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Réindustrialisation des États-Unis : mythes, limites et perspectives
information fournie par Café de la Bourse 18/06/2025 à 12:51

Maison Blanche, Washington (Crédits: Unsplash - René DeAnda)

Maison Blanche, Washington (Crédits: Unsplash - René DeAnda)

Depuis la présidence de Donald Trump, l'idée de ramener la production industrielle sur le sol américain est revenue au cœur du débat économique. À coups de droits de douane, de subventions massives et d'un discours protectionniste assumé, les États-Unis cherchent à renforcer leur souveraineté industrielle .

Mais cette stratégie soulève plusieurs questions.Quels secteurs peuvent réellement en tirer parti ? Quelles sont ses limites ? Et dans quelles conditions ce projet peut-il réussir ?

Réindustrialiser l'Amérique… oui, mais à quelles conditions ?

L'objectif de réindustrialiser les États-Unis répond à un double enjeu : retrouver une base de production solide et créer des emplois industriels. Mais relocaliser des usines et des chaines de production après des décennies de délocalisations n'est pas simple.

Produire aux États-Unis coûte en effet plus cher qu'en Asie ou en Europe de l'Est. Les salaires, les normes environnementales, l'énergie ou encore les taxes y sont plus élevés.

Résultat : les produits fabriqués localement sont souvent plus chers. Ce sont donc les consommateurs américains qui sont pénalisés. Cette hausse des prix alimente aussi généralement l'inflation et la croissance américaines, ce qui peut impacter la politique monétaire et donc le coût de l'argent aux Etats-Unis.

Par ailleurs, les chaînes de production démantelées ou parties à l'étranger mettent du temps à se reconstruire. Il faut former des travailleurs, reconstruire des filières entières et moderniser les infrastructures. La réussite de cette réindustrialisation dépend donc d'investissements massifs, à la fois publics et privés.

Les gagnants de la nouvelle politique industrielle américaine

Certains secteurs sont identifiés comme prioritaires par les autorités américaines et bénéficient d'un soutien actif :

  • Les semi-conducteurs : grâce au CHIPS Act qui soutient le développement d'une filière nationale de semi-conducteurs avec plus de 50 milliards de dollars d'aides, de nombreux projets de méga-usines aux Etats-Unis ont été annoncés par de grandes sociétés comme Intel, TSMC, Samsung ou Micron. L'objectif est de sécuriser cette industrie stratégique sur le sol américain.
  • L'intelligence artificielle : des entreprises comme NVIDIA annoncent vouloir produire leurs supercalculateurs IA aux États-Unis pour éviter les droits de douane et réduire leur dépendance à l'Asie en sécurisant davantage leurs chaînes d'approvisionnement.
  • La défense et la cybersécurité : ces secteurs restent fortement soutenus par le gouvernement pour des raisons de sécurité nationale. Ils bénéficient de financements stables et d'une préférence pour le "Made in America". Cela favorise ainsi le développement d'industries comme l'aéronautique, les systèmes de communication ou encore la fabrication de munitions avancées.
  • Les technologies vertes : avec l'Inflation Reduction Act ayant pour but la protection du climat, plus de 370 milliards de dollars sont mobilisés pour l'industrie verte (énergies renouvelables, électricité propre, batteries, véhicules électriques, solution d'efficacité énergétique…). Le but est de faire des États-Unis un leader de cette industrie propre.

Les secteurs fragilisés par le protectionnisme de Trump

Mais tous les secteurs ne profitent pas de cette politique. Ceux qui dépendent fortement des importations ou de chaînes d'approvisionnement mondialisées risquent d'en souffrir. Début 2025, Donald Trump a par exemple lancé une enquête via la Section 232 pour déterminer si certaines importations peuvent nuire à la sécurité nationale.

Les secteurs concernés pour l'instant sont :

  • Le cuivre,
  • Le bois d'œuvre et le bois de construction,
  • Les semi-conducteurs (et équipements associés),
  • Les produits pharmaceutiques et les ingrédients pharmaceutiques,
  • Les camions,
  • Et certains minéraux stratégiques comme les minéraux critiques transformés et produits dérivés.

Si ces enquêtes débouchent sur des droits de douane ou des restrictions supplémentaires, les entreprises de ces secteurs pourraient voir leurs coûts grimper fortement, sans pouvoir facilement relocaliser leur production. Pour ces industries, le protectionnisme peut donc être un frein plus qu'un moteur.

Conclusion : entre ambition politique et contraintes économiques

La volonté de réindustrialiser les États-Unis suit une ambition légitime de souveraineté et s'inscrit dans un objectif stratégique clair de gagner en autonomie, de renforcer l'emploi local et de sécuriser les chaînes de production.

Les secteurs soutenus par des politiques ciblées s'en sortent mieux, tandis que d'autres, plus fragiles ou dépendants de l'étranger, risquent d'en payer le prix fort. Pour réussir cette réindustrialisation, il faudra accepter des compromis : des produits potentiellement plus chers à court terme, mais en échange d'une économie potentiellement plus résiliente, plus indépendante et plus stable à long terme.

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