L'accord avec AstraZeneca change le profil de la société Innate. (crédit : Innate)
Les échecs cliniques successifs enregistrés en 2017 avec lirilumab, son produit historique, dans différents cancers, avaient compromis l'avenir de ce produit et du partenariat noué en 2009 avec le géant américain Bristol Myers Squibb. Depuis, la biotech marseillaise nageait dans la déprime boursière. L'accord annoncé mardi avec la big pharma britannique AstraZeneca relance radicalement l'histoire d' Innate Pharma .
Deux jours après la présentation, lors du congrès médical de l'ESMO, de résultats cliniques prometteurs (phase II, cancer de la tête et du du cou) obtenus avec Monalizumab, le second médicament phare d'Innate, AstraZeneca a décidé d'exercer l'option qu'il détenait depuis 2015 sur cet anticorps monoclonal et d'en acquérir la totalité des droits mondiaux. Innate percevra en échange 100M$ de paiement immédiat («upfront»), auxquels s'ajoutent 845M$ de paiements d'étapes complémentaires («milestones»). AstraZeneca s'offre également – pour 50M$ d'upfront et 835M$ de milestones - la licence d'IPH 5201, un anticorps anti-CD39, qui pourrait entrer en clinique d'ici un an. Enfin, pour 20M$ de plus, la big pharma prend des options de licence sur quatre actifs encore en phase préclinique de développement. Cette extension du partenariat entre les deux sociétés était espérée par les investisseurs. Mais elle s'avère plus précoce et plus généreuse qu'attendu.
En outre, cet accord se double d'une entrée d'AstraZeneca au capital d'Innate, à hauteur de 9,8%, par émission d'actions nouvelles, et au prix de 10€ par action, soit un investissement de 63M€. Cette opération renforce un peu plus l'autonomie financière de la société, envoie aux investisseurs un signal fort quant à la sous-valorisation persistante de l'action et confère enfin au dossier un intérêt spéculatif.
Une transaction à double sens
Cette transaction n'est pas à sens unique. En effet, Innate fait, en parallèle, l'acquisition d'un produit d'AstraZeneca, Lumoxicity, moyennant 50M$ d'«upfront» et 25M€ de «milestones»… reversés au britannique. Destiné au traitement de la leucémie à tricholeucocytes en 3e ligne (situation de récidive après deux protocoles de traitement standard), Luxomiti a été approuvé par les autorités sanitaires américaines (FDA) en septembre dernier, et est prêt à être lancé. Avec quelques centaines de patients éligibles chaque année au traitement, Innate peut espérer, selon les analystes, générer jusqu'à 50M$ de chiffres d'affaires annuel. Mais le produit devrait également être approuvé en Europe d'ici deux ans (soit jusqu'à 35M€ de revenus supplémentaires par an, selon les analystes).
Enfin, Innate pourrait chercher à terme, l'obtention d'une autorisation d'indication en 2e ligne de traitement. Dans tous les cas, Luxomiti va assurer un socle de revenus à long terme à Innate, permettant à la société d'endosser un nouveau statut, celui d'une biotech « commerciale », certes loin de la rentabilité, mais susceptible d'attirer, peut-être, de nouvelles catégories d'investisseurs, jusque-là réticents à investir dans une société de pure R&D.
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