Lundi noir ou lundi rose à la Bourse de Paris, les analystes ne sont pas d'accord sur la réponse. (LG / Boursorama)
Depuis plusieurs semaines, les différents bureaux d’études jouent les Cassandre y allant de leurs scénarios plus ou moins noirs sur l’effet d’une victoire des extrêmes à la présidentielle française sur les marchés européens à court et moyen terme.
La thèse d'un lundi noir est même évoquée, ou tout du moins celle d'une baisse marquée. Pas forcément d'ailleurs en raison d'une inquiétude réelle des investisseurs mais parce que le moment pourrait être opportun de prendre des bénéfices après une phase de rally.
A voir : faut-il redouter un lundi noir sur les marchés ?
Dans une note récente Goldman Sachs résumait sa position d’une formule : «Bien que peu probable, une victoire populiste pourrait avoir des conséquences sévères.»
Mais le mot est lâché : au final, cette victoire d’un candidat de l’extrême est peu probable. Et la banque américaine d’ajouter : «Un résultat inattendu avec une performance plus faible que prévu des candidats eurosceptiques aurait des conséquences positives sur les marchés financiers.»
«Une qualification au second tour de Mélenchon peu probable»
Certains analystes sont d’ailleurs plutôt sereins. Pour Christopher Dembik, de Saxo Bank, «du fait d’un socle électoral fragile, une qualification pour le second tour de Jean-Luc Mélenchon paraît peu probable», tout comme l’hypothèse d’un second tour Mélenchon / Le Pen.
Reste donc trois scénarios déjà bien anticipés par les marchés : Macron / Le Pen, Fillon / Le Pen, Macron / Fillon.
En cas d’un duel Macron ou Fillon contre Le Pen, la présence «d’un candidat réformateur au second tour apporterait un soulagement immédiat sur les marchés», expliquait Nuno Texeira de Natixis AM sur le plateau d’Ecorama.
Pour Christopher Dembik, «la qualification pour le second tour de la candidate du FN, est déjà bien "pricé" dans les prix du marché. Pour que le marché réagisse beaucoup lundi matin à l’ouverture, il faudrait que Marine Le Pen fasse un score nettement supérieur à celui prévu par les sondages (au-delà de 25%). L’aversion au risque favoriserait un repli vers les valeurs refuge et une chute des valeurs bancaires.»
Dans une note parue aujourd’hui, Mirabaud Securites précise qu’«en cas de duel entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron, on pourrait avoir une progression des indices dans un premier temps puis une prise de bénéfices dans l’attente des élections législatives de juin (11 et 18 juin). Le duel le plus positif pour les indices serait un deuxième tour entre François Fillon et Marine Le Pen .»
Un duel Fillon / Macron serait salué par les marchés
Reste la combinaison Macron / Fillon, clairement la plus favorable pour la Bourse, et loin, elle aussi d’être impossible. Comme le disait Yves-Marie Cann, directeur des études politiques de l'institut Elabe sur le plateau d’Ecorama , «les courbes se sont resserrées sur les dernières semaines et une inversion de tendance en faveur de François Fillon et au détriment de Marine Le Pen est possible dans les derniers jours». D’autant que le candidat Les Républicains, éclaboussé par les affaires, pourrait bénéficier d’un vote caché d’une partie de l’électorat.
Pour Christopher Dembik, on pourrait alors assister à un rebond technique du CAC 40 dès lundi qui profiterait notamment aux valeurs bancaires et entraînerait un resserrement du spread entre les taux à dix ans français et allemands.
Quoiqu'il en soit, pour Mirabaud Securities, si l’un de ces trois scénarios devait l’emporter dimanche soir, « tous les secteurs devraient en bénéficier mais particulièrement les valeurs très internationales, exportatrices et peu endettées (plus à risque en cas de surprises négatives). Au niveau des secteurs à privilégier figurent le luxe (Hermès, LVMH), la défense (Thales) et les boissons (exportateurs donc Rémy Cointreau par exemple). Le secteur de la santé (Sanofi) pourrait aussi être entouré tout comme celui du pétrole (Total), des semi-conducteurs (STMicroelectronics) et de la technologie (Dassault Systèmes) ».
Tous les nuages ne seraient pas écartés pour autant
Et après ? Bon nombre d’observateurs voient le CAC 40 reprendre rapidement 10 à 15% si l’incertitude politique est levée. Un chiffre qui correspond, à la prime de risque politique du moment, du moins si l'on considère le niveau de décote des marchés européens par rapport aux marchés américains.
Ce ne sera pas forcément aussi rapide et peut-être pas aussi franc met toutefois en garde Christopher Dembik, «d’abord parce que les investisseurs américains vont mettre du temps à revenir. Ils comprennent mal le processus électoral français et Le Pen et Mélenchon font vraiment figure d’épouvantail à leurs yeux. Ils attendront probablement l’issue définitive du scrutin avant de faire leur retour sur les marchés européens».
Pas aussi franc non plus parce que, tous les risques ne seront pas forcément levés sur les marchés une fois le scrutin présidentiel français passé. «Il faudra surveiller les tensions géopolitiques en Asie, ou encore la politique assez imprévisible de Donald Trump.»
Mais un élément surtout lui semble insuffisamment pris en compte : le Brexit. «La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne est encore mal "pricée" par le marché, c’est un processus long et compliqué et des cafouillages dans les négociations pourraient pénaliser les performances des places financières à moyen terme.»
Reste aussi une inconnue dans ces scénarios plutôt optimistes, l’impact que l’attentat survenu hier soir sur les Champs Elysées peut avoir sur les Français quand ils seront dans l’isoloir…
Laurent Grassin (redaction@boursorama.fr)
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