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Jean-François Mouney : " Les mois à venir seront passionnants pour Genfit"
information fournie par Boursorama12/10/2018 à 08:00

Jean-François Mouney, le PDG de la biotech lilloise revient sur les défis qui attendent encore Genfit et sur le récent parcours chahuté de l'action. (crédit : Genfit)

Jean-François Mouney, le PDG de la biotech lilloise revient sur les défis qui attendent encore Genfit et sur le récent parcours chahuté de l'action. (crédit : Genfit)

Vente à découvert, course avec Intercept, potentiel de la Nash : dans un entretien exclusif de mise au point, le PDG de la biotech lilloise revient sur les défis qui attendent encore Genfit et sur le récent parcours chahuté de l'action.

Sur les trois derniers mois, le titre Genfit a perdu près de 25%. Dans le même temps, l'action Intercept a grimpé de 17% et de 50% sur six mois. Est-ce que le marché a, selon vous, déjà joué la victoire de votre concurrent ou est-ce que ce repli est à mettre sur le compte de l'action spéculative de plusieurs fonds, dont BlackRock qui a récemment renforcé sa position nette de vente à découvert sur le titre ?

Clairement : ni l'un, ni l'autre.

Sur le premier des deux points, la question est de savoir si l'évolution dans un sens, ou dans un  autre d'ailleurs, du cours de l'action Genfit peut avoir pour origine des déclarations à la hausse ou à la baisse de positions comme celles que vous citez. Nous ne le pensons pas et dans les faits, si on observe la période récente, il est difficile de constater une telle corrélation. En prenant un peu de recul sur les mois passés en effet, vous avez pu constater que le cours de l'action Genfit a été plutôt stable entre 23 et 25 € entre le début du mois d'avril et la sortie de nos résultats semestriels. Or, le total des positions courtes nettes estimées début avril sur le titre de Genfit était de l'ordre de 3% de son capital. Il a même approché un temps les 7% au début du mois de mai pour redescendre à environ 3% au milieu du mois de septembre  sans que ces variations aient eu un impact majeur sur le cours de l'action. Aujourd'hui, ce total est de moins de 4%.

En réalité, nous pensons que les positions courtes fluctuent plus au gré de l'évolution des marchés et de leurs appétits plus ou moins fort pour le risque selon le contexte macro-économique, que sur la base de nos fondamentaux, et dans l'ensemble, force est de constater que le contexte général boursier actuel n'est pas florissant. Dés lors, des positions de ce type ne sont pas inhabituelles dans le capital des sociétés dont le marché du titre est très liquide et/ou volatile. Or vous savez que c'est une caractéristique, par essence, de beaucoup de titres de sociétés de biotechnologies car les cours peuvent varier beaucoup, notamment en fonction des résultats des essais cliniques. Genfit ne fait pas exception mais n'est pas non plus une exception parmi ses pairs. Ainsi, parmi les sociétés qui sont citées fréquemment parmi les pairs de Genfit au niveau international, prenez Intercept que vous citez, ou encore Madrigal : le total des positions courtes d'Intercept représentait 12,4% de son capital à la mi-septembre. Celui de madrigal représentait 7,5% de son capital à la même date ; soit bien plus que les positions courtes nettes estimées sur le titre Genfit. Et, comme vous l'avez remarqué, les cours de ces sociétés ont plutôt bien évolué ces 6 derniers mois.

Concernant Intercept, il n'est bien évidemment pas question d'une quelconque prime anticipée au vainqueur. Nous assistons plus vraisemblablement à une phase spéculative tout à fait classique à l'approche de la publication de leurs résultats de Phase III, attendus en principe au cours du 1 er semestre 2019. N'oublions pas non plus que l'action d'Intercept a touché ses plus bas entre 50 et 60 $ durant le dernier trimestre de l'année dernière, après avoir valu entre 100 et 120 $ tout au long de l'année 2017 et après son black box warning infligé par la FDA sur Ocaliva dans la PBC il y a environ 1 an. Depuis, le cours a repris des couleurs à un peu plus de 100 $ au gré des ventes d'Ocaliva dans la PBC puisque ce médicament, malgré les défauts que lui trouve la FDA, est le seul  sur ce marché dans la population des patients sans solution thérapeutique. Mais cela ne va sans doute pas durer éternellement et le challenge des résultats de phase III dans la NASH se profile Alors pourquoi Ocaliva est loin de faire figure de favori  dans cette indication ? Tout simplement parce que les risques associés à cette molécule sont encore moins anodins dans la NASH que dans la PBC. L'augmentation du LDL associée à une diminution du HDL risque de poser un problème très sérieux, puisque les patients NASH sont par nature surexposés au risque d'accident cardiovasculaire. Ensuite, beaucoup pensent que dans le cadre d'une maladie chronique et silencieuse comme la NASH, l'apparition de prurit liée à la prise de ce médicament ne pourra que se traduire par une faible observance, et donc une efficacité moindre. Cela risque de ne pas échapper pas aux agences réglementaires, et encore moins aux payeurs.

Aujourd'hui, il y a près de 25 essais cliniques en phase II dans la NASH. Est-ce que le fait d'entrer en premier sur ce marché peut faire la différence ? Le potentiel commercial de votre médicament ne risque-t-il pas d'être sévèrement amputé si d'ici deux à trois ans une myriade de nouveaux traitements sont mis sur le marché ?

Le ou les premiers sur le marché seront indubitablement en position de force.

En matière de « time-to-market », elafibranor figure dans un trio de tête qui constitue une « première vague » de produits, aux côtés d'Ocaliva (Intercept) et de selonsertib (Gilead), avec des données de phase III qui seront à priori toutes publiées en 2019, à quelques mois d'intervalle.

Si les molécules de Madrigal, Galmed ou encore Viking ont récemment suscité une vague d'intérêt, elles restent cependant à un stade précoce de développement, avec des essais de phase II dont les résultats, critères d'évaluations, ou encore populations étudiées peuvent être discutés au regard de ce qu'imposent les autorités règlementaires pour les essais de phase III.

Quand bien même ces sociétés bénéficieraient de procédures d'approbation accélérées au même titre que les produits du trio de tête - ce qui n'est pas acquis puisque des solutions thérapeutiques prétendent à entrer assez prochainement sur le marché, leurs résultats de phase III ne seraient de toutes façons pas disponibles avant quelques années. Entretemps, elafibranor devrait être bien connu des prescripteurs et bénéficier d'un capital confiance indéniable, ce qui constitue un avantage commercial indiscutable, confirmé par les modèles d'accès au marché que tous les acteurs et observateurs du secteur du Médicament connaissent bien.

Rappelons enfin qu'au-delà de cette perspective purement calendaire, c'est bien sûr aussi le profil d'une molécule qui détermine son potentiel commercial. Or à ce stade, elafibranor présente de solides atouts pour devenir le traitement de première intention en monothérapie, et se positionner comme le traitement incontournable dans les futures combinaisons de produits, à l'image de la metformine dans le diabète.

La NASH était quasi absente des débats il y a encore quelques années. Elle est aujourd'hui présentée comme un enjeu de santé majeur, de nombreux candidats-médicaments sont à l'étude, des budgets importants ont été débloqués par les big pharmas. Certains pointent même un enjeu de santé un peu monté en épingle par les grands laboratoires. Dit autrement, n'y a-t-il pas un risque de bulle sur la NASH ?

Soyons sérieux. On ne peut pas parler de « bulle » lorsque des études épidémiologiques internationales indépendantes, conduites sur des populations représentatives, présentent des chiffres aussi récents qu'inquiétants. Ces données sont connues des autorités de santé publique et des payeurs. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la FDA et l'EMA ont toutes les deux accordé aux premières molécules en développement dans la NASH la possibilité de bénéficier d'une procédure d'approbation accélérée : c'est bien la preuve qu'il y a une véritable urgence médicale pour des millions de patients laissés sans solution thérapeutique. Les associations de patients s'inquiètent elles aussi, et se mobilisent avec d'autres acteurs pour tenter d'apporter un réel soutien, au travers de campagnes d'information par exemple. Ce déploiement d'énergie reflète le besoin urgent de mettre à disposition des patients et des médecins des traitements efficaces pour faire face à cette maladie. Alors dire que cette maladie n'existe pas, c'est non seulement ignorer ces millions de patients, mais c'est aussi un peu les mépriser…

Genfit a indiqué que si les résultats de phase III étaient concluants pour elafibranor, il pourrait bénéficier d'une autorisation de mise sur le marché conditionnelle dès 2020 aux Etats-Unis. Avez-vous un peu plus de précision à fournir ? Quelles sont justement les paramètres que la FDA évalue pour émettre cette autorisation de mise sur le marché conditionnelle. Est-elle quasiment acquise en cas de succès de la première partie de l'essai de phase III ?

Elafibranor bénéficie du processus d'approbation accéléré dit Subpart H aux États-Unis et dit Conditional Approval en Europe. Il est donc acquis, grâce à ce statut, que de bons résultats intermédiaires de phase III, qui devraient être disponibles dés la fin de l'année prochaine, pourraient déboucher sur une autorisation de mise sur le marché conditionnelle. Il ne faudra donc pas attendre la totalité des résultats de phase III pour que le médicament bénéficie d'une autorisation de mise sur le marché et il est effectivement très probable que les discussions en vue de ces autorisations s'inscrivent dans un calendrier optimisé si ces résultats sont bons, surtout dans un contexte où les solutions thérapeutiques manquent cruellement.

Jusqu'ici, elafibranor est aujourd'hui le seul composé dont les données de phase IIb ont été publiées dans un grand journal scientifique, et faisant la démonstration d'un potentiel pour agir efficacement à la fois sur les tissus hépatiques, sur l'amélioration du profil lipidique (LDL, HDL, triglycérides), sur l'amélioration du profil métabolique (HbA1c, résistance à l'insuline), tout en préservant le patient d'effets secondaires grâce à une bonne sécurité d'emploi et une bonne tolérabilité. Il ne fait aucun doute que ce bon ratio efficacité/sécurité d'emploi, s'il est confirmé avec les résultats intermédiaires de phase III, facilitera les discussions avec les autorités réglementaires.

L'autre cheval de bataille de Genfit porte sur le test diagnostic de la NASH, avec notamment cette promesse : avoir un test sanguin qui permet d'éviter la biopsie. Est-il crédible d'espérer un duo médicament plus test sans biopsie en 2020 de la part de Genfit ?

Soyons prudents avec ce terme de « duo », qui peut prêter à confusion. Le kit diagnostic sur lequel nous travaillons n'est pas lié uniquement à elafibranor. Notre objectif, bien plus large et enthousiasmant, est de parvenir à identifier tous les patients éligibles à un traitement de la NASH. Mais là où vous avez raison, c'est au sujet de la biopsie : ce test apportera effectivement une vraie valeur ajoutée puisqu'il s'appuiera sur une simple prise de sang. Il sera donc facile d'accès et non-invasif, ce qui permettra de contourner les contraintes inhérentes à la biopsie. Notez que le marché du diagnostic sanguin dans la NASH est estimé en lui-même entre 500 millions et un milliard de dollars annuels. Il devrait en outre apporter un effet de levier considérable sur la diffusion des traitements NASH qui seront sur le marché, dont elafibranor.

Les mois qui viennent seront particulièrement intéressants en matière de newsflow puisque nous devrions progresser sur au moins trois dimensions. Le premier chantier très important est de pouvoir publier dans les meilleurs délais les détails de nos travaux dans une revue scientifique de renom, ce qui renforcera la visibilité de notre solution. Nous travaillons également activement à identifier l'acteur industriel spécialisé dans le diagnostic avec lequel nous choisirons de donner une impulsion décisive au programme. Enfin, une première étape réglementaire cruciale devrait être franchie dés 2019. Sur la base de ce planning,  cet outil de diagnostic sera effectivement mis à la disposition des professionnels de santé à l'horizon 2020/2021, c'est-à-dire lorsqu'elafibranor arrivera sur le marché.

Au-delà de l'Elafibranor, pouvez-vous faire un point rapide, à date, sur l'avancée des autres programmes de Genfit. Les investisseurs ont-ils des rendez-vous proches à mettre sur leur agenda ?

Le prochain rendez-vous à noter est bien évidemment la publication, imminente, des résultats PBC, d'ici la fin de l'année 2018. Pour rappel, la PBC est une maladie auto-immune rare, avec très peu d'options thérapeutiques aujourd'hui disponibles, et par ailleurs imparfaites, laissant ainsi la place à d'autres médicaments. Le rationnel d'elafibranor dans la PBC est fort puisque la molécule a démontré, dans toutes les populations sur lesquelles elle a été testée jusqu'ici, sa capacité à réduire l'alcaline phosphatase (ALP), qui est le critère d'évaluation des essais cliniques dans la PBC. La littérature scientifique indique par ailleurs que les PPAR alpha ont un effet bénéfique pour les patients PBC puisqu'ils peuvent réduire l'ALP, voire améliorer le prurit. Rappelons que le prurit est avec la fatigue le symptôme le plus gênant dans cette pathologie. Quant aux PPAR delta, ils ont eux aussi démontré leur potentiel de réduction de l'ALP sur les populations PBC. Elafibranor étant un PPAR alpha et delta, vous comprenez l'intérêt de tester cette molécule dans cette indication.

Nous devrions également bientôt être en mesure de recruter le premier patient dans la NASH pédiatrique. Parmi les molécules actuellement en phase III en effet, seul elafibranor sera testée chez les enfants et adolescents, ce qui n'est pas surprenant au regard des qualités mises en évidence lors de la phase II.

Enfin, le composé nitazoxanide, sera testé dans la fibrose dans le cadre d'un nouvel essai clinique de phase II. Celui-ci devrait démarrer sous peu. Nous croyons beaucoup en effet au potentiel synergique de son association avec elafibranor dans une approche de combinaison thérapeutique, mais également à son potentiel anti-fibrotique en monothérapie.

Bref, les mois à venir seront passionnants et riches en nouvelles avancées. Elles devraient renforcer le socle sur la base duquel nous continuerons à déployer une stratégie réaliste entre partenariats et création de valeur.

Propos recueillis par Laurent Grassin (redaction@boursorama.fr)

Laurent Grassin
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3 commentaires

  • 15 octobre08:40

    Pas près de les lâcher mes titres genfit...J'irai au bout quoiqu'il advienne !


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