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Vetoquinol : la pharmacie vétérinaire "worldwide"
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 15/06/2023 à 08:16

Jérôme Lieury
Jérôme Lieury

Jérôme Lieury

Olier Etudes & Recherches

Analyste financier, membre du Cercle des analystes

https://www.olier-etudes-recherche.fr/

Cotée à Paris depuis 2006, basée à Lure (Haute Saône), Vetoquinol a réalisé un chiffre d'affaires de 540 millions d'euros en 2022 avec 2.500 salariés.  (crédit photo : Adobe Stock)

Cotée à Paris depuis 2006, basée à Lure (Haute Saône), Vetoquinol a réalisé un chiffre d'affaires de 540 millions d'euros en 2022 avec 2.500 salariés. (crédit photo : Adobe Stock)

L'analyse financière ne suffit pas, il faut le dire

Une fois que l'on a, comme Warren Buffett, fait sa propre analyse financière, c'est-à-dire fait ses propres chiffres sur un tableur à trois sous, parce qu'il n'y a pas de valeur exacte en finance (et de moins en moins en comptabilité) et parce que l'on n'est jamais mieux servi que par soi-même, il ne faut pas croire que cela suffit pour prendre une décision d'investissement (et se donner les meilleures raisons pour se tromper). Car plus que les chiffres des comptes, c'est l'extra-financier : tout ce qui est ESG, Environnement, Social et Gouvernance, qui est en fait le plus important, même si c'est encore moins palpable.

Ce qui est bien normal, après tout, puisqu'une entreprise est avant tout une organisation, et donc des gens, et puisque les chiffres, quand ils veulent dire quelque chose, ne sont que les conséquences des actes de ces gens, qui se retrouvent inévitablement un jour où l'autre dans le cours de Bourse. Parce que les investisseurs, tels qu'on les connaît, se doivent de tout regarder, et de se faire de bonnes ou de mauvaises impressions avec toutes les informations émanant de, ou concernant, une valeur cotée.

La gouvernance : qui a le pouvoir ?

Et si, avec le réchauffement planétaire carabiné que l'on connaît ces jours-ci, le E de ESG est devenu primordial, il n'en faut pas négliger le G de Gouvernance pour autant. Même si on peut penser que le patron d'une entreprise est avant tout le client, essayer de comprendre qui a le pouvoir et comment il est exercé vaut toujours quelque chose.

D'autant que ce n'est pas simple : une société par action est à la fois, faut-il le rappeler ? a) une copropriété : une communauté d'actionnaires qui décident, et b) une organisation pour produire, et donc avec une chaîne de commandement. Le pouvoir de décision découle du droit de propriété et le Conseil d'Administration de la société agit au nom de ces propriétaires, qui nomment ses membres en Assemblée Générale. Et le pouvoir de commander découle du lien de subordination institué par le contrat de travail entre le "commettant" et ses "préposés".

Une corrélation entre légitimité des dirigeants et cours de Bourse ?

Les dirigeants aussi pouvant aussi n'être que de simples salariés, qui rendent compte directement au Conseil d'Administration de l'exécution de leur mission.Et leur autorité n'est légitime que s'ils travaillent bien et leurs subordonnés aussi (encore plus) : si les résultats sont bons, et si le cours de Bourse s'apprécie (c'est ça, le capitalisme, quand il fonctionne bien). Toute la question étant finalement de se demander si le petit actionnaire, le minoritaire boursier, a son mot à dire ou pas. D'autant que, s'il n'est pas content, il peut voter avec ses pieds et vendre ses titres. Ce qui fait baisser le cours de Bourse, et la valeur de la société, ce peut in fine retirer beaucoup de légitimité au pouvoir des dirigeants, puisqu'ils ne sont pas si bons que ça. Et déclencher leur départ, puisque les actionnaires qui sont restés ne leurs renouvellent pas leur confiance lors de l'Assemblée Générale (c'est ça aussi, le capitalisme, le vrai !).
Ceci dans un monde idéal, bien entendu : il peut arriver (cf Atos ces derniers temps), qu'une trajectoire boursière catastrophique ne soit finalement pas sanctionnée comme elle le pourrait. Entre autres parce que l'actionnariat s'est dispersé, et que ceux qui restent ne sont pas assez gros pour peser, tout simplement. Même s'ils manifestent haut et fort leur juste mécontentement : la vertu n'est pas toujours récompensée, c'est bien connu.

Le paradoxe des sociétés familiales : le petit minoritaire rarement maltraité par le grand majoritaire

Mais que dire des sociétés où l'actionnaire minoritaire est vraiment très minoritaire face à un bloc majoritaire, le plus souvent celui du fondateur ou de ses descendants ? Bref un gros bloc familial, qui a au moins les 2/3 des droits de vote, et peut donc décider tout seul de tout, comme changer les statuts de la société en Assemblée Générale Extraordinaire ? La réponse à la question est que, finalement, ça se passe plutôt bien dans l'ensemble.

Surtout si ledit bloc familial a l'essentiel de sa fortune investi dans la société ("it's my money !") : les intérêts des uns et des autres sont alignés, quelque part. Pour le meilleur, le plus souvent, même si le cours de Bourse ne monte pas tous les jours. Et si bien gérer une société est un art quelque part aussi, ça peut éventuellement se transmettre de génération en génération, contrairement à la théorie éculée qui veut que le grand père fasse la fortune, le fils de la politique, et le petit-fils de la musique.

C'est d'ailleurs un peu l'impression que l'on a en regardant une belle mid-cap qui semble très bien entrer dans le profil : Vetoquinol, qui vaut un peu plus d'un milliard d'euros en Bourse, qui en est à sa troisième génération de dirigeants familiaux, en ligne directe qui plus est, et dont l'actionnariat familial détient encore a priori les 2/3 du capital (67% aux dernières nouvelles, sur la page "société" de la valeur sur Boursorama).

De la pharmacie vétérinaire dans le monde entier ou presque

Cotée à Paris depuis 2006, basée à Lure (Haute Saône), Vetoquinol a réalisé un chiffre d'affaires de 540 millions d'euros en 2022 avec 2.500 salariés. La société a été fondée par un pharmacien, le grand-père du directeur général actuel qui a créé dans les années 1930 un produit antiseptique et fongicide à usage vétérinaire à base d'oxyquinoléine : le Vetoquinol, justement, qui a vite connu le succès, et permis de développer d'autres produits.

La société est très internationale : elle ne réalise plus que 15% de son chiffre d'affaires en France, après s'être implantée d'abord en Hollande, puis en Irlande, puis en Belgique dans les années 1980, puis en Amérique du Nord en 1990, puis en Chine en 2004, en Inde en 2009,  au Brésil en 2011, etc... soit maintenant une présence commerciale directe dans 24 pays, et 5 sites de production. Soit en tout 51% de l'activité en Europe, 36% en Amérique du Nord, où les USA sont son premier marché, et 13% ailleurs, principalement en Asie-Pacifique.

Un développement qui s'est fait autant par ouvertures de filiales que par acquisitions d'autres pharmaciens vétérinaires apportant de nouveaux produits, par l'acquisition de produits ou de licences, et aussi et surtout avec des produits issus de la R&D interne : Vetoquinol a des médicaments protégées par des brevets, mais s'est surtout fait une spécialité de la reformulation et du développement de nouvelles formes galéniques pour des molécules tombées dans le domaine public. En investissant bon an mal an environ 6% de son chiffre d'affaires en R&D.

Largeur de l'offre, et les vendeurs pour ça

Les forces de vente de Vetoquinol comptent 900 personnes en tout, soit un bon tiers du personnel, et la société vend aux vétérinaires et aux éleveurs au travers de ses filiales locales et d'une centaine de distributeurs-grossistes. Elle a plus de la moitié de ses produits, soit 56% de son chiffre d'affaires 2022, définis comme "Essentiels", et stratégiques : le Marbocyl, le Cefaseptin, l'UpCard, le Zylkène, le Flexadin, le Felpreva, le Prodender, le Phovia, pour les animaux de compagnie, ou encore le Forcyl, le Tolfine, le Lydaxx, le Permacyl, et encore le Marbocyl pour les animaux d'élevage, le reste étant commercialisable en parapharmacie.

Avec une expertise forte a priori sur certains segments, principalement la dermatologie et la parasitologie pour les animaux de compagnie, et les pathologies propres aux vaches laitières. Mais plus généralement, la société vend tout ou presque pour soigner les chiens et les chats (68% chiffre d'affaires 2022) ou les bovins et les porcs (32%) : analgésiques, anti-inflammatoires, hygiène/dermatologie, antiparasitaires, anti-infectieux/antibiotiques, compléments alimentaires, etc… ainsi que des produits et des services d'aide à la reproduction (avec une filiale spécialiste : Bioniche Animal Health, acquise en 2014) pour les éleveurs.

Soit en tout 4.000 références (et 500 marques déposées) et 27 millions d'unités produites sous toutes les formes galéniques possibles : comprimés, doses injectables, pommades et ainsi de suite. Avec en portefeuille 1 000 autorisations de mise sur le marché (AMM, pour les fins connaisseurs).

Résultats économiques : pas de doute, on est bien dans la pharma

Si l'on entre dans les détails (de mes propres chiffres, faits sur un tableur à trois sous), on ne peut que constater que Vetoquinol a) dégage une belle marge opérationnelle (le rapport entre le résultat opérationnel courant, qui est le chiffre d'affaires moins toutes les charges, amortissements compris, avec ce chiffre d'affaires), soit 18,3% en 2022 : marge meilleure que la moyenne, meilleure que chez le concurrent Virbac (14,8%) et indéniablement bonne en valeur absolue, b) que cette belle marge opérationnelle découle, comme dans le reste de la pharmacie, qu'elle soit humaine ou animale, d'une marge brute (le chiffre d'affaires moins les achats) à un niveau élevé, soit 70% (73% chez Sanofi, 72% chez AstraZeneca, etc…), c) que le bilan n'est pas mal non plus, avec très peu de dette financière, un endettement financier net négatif (: plus de cash que de dettes), et une situation de trésorerie nette très largement positive (+90 millions d'euros) fin décembre. Comme elle l'était déjà fin 2021 (+65 millions d'euros), et un peu moins, mais quand même fin 2020 (+17 millions d'euros).

La Bourse un peu dure avec Vetoquinol ?

Ce qui laisse à penser que le marché a été un peu brutal en septembre en faisant chuter en un jour le cours de -18% sur une publication de résultats semestriels 2022 considérés comme décevants, avec une marge opérationnelle en recul de -3,3% (-330 points de base pour les amateurs éclairés), mais toujours bonne à 19%, et un peu moins de cash en caisse avec un besoin en fonds de roulement (le fameux BFR, toujours pour les mêmes), c'est-à-dire des décalages de règlements et des stocks qui avaient dérapé quelque peu, l'inflation aidant.

Des dérapages à compter toutefois plutôt dans les péripéties court-termistes, qui ne doivent pas en principe inquiéter l'investisseur traditionnel, lequel ne spécule pas, et est donc "long only", et garde le papier un certain temps au chaud dans son portefeuille.
Dans un monde idéal. Puisque personne n'est parfait, pas même Vetoquinol, qui pourrait éventuellement donner un meilleur dividende, puisque son taux de distribution (dividende/bénéfice par action) n'est que de 13%. Ce qui est nettement en dessous du marché. Mais "cash is king", et on n'est jamais trop prudent dans ce monde encore moins prévisible que d'habitude, paraît-il.

Et tous les actionnaires, qu'ils soient gros ou petits, sont logés à la même enseigne. C'est tout ce qui compte, après tout.

Valeurs associées

Euronext Paris -1.10%

2 commentaires

  • 15 juin 08:43

    il fallait bien qu'il se "chauffe " les méninges avant de commencer son article sur VETOQUINOL. Actuellement c'est une obligation de parler du "climat" même si on va déguster un bon potage. C'est l'époque qui le veut.


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