
55ème Salon de l'Aéronautique et de l'Espace à l'aéroport du Bourget
par Joe Brock et Tim Hepher et Giulia Segreti et Paul Sandle
PARIS (Reuters) -Les tensions géopolitiques internationales ont pesé lundi sur l'ouverture du Salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget, Israël accusant le gouvernement français d'avoir ordonné la fermeture de plusieurs stands d'entreprises israéliennes.
Au chapitre des contrats, le constructeur aéronautique européen Airbus a finalisé des commandes avec des groupes saoudiens, alors que son grand concurrent Boeing est absent du salon, qui se tient jusqu'au 20 juin en Seine-Saint-Denis.
Le rendez-vous du Bourget est crucial pour les fabricants d'avions et d'armes qui en profitent pour présenter leurs technologies de pointe.
Or à l'heure du conflit dans la bande de Gaza et de la confrontation armée entre l'Etat hébreu et l'Iran, les organisateurs du salon ont fermé les quatre principaux stands d'entreprises israéliennes à la demande du gouvernement français, a déclaré le ministère israélien de la Défense, dénonçant "une décision scandaleuse et sans précédent".
Selon une source au fait du dossier, cette instruction a été donnée car les entreprises israéliennes concernées n'ont pas respecté la consigne d'une agence de sécurité française de retirer des modèles d'armes offensives ou à énergie cinétique de leurs stands.
Dans les allées du salon, les stands des entreprises Elbit Systems, Rafael, IAI et Uvision, étaient fermés et séparés des autres au moyen de panneaux noirs. Trois autres stands israéliens de taille plus modeste et n'exposant pas d'armes, ainsi qu'un stand du ministère de la Défense, restaient accessibles.
"Cette décision scandaleuse et sans précédent est le fruit de considérations politiques et commerciales. Elle intervient alors qu'Israël mène une guerre nécessaire et juste pour éliminer la menace nucléaire et balistique qui pèse sur le Moyen-Orient, l'Europe et le monde entier", déclare dans un communiqué le ministère israélien de la Défense.
La France, affirme-t-il, exclut ainsi "des armes qui concurrencent les industries françaises. Cette attitude est d'autant plus choquante que les technologies israéliennes ont donné des résultats impressionnants et précis en Iran."
Les organisateurs du Salon du Bourget précisent dans un communiqué être en discussions pour tenter d'aider les différentes parties à trouver "une issue favorable" au différend.
BOEING ABSENT
Deux responsables politiques américains présents au Salon ont également critiqué la décision française.
S'adressant à des journalistes devant les stands israéliens fermés, la gouverneure républicaine de l'Arkansas Sarah Huckabee Sanders l'a ainsi qualifiée d'"assez absurde", tandis que la sénatrice républicaine Katie Britt l'a jugée "à courte vue".
Lors d'un court discours inaugural lundi matin, accompagné de Guillaume Faury, patron d'Airbus et président de l'organisateur du Bourget, le Groupement des industries français aéronautiques et spatiales (GIFAS), le Premier ministre François Bayrou a éludé la polémique et souligné la nécessité d'"européaniser" les efforts en matière d'aéronautique afin que la France ne soit pas "seule" à fournir les efforts.
Le secteur aéronautique est ébranlé par le conflit entre l'Iran et Israël, qui a obligé les transporteurs à annuler ou à détourner des milliers de vols.
Les dirigeants des secteurs de l'aérospatiale et de la défense sont également confrontés à l'incertitude liée à la politique erratique du président américain Donald Trump en matière de droits de douane.
Beaucoup s'attendent à ce que les nouveaux droits de douane aient un impact sur les avions, les moteurs et les pièces détachées, perturbant les chaînes d'approvisionnement mondiales, augmentant les coûts de production et mettant à rude épreuve les partenariats internationaux.
Le directeur général de Boeing, Kelly Ortberg, et la directrice de Boeing Commercial Airplanes, Stephanie Pope, ont annulé leur déplacement à Paris, l'avionneur américain ayant réduit son programme au Salon du Bourget alors qu'il apporte son soutien à l'enquête sur l'accident meurtrier de l'avion d'Air India en Inde.
Boeing souhaite rester discret et éviter toute mauvaise publicité alors que l'entreprise sort d'une série de crises liées à la sécurité, à l'industrie et à l'entreprise, déclenchées par des accidents mortels impliquant son modèle 737 MAX.
De nouvelles commandes d'avions sont attendues durant le salon, où la politique européenne joue aussi un rôle important.
Des sources ont déclaré à Reuters que la Pologne devrait annoncer qu'Airbus a remporté un accord historique portant sur la vente d'environ 47 avions A220 à la compagnie nationale LOT, dans le cadre d'une réinitialisation plus large des relations entre la Pologne et la France, où se trouve le siège d'Airbus.
Airbus a annoncé en outre une commande du loueur d'avions saoudien AviLease, pour 30 avions A320neo et 10 appareils cargos A350F, dont le montant atteindrait environ 3,5 milliards de dollars d'après des estimations des analystes de Cirium Ascend.
Le constructeur européen a aussi annoncé une "commande ferme" de la compagnie saoudienne Riyadh Air pour 25 avions A350-1000.
(Reportage Paul Sandle, Tim Hepher, Steven Scheer, Giulia Segreti et Florence Loève, rédigé par Benjamin Mallet, Camille Raynaud et Florence Loève, édité par Sophie Louet)
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