* Le bilan de l'explosion du port est d'au moins 145 morts
* Emmanuel Macron est arrivé à Beyrouth
* La capacité financière de l'Etat libanais "très limitée", dit un ministre
(Actualisé avec déclarations de Macron, détails sur la colère d'une partie de la population § 6-7-8-14)
par Samia Nakhoul et Ellen Francis
BEYROUTH, 6 août (Reuters) - Alors que les recherches d'éventuels survivants de la gigantesque explosion de mardi dans le port de Beyrouth se poursuivent jeudi, le Liban compte sur l'aide internationale pour faire face aux conséquences de la catastrophe, venue fragiliser un pays déjà confronté à une grave crise économique.
Le président français, Emmanuel Macron, est arrivé en fin de matinée à Beyrouth pour la première visite d'un dirigeant étranger depuis l'explosion qui a fait au moins 145 morts et 5.000 blessés selon le dernier bilan disponible.
"Le Liban n'est pas seul", a-t-il tweeté alors que l'avion présidentiel venait de se poser.
Puis, dans une allocution, après s'être entretenu brièvement avec le président libanais Michel Aoun, il a renouvelé son message de soutien et d'amitié mais a aussi appelé à des réformes, notamment sur l'énergie, les marchés publics et la lutte contre la corruption.
"Si ces réformes ne sont pas faites, le Liban continuera de s'enfoncer", a-t-il dit, souhaitant avoir un nécessaire "dialogue de vérité" avec la classe politique libanaise.
Engageant par la suite un dialogue avec des Libanais, il leur a garanti que l'aide internationale ne finirait pas "dans les mains de la corruption".
"Je veux que vous ayez un droit de regard sur cette aide", a-t-il poursuivi, selon les journalistes suivant son déplacement.
Disant sa volonté de proposer un "nouveau pacte politique" à la classe dirigeante, il a ajouté: "S'ils ne savent pas les tenir, je prendrai mes responsabilités."
DEUIL NATIONAL
Des dizaines de personnes sont encore portées disparues dans la ville où quelque 250.000 habitants n'ont plus de logement, l'explosion ayant dévasté des milliers d'immeubles à des kilomètres à la ronde.
Ce jeudi est la première des trois journées de deuil national décrétées par le Premier ministre, Hassan Diab, en mémoire des victimes du désastre.
Les autorités ont très vite mis en cause les 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium stockées dans un hangar du port depuis plusieurs années dans des conditions de sécurité très précaires. Plusieurs responsables du port ont été arrêtés, a-t-on appris de sources gouvernementales.
Mais les Libanais de la rue continuent d'incriminer l'élite politique du pays, accusée d'avoir fermé les yeux pendant des décennies tout en bénéficiant de la corruption et des carences de l'Etat.
Emmanuel Macron a du reste pu mesurer l'hostilité d'une large partie de la population libanaise envers sa classe politique. Alors qu'il poursuivait sa visite dans la rue Gouraud, des Beyrouthins lui ont demandé de les libérer des "autorités actuelles" tandis que d'autres dénonçaient Michel Aoun et le Hezbollah ou scandaient le mot "Révolution".
Une source au sein des services de sécurité a déclaré que l'incendie qui avait provoqué l'explosion était dû à des travaux de soudure. Des médias libanais ont rapporté la présence de drones ou d'avions dans la zone du port peu avant l'explosion et certains habitants ont dit avoir vu passer des missiles mais les autorités ont démenti la thèse de l'attentat.
Aux Etats-Unis, le chef de cabinet de la Maison blanche, Mark Meadows, a déclaré que cette hypothèse n'était pas exclue et que la collecte d'information sur le sujet se poursuivait.
LA BANQUE MONDIALE PRÊTE À COORDONNER L'AIDE ÉTRANGÈRE
A Beyrouth, des responsables des services de santé ont déclaré que plusieurs hôpitaux étaient à court de lits et de matériels pour accueillir et soigner les blessés.
Le gouverneur de la ville, Marwan Aboud, a déclaré à la chaîne de télévision Al Hadath que le coût de la catastrophe pourrait atteindre 15 milliards de dollars (12,7 milliards d'euros) en incluant les pertes des entreprises locales.
L'activité du port de la capitale, principal point d'entrée d'un pays de six millions d'habitants très dépendant des importations, est totalement paralysée, obligeant les cargos à se détourner vers d'autres terminaux plus petits.
Au-delà du risque immédiat de pénuries alimentaires, le Liban compte avant tout sur l'aide extérieure pour se reconstruire.
Les capacités de financement de l'Etat, de la banque centrale et des banques privées sont "très limitées", a ainsi averti jeudi le ministre de l'Economie, Raoul Nehme.
"Nous ne nageons pas dans les dollars", a-t-il dit à la chaîne de télévision Sky News Arabia, ajoutant que de nombreux pays avaient proposé leur aide, à hauteur de plusieurs milliards de dollars.
La Banque mondiale a déclaré mercredi qu'elle allait mobiliser les partenaires du Liban pour rassembler des financements publics et privés pour la reconstruction et la relance de l'économie.
Mais on ignore pour l'instant quel impact cette aide pourrait avoir sur les négociations difficiles en cours entre Beyrouth et le Fonds monétaire international (FMI), appelé à l'aide par le Liban en mai face à la dégradation de la situation financière et à la chute de la livre.
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(avec Michel Rose à Paris version française Marc Angrand et Henri-Pierre André, édité par Myriam Rivet)
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