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L'opposition turque inflige un camouflet à Erdogan à Istanbul
information fournie par Reuters 24/06/2019 à 11:51

 (Résultats officialisés, et Conseil de l'Europe)
    par Humeyra Pamuk et Jonathan Spicer
    ISTANBUL, 24 juin (Reuters) - L'opposition a infligé
dimanche un cinglant camouflet au président turc en remportant
une nouvelle fois, mais avec une marge plus grande, la mairie
d'Istanbul, détruisant son aura d'invincibilité et portant la
voix des électeurs mécontents de sa politique.
    Ekrem Imamoglu, candidat du Parti républicain du peuple
(CHP, laïque), a obtenu la victoire avec 54,21% des suffrages,
au vu des résultats officiels annoncés lundi par le Conseil
électoral suprême. Cela représente une avance nettement plus
conséquente que lors de la précédente victoire, le 31 mars
dernier, qui avait été annulée à la demande du parti AKP (au
pouvoir) pour irrégularités présumées.
    L'ancien Premier ministre Binali Yildirim, candidat du Parti
de la Justice et du développement (AKP), mouvement
islamo-conservateur d'Erdogan qui tenait la ville depuis 25 ans,
avait promptement reconnu, dimanche soir, la victoire de son
adversaire, qui l'a emporté avec près de 800.000 voix d'avance.
    Des dizaines de milliers de partisans d'Imamoglu ont fêté la
victoire d'Imamoglu, ancien homme d'affaires, dimanche soir dans
les rues d'Istanbul.
    "Seize millions de Stambouliotes ont restauré aujourd'hui
notre confiance en la démocratie et la justice", s'est félicité
Ekrem Imamoglu.    
    "Merci Istanbul!", a lancé le candidat du CHP à ses
partisans. "Nous allons bâtir la démocratie dans notre ville,
nous allons édifier la justice. Dans cette ville magnifique, je
le promets, nous construirons l'avenir!", a-t-il ajouté.
    Le président Erdogan a félicité Imamoglu pour sa victoire,
et Binali Yildirim lui a souhaité bonne chance comme maire moins
de deux heures après la clôture des bureaux de vote.
    
    VERS UN REMANIEMENT MINISTÉRIEL ?
    "Les habitants d'Istanbul ont élu un nouveau maire dans le
cadre d'un scrutin bien organisé et transparent, même si cela
s'est fait dans des circonstances tendues", a estimé le chef
d'une délégation du Conseil de l'Europe, Andrew Dawson.
    Ekrem Imamoglu s'était imposé avec seulement 13.000 voix
d'avance le 31 mars, ce que l'AKP avait contesté en faisant état
d'irrégularités. A sa demande, la commission électorale avait
ordonné la tenue d'un nouveau scrutin, suscitant l'inquiétude
des alliés occidentaux de la Turquie et de l'opposition turque.
    La victoire du CHP dimanche est une défaite cinglante pour
Erdogan, qui a été lui-même maire d'Istanbul dans les années
1990 et qui a souvent répété cette antienne: "Qui gagne Istanbul
gagne la Turquie". 
    Le camouflet est d'autant plus sérieux qu'Imamoglu,
incarnation de l'héritage d'Atatürk et de la laïcité, a réalisé
de bons scores dans des quartiers traditionnellement religieux
de la ville, qui passaient jusqu'à présent pour des bastions de
l'AKP.
    "Cette nouvelle élection a mis un coup d'arrêt à la
dictature", se réjouissait une femme au foyer de 48 ans, Gulçan
Demirkaya, qui vit dans un quartier pro-AKP, Kagithane. "Si Dieu
le veut, il (Imamoglu) pourrait bien être président dans cinq
ans. Il faut en finir avec le règne d'un seul homme!"
    De nombreux observateurs s'attendent à un remaniement
ministériel à Ankara ainsi qu'à des ajustements diplomatiques.
    La Turquie, qui est membre de l'Otan, s'est rapprochée de la
Russie, à laquelle elle a passé commande d'un système de défense
antimissiles, ce qui lui a valu des menaces de sanctions de la
part des États-Unis.
    
    LÉGISLATIVES ANTICIPÉES ?
    "Cela va véritablement avoir un impact sur la politique
turque à l'avenir, étant donné l'ampleur de la victoire. C'est
un signal d'alarme pour l'establishment de l'AKP", analyse Sinan
Ulgen, ancien diplomate turc et chercheur invité à Carnegie
Europe, à Bruxelles.
    La déconvenue d'Erdogan, qui s'était beaucoup impliqué dans
campagne pour la mairie d'Istanbul, pourrait également entraîner
des législatives anticipées. Le scrutin est pour le moment prévu
pour 2023.
    "La Turquie doit reprendre une vie normale, le processus
électoral doit prendre fin", a estimé pour sa part le chef du
parti nationaliste MHP, Devlet Bahceli. "Parler de législatives
anticipées serait la pire des choses que l'on pourrait infliger
à notre pays", a-t-il jugé.
    La livre turque  TRYTOM=D3  avait chuté après l'annulation
du scrutin du 31 mars, et a reculé de 8% depuis le début de
l'année, en partie du fait des remous électoraux. Après la
victoire d'Imamoglu dimanche soir, la devise turque s'est
raffermie.
    Mardi dernier, le président avait accusé Imamoglu
d'entretenir des liens avec Fethullah Gülen, le théologien
réfugié aux Etats-Unis et auquel Ankara impute le coup d'Etat
manqué de juillet 2015.
    Pour éviter une nouvelle défaite face au CHP, Recep Tayyip
Erdogan s'était fait plus conciliant à l'égard des Kurdes, qui
représentent environ 15% de l'électorat à Istanbul.
    En mars, les électeurs du Parti démocratique des peuples
(HDP), mouvement prokurde, avaient plutôt voté pour Imamoglu et
les plus conservateurs s'étaient abstenus.
    Les deux codirigeants du HDP, Pervin Buldan et Sezai
Temelli, ont accusé un Erdogan "désespéré" de chercher à semer
la discorde entre le parti et Öcalan.

 (Avec Daren Butler, Ece Toksabay, Eylul Aytan et Tuvan
Gumrukcu; Jean-Philippe Lefief et Eric Faye pour le service
français)
 

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