La volatilité des marchés a récemment diminué, mais cela risque de n'être qu'un phénomène temporaire, estime le stratégiste Daniel Morris (BNP Paribas IP).
Malgré leur récent retour au calme, les marchés resteront volatils jusqu'à la fin de l'année, affirme Daniel Morris, Stratégiste Investissement chez BNP Paribas Investment Partners. Les sujets de tensions restent en effet nombreux sur les marchés, malgré l'absence de véritable crise.
Rebond du pétrole, banques centrales accommodantes, amélioration des indicateurs conjoncturels américains : il n'en faut pas plus aux marchés pour voir la vie en vert depuis environ un mois. Le Dow Jones est même parvenu, jeudi 17 mars, à effacer la totalité de ses lourdes pertes depuis le début de l'année.
Pourtant, les marchés ne sont pas à l'abri de réactions épidermiques, y compris lors de nouvelles annonces accommodantes de la part des banques centrales, comme cela s'est vu le 10 mars dernier avec la BCE. Et pour cause : « Les banques centrales restent bien sûr puissantes et peuvent encore en faire plus si nécessaire, mais il est de moins en moins certain qu'elles aient les bons leviers pour répondre aux problèmes actuels, qui ne sont pas forcément des problèmes liés au niveau des taux d'intérêts », commente Daniel Morris, Stratégiste Investissement chez BNP Paribas IP.
Le stratégiste détaille : « J'ai des doutes sur l'utilité du "TLTRO II" qui a été annoncé par la BCE la semaine dernière. Ce plan vise à encourager les banques à prêter davantage aux entreprises pour financer l'économie. Cette mesure serait bonne si l'économie avait des projets à financer et que les banques étaient réticentes à accorder des prêts, or ce n'est pas le cas ».
Y a-t-il vraiment une crise à régler en zone euro ?
La BCE se démène en effet pour essayer de relancer l'économie européenne, mais pour le stratégiste de BNP Paribas IP, rien ne prouve que la zone euro ait vraiment besoin d'un stimulus supplémentaire.
« La croissance en zone euro l'année dernière était de 1,6%. Certes, ce n'est pas exceptionnel, mais on reste loin d'un risque de récession. Il y a donc de quoi se demander si les économies européennes ont vraiment encore besoin d'une accélération de la relance » soulève-t-il, sans compter que le potentiel de croissance, dans une économie aussi mature que l'économie européenne, semble désormais limité.
Ce qui gêne la BCE est bien sûr la faible inflation en zone euro et le risque que le Vieux continent connaisse un parcours économique semblable à celui du Japon. Un tel scénario « est possible », reconnaît Daniel Morris, pour qui cette perspective n'est pourtant pas alarmante. « Au Japon, on attend une croissance 1% en 2016. Est-ce une crise pour autant ? Pas forcément, car le Japon est un pays riche, comme la plupart des pays européens, où l'épargne des ménages est globalement élevée. Une croissance économique élevée n'est donc pas une nécessité pour que l'économie fonctionne correctement ».
Une chose est sûre : les récents discours des banquiers centraux ont eu une influence notable sur le marché des changes, en renforçant l'euro et en affaiblissant le dollar. « Les récentes annonces des banques centrales ont en effet engendré une baisse du dollar plus importante qu'on pouvait le penser », observe Daniel Morris. « Certes, cela a pénalisé les marchés européens, mais à l'inverse cela pousse les cours du baril à la hausse », les prix de l'or noir étant libellés en dollars. Or, la remontée des prix du pétrole à un niveau plus « normal » est un sujet d'accalmie générale sur les marchés financiers, dissipant les angoisses liées aux risques de faillite des entreprises de ce secteur.
Stratégie 2016 : acheter les creux et vendre les rebonds dans un canal horizontal
Malgré cette récente accalmie, les risques n'ont pas disparu sur les marchés. « L'indice VIX [qui mesure la volatilité des marchés] est fortement retombé au cours des dernières semaines après avoir connu un pic en début d'année. Il me semble que cet indice est désormais retombé trop bas. Il faut s'attendre à ce qu'il remonte. On sait que l'année 2016 sera de toute manière volatile », affirme Daniel Morris.
« Pour nous, cette volatilité devrait se traduire par un mouvement d'aller-retour des marchés tout en suivant une tendance globalement neutre au cours de l'année », donc sans tendance fondamentalement haussière ou baissière, explique le stratégiste. Dans ce contexte, « les meilleures performances seront réalisées par les investisseurs actifs qui accepteront une certaine prise de risque en achetant dans les creux lorsque "tout va mal", et en revendant une partie de leurs positions lors des phases de rebond », explique-t-il.
Prévoir les microcycles boursiers n'étant évidemment pas une tâche aisée, le stratégiste privilégie par ailleurs certains secteurs d'investissement qui pourraient mieux résister à d'éventuels vents contraires. « Le secteur technologique, notamment aux Etats-Unis, ainsi que ceux de la consommation cyclique et non-cyclique, font partie des secteurs que nous privilégions » explique-t-il.
Le secteur de l'énergie reste quant à lui « un secteur très volatil, où seuls peuvent se risquer des investisseurs pouvant accepter des prises de risques élevées ». Par ailleurs, « il y a un point d'interrogation sur le secteur de la santé » mentionne-t-il, le secteur étant toujours dans la ligne de mire des discours politiques suite aux déclarations d'Hillary Clinton à l'automne dernier relatives aux profits jugés excessifs des entreprises pharmaceutiques.
À propos des élections américaines, les résultats de cet événement qui animera l'actualité politique jusqu'à la fin de l'année ne devraient pas avoir d'impact significatif global sur les cours de bourse, estime Daniel Morris, qui rappelle que le pouvoir politique a dans tous les cas peu d'emprise sur la dynamique économique américaine dans son ensemble.
Relire à ce sujet : Les élections américaines influent-elles sur les cours de Bourse ?
Xavier Bargue (redaction@boursorama.fr)
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