bonnes finances tiennent beaucoup au fait que Serge Ferrari, en bon industriel qu'il est, génère du cash bon an mal an (sauf en cas de grande acquisition comme en 2021). Ce que montre en tout cas un calcul élémentaire de free cash-flow (pour la théorie, cf plus haut). Et Serge Ferrari devrait encore en générer en 2022, même si les investissements sont plus élevés cette année pour améliorer le système d'information et digitaliser notamment, transférer des activités d'un site à l'autre, voire créer des capacités nouvelles.

Toujours des opportunités de croissance

Enfin, si l'activité est plutôt bonne en ce moment, de nouveaux marchés s'ouvrent aussi, avec toujours de nouvelles applications des membranes : protections solaires des véhicules, anti chaleur pour les bâtiments, retenues d'eau et aquaculture, toiture de stockage de biogaz etc…

"Sky is the limit" en quelques sortes, et ce n'est pas pour rien que la société crée un Innovation Center cette année. Et ce n'est pas pour rien non plus que le cours de l'action se tient plutôt bien, soit -5% depuis le début de l'année, à comparer à un indice Cac Mid & Small à -16% environ au jour d'aujourd'hui.

Les fondamentaux, il n'y a que ça de vrai. C'est un fait.

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1 commentaire

  • 06 janvier 17:05

    Réaction cash:en quelque sorte est une locution adverbiale invariable, qui ne se met donc pas au pluriel, même en franglais.


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