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Bitcoin, quel impact de la faillite FTX ?
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 05/12/2022 à 09:07

François d'Hautefeuille
François d'Hautefeuille

François d'Hautefeuille

Evariste Quant Research

Cofondateur & président

https://www.evariste-quant-research.com/

(Crédits photo : Adobe Stock -  )

(Crédits photo : Adobe Stock - )

La faillite de FTX impacte profondément l'écosystème des cryptomonnaies. Elle montre le risque systémique majeur de cette architecture financière alternative. Elle ne remet pas en cause les perspectives de développement des technologies blockchain et des actifs numériques.

Pourquoi la faillite de FTX est un évènement majeur ?

FTX a été fondé par un alumni du MIT, le légendaire SBF (Samuel Bankman Fried). Il était le trentenaire le plus riche de sa génération. Il témoignait encore devant le Congrès Américain il y a quelque mois. FTX était alors le deuxième contributeur au financement des Démocrates derrière George Soros et devant Mike Bloomberg.

FTX a été fondé en 2019. A son pic en juillet 2021, FTX avait plus d'un million de clients. C'était la 3e plateforme crypto mondiale. FTX était basé aux Bahamas.  En janvier 2022, FTX a levé 400 mln USD pour une valorisation de 32 Mds USD ! La fortune de SBF était alors estimée à 26 Mds USD.

FTX était une figure phare de la « nouvelle économie solidaire ». SBF était un fervent représentant du mouvement « effective altruism ». Il était membre de « Giving what we can » fondé par William MacAskill. Ce dernier était membre du FTX Future Fund, un fonds dédié à ce type de projets. FTX était un acteur important en venture capital sur les cryptos via FTX ventures annoncé en janvier 2022.

Chronique d'une faillite non annoncée

C'est avant tout la violence de la faillite qui interroge. En moins d'une semaine, une des plateformes les plus respectées du monde des cryptos, créée par le top des universités américaines (MIT et Stanford), refinancée par la crème du capital risk mondial (Tiger Management, the Ontario Teacher Plan, Softbank, Blackrock, Temasek, Sequoia Capital, Toronto Pension Fund, HRT Ventures, etc… mais aussi des « people » comme Tom Brady, un joueur de baseball et son ex-épouse, Gisele Bündchen, …) a perdu tous ses actifs et a dû se déclarer en faillite.

Dimanche 6 novembre : un article sur le site internet Coindesk déclenche la crise de confiance. Il met en exergue que l'entité de trading du groupe FTX, Alameda Research, a une position importante de ses actifs reposant sur un token émis par FTX, le FTT.

7 novembre : la chute est précipitée par la décision de Changpeng Zhao, le PDG de Binance, de revendre toutes ses positions en FTT, conduisant à une chute de 80% de la valeur du FTT.

8 novembre : crise de confiance en FTX (6 Mds USD de retraits). Binance essaye de racheter FTX.

9 novembre (jour des élections américaines) : Binance renonce à son achat à la suite d'un audit des positions de FTX. FTX bloque les retraits sur la plateforme non-américaine.

10 novembre : article du Wall Street Journal annonçant que FTX a prêté 10 Mds USD des actifs de ses clients à son entité de market making Alameda Research. Les autorités des Bahamas bloquent les actifs de FTX.

11 novembre : FTX se met sous la protection du chapter 11 bankrupcy protection. Le NY Times annonce que le passif de FTX est de 8 Mds USD. SBF démissionne comme CEO. 473 mln USD d'actifs numériques sont frauduleusement transférés hors de FTX. FTX annonce alors transférer ses actifs en « cold storage ». SBF a déclaré ultérieurement que le « hack » aurait été fait par un employé de FTX.

12 novembre : SBF est interrogé par les autorités de Bahamas à la suite de rumeurs de fuite vers le Paraguay. Le Financial Times annonce que le passif de FTX est de 9 Mds USD contre 900 mln USD de liquid assets.

16 novembre : Genesis, un crypto lender du groupe Digital Currency annonce limiter les retraits. Ceci impacte le fonds Grayscale bitcoin qui décote alors de 42% par rapport à sa valeur théorique. Gemini, créé par les fameux jumeaux Winklevoss (qui ont participé à la création de Facebook) annonce aussi des limites aux retraits

17 novembre : le liquidateur de FTX (ancien liquidateur d'Enron !) annonce que FTX a prêté 1 Milliard USD à SBF, et 500 mln USD à son co-fondateur.

Sic transit gloria mundi

Nous n'avons fait qu'effleurer toutes les péripéties de cette faillite. L'important est d'en tirer des leçons pour l'investisseur.
Comme l'a mis en exergue la Bank of England et Lawrence Summers de Harvard, la crise FTX a une dimension systémique. Certes, les montants directement en jeu sont négligeables au niveau mondial (environ 8 Mds USD de perte), mais l'impact sur la confiance dans l'écosystème des actifs numériques est majeur. C'est l'ensemble de l'architecture, voire de la règlementation, de ces nouveaux actifs financiers qui est en cause.

Le paradoxe est que la technologie blockchain est censée protéger l'investisseur du risque opérationnel.  Il valide toute transaction par un algorithme de consensus blockchain à un réseau d'ordinateurs.  Il lie la conservation de la clé privée et de ses actifs à une clé USB matérialisée (offre type Ledger). Dans la pratique, les investisseurs préfèrent rester sur des plateformes de gré à gré plus ou moins régulées (CeFi) et des protocoles décentralisés et peu éprouvés. Ils s'exposent ainsi à un risque du type FTX. Elon Musk, le PDG de Tesla, SpaceX et Twitter a récemment déclaré dans une audioconférence Twitter Spaces organisée par le sulfureux @MarioNawfal : « Not your keys, not your wallets » (si vous ne contrôlez pas votre clé numérique, vous ne contrôlez pas vos actifs numériques !).

Il ne faut pas oublier que la capitalisation cumulée des crypto monnaies a atteint plus de 1 billion USD. Or, la volatilité du Bitcoin et de bien d'autres crypto monnaies est autour de 50/80%. Ceci est autour de 5 fois plus que les actions Monde. L'impact en risque ajusté aux actions du Bitcoin est donc monté donc autour de 5 billions USD. Or, il existe des connexions entre les crypto monnaies et le système financier classique par exemple via les futures sur le marché de Chicago.

Comparaison de la performance sur 2022 du Bitcoin et des ETFs/fonds Bitcoin. Le cours de référence Bitcoin du CME a baissé de 62.74% contre -72.22% pour le fonds Grayscale Bitcoin et -66.89% pour le Bitcoin Tracker en Suède.

Source : Bloomberg LLP, Bloomberg n’est pas responsable de cette analyse.

Source : Bloomberg LLP, Bloomberg n’est pas responsable de cette analyse.

Quels conseils pour traverser la crise des crypto monnaies ?

La crise FTX expose la dimension « montage de Ponzi» de biens des investissements en actifs numériques. Nos conseils sont :

  1. Ne pas leverager ses investissements en Bitcoin ou autres. FTX offrait une possibilité incroyable de leverager 5 fois le XBTUSD. Ceci nous semble de la folie. La volatilité du Bitcoin est déjà de 50/60% soit la plus grande de tous les actifs financiers. Il faut au contraire deleverager le Bitcoin en le combinant avec du monétaire afin de revenir sur des volatilités « normales » actions autour de 15/20% soit 1/3 de Bitcoin et 2/3 de fonds monétaires. De plus, il est impossible de recalculer les coûts de levier imputés par les plateformes de trading, et ils sont certainement élevés, a fortiori avec la hausse des taux USD autour de 4% et le coût du crédit autour de 4%. Un leverage de 5 coûte ainsi autour de 8/10% de financement x 5 soit 40% annuel ! Les investisseurs non qualifiés oublient souvent qu'un effet de levier de 5 crée un risque majeur de voir sa position liquidée par la plateforme en cas de baisse de 10%/15% du Bitcoin. Ceci explique sans doute les « forced selling » du Bitcoin dans les périodes de forte baisse. C'est un risque majeur et caché pour les spéculateurs non avertis de perdre à court terme leur capital même si le bitcoin remonte fortement à moyen terme.
  2. Ne traiter que par des plateformes bien règlementées par des autorités de marché reconnues comme l'AMF pour la France en évitant Genesis Trading (qui semble en difficulté).
  3. Lors des opérations de trading, suivre la « five rule » : ne pas traiter plus de 5k$, pas plus de 5 minutes, et transférer rapidement ses actifs sur un hardware wallet après opération.
  4. Transférer le plus vite possible ses Bitcoins sur un porte-monnaie électronique. La France est leader dans ce type de technologie avec la société Ledger basée à Vierzon. Un client de FTX qui aurait eu la sagesse de transférer ses bitcoins sur une clé Ledger («cold storage») est totalement protégé contre le risque de faillite de la plateforme.
  5. Ne pas participer au marché du repo (prêts de titres) sur Bitcoin et autres cryptos qui s'est tant développé via le « yield farming » (financement d'effets de levier et autres arbitrages soi-disant sans risque), en particulier en période de crise systémique comme nous la traversons. On avait là des rendements soi-disant peu risqués car correspondant au financement des effets de levier mentionnées en 1. C'était s'exposer à un risque de contrepartie majeur comme l'a montré la faillite si rapide de FTX et son impact systémique sur l'ensemble de l'écosystème

Conclusion, vers la fin des crypto monnaies ?

Certains anticipent déjà la fin des cryptomonnaies via une hyper régulation des Banques Centrales, et/ou par une prise en main du marché par ces mêmes banques centrales via l'émission de CBDC (monnaie digitale émise par une banque centrale).

Pour les libertariens purs, on a là une prise de pouvoir sur le marché des Etats sur le Marché, alors que le rêve crypto était justement de créer un marché décentralisé indépendant des Etats. Pour les globalistes, c'est une machination de la Chine pour détrôner le Roi Dollar et imposer sa propre CBDC en monnaie de réserve pour les pays non alignés. Pour les anti globalistes, c'est une tentative orwellienne d'imposer un « Big Brother » monétaire capable de tracer l'ensemble des paiements des individus et leur retirant ainsi tout espace de confidentialité et de propriété au profit du « Deep State » (Etat Profond).

Pour nous, toutes les analyses extrémistes sont autant de dérives sur une innovation technologique majeure. Le Bitcoin est plus qu'un actif financier difficile à valoriser car sans valeur intrinsèque propre en dehors de sa valeur d'usage. Le Bitcoin reste avant tout une nouvelle infrastructure financière disruptive via le blokchain. Cette nouvelle architecture financière grâce à la programmation d'un réseau d'ordinateurs offre une alternative crédible au système financier existant tel qu'il a été construit depuis 30 ans. Elle ouvre la possibilité pour les 2/3 du monde non financiarisés à créer et accéder à un système financier robuste et non manipulable via les néo banques et les fintechs.

Pour toutes ces raisons, nous ne prédisons pas une disparition des actifs numériques dans la crise FTX mais au contraire une mutation Schumpetérienne de cet éco système consolidé par les preuves de solidité financière (« Proof of Reserves »), une meilleure régulation et plus de transparence. Cette destruction créatrice permettra de reconstruire le marché via des technologies porteuses autour de la finance décentralisée (DeFi) adossée à la technologie blockchain.

On a ainsi une évolution proche de l'internet. N'oublions pas qu'internet a d'abord créé des fortunes via les messageries de rencontre (minitel rose en France). Ce type de messagerie a ensuite servi de tremplin à tout internet et à la révolution de société que cette technologie a permis pour le bien de tous.


Disclaimer.
Cette analyse financière n'est pas un conseil en investissement. Evariste Quant Research et ses clients peuvent détenir des titres mentionnés dans cette analyse.
Analyse rédigée avec l'aide de Gaspard d'Hautefeuille, Halgo Ltd.

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NEXC +0.27%

4 commentaires

  • 10 décembre 11:06

    FTX = process opaques de l'intermédiationBitcoin et finance décentralisée = transparenceNot your keys, not your coins!


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