
Bois dans une scierie. (Crédits: Adobe Stock)
Basé à Dunières en Haute Loire (43), Moulinvest est un petit groupe industriel acteur intégré de la filière bois, depuis l'exploitation forestière, avec des équipes qui abattent (et replantent aussi) des arbres chez les propriétaires de forêts en Auvergne alentour, jusqu'à la vente de produits finis en bois, en passant par le sciage, le séchage, le rabotage, et les traitements spécifiques, soit 400 000 mètres cubes de grumes transformés par an.
Avec aussi une activité annexe, qui l'est de moins en moins : l'énergie, puisque Moulinvest fabrique aussi des granulés de bois pour le chauffage, et, tant qu'à faire, produit aussi un peu d'électricité à partir des déchets de bois des scieries. Soit en tout un chiffre d'affaires attendus pour l'exercice en cours clos fin août 2025 de 95 millions d'euros environ, réalisés à plus de 80% en France, avec 220 salariés.
Un petit groupe bien structuré
Moulinvest est une PME, très structurée toutefois avec ses cinq filiales aux métiers bien définis : tout d'abord, la scierie Moulin, la scierie Sainte-Agathe, et Technicbois Moulin produisent l'essentiel du bois pour la construction (bois de charpente et de couverture : ossatures, chevrons, bastaings, madriers, etc…), lequel contribue pour la moitié des revenus du groupe. Ensuite, France Bois Imprégnés fabrique les produits d'aménagement extérieur traités pour résister aux intempéries : coffrage et d'emballage, bardages variés, bois pour terrasses, palissades, poteaux, piquets, et ainsi de suite, majoritairement en pin mais aussi en chêne, et avec une marque à forte notoriété : Décovert. Et enfin, last but not least, Moulin Bois Energie est là avec ses granulés de bois 100% résineux, livrés éventuellement en vrac par camions souffleurs, et en sacs par camions à palettes (Moulinvest a sa propre flotte de véhicules), et sa petite centrale thermo-électrique state of the art. Ce qui ne gâte rien puisque le bois est une source d'énergie incontestablement renouvelable.
Bien entendu, Moulinvest est une société familiale, gérée par la quatrième génération de descendants du fondateur qui contrôlent toujours plus des 2/3 du capital. Un petit groupe développé dans la durée à partir de la Scierie Moulin démarrée en 1916, et avec quelques accélérations par moment, comme le lancement de Moulin Bois Energie en 2007, et le rachat de France Bois Imprégnés en 2013.
Des mauvais chiffres depuis deux ans…
Moulinvest n'a pas particulièrement brillé par sa performance économique sur ses derniers exercices, avec un chiffre d'affaires en baisse de -12% en 2022-23 et encore de -9% en 2023-24. Pour cause de recul des volumes dans le bois pour le bâtiment, que ce soit le bois de construction ou les produits d'imprégnation, les mises en chantiers étant ce qu'elles sont depuis deux ans. Et aussi pour cause de baisses de prix, un retour de bâton très plausible après les deux années d'inflation forte, à défaut d'être vraiment chiffrable, de la période post-covid dans les matériaux de construction. Les baisses de prix ayant fini par frapper durement aussi Moulin Bois Energie sur l'exercice 2023-24, comme le montre un chiffre d'affaires en baisse de -24%, malgré des volumes stables dans les granulés.
Cette forte dégradation se retrouve dans la marge brute, alias marge sur coûts variables, qui passe en trois exercices de 59,3% à 51%, laquelle marge sur coûts variables absorbe forcément de moins en moins les coûts fixes, avec à la clé une marge opérationnelle qui passe quant à elle de 22,4% à 0% sur la période, tout simplement. Soit un résultat opérationnel courant de 9 000 euros à fin août 2024 contre 13,8 millions d'euros pour l'exercice d'avant et contre 25,6 millions d'euros sur l'exercice encore d'avant. Bref…
…mais deux ans ne sont vraisemblablement pas grand-chose pour une société familiale…
Ceci étant, on ne peut que constater que Moulinvest n'a pas du tout essayé d'ajuster ses coûts de personnel en fonction de la mauvaise conjoncture, et que ceux-ci sont donc restés fixes avec des effectifs inchangés. D'où cette marge opérationnelle totalement écrasée qui semble défier un des grands principes de la finance moderne : le "cost cutting" à tout crin, rebaptisé récemment "self-help". Mais ceci peut se comprendre assez bien, puisqu'il est de notoriété publique qu'on a du mal à recruter des talents, et ce à tous les niveaux, et que les salariés que l'on renvoie chez eux dans les crises ne reviennent jamais, et qu'ils peuvent coûter fort cher à remplacer quand la reprise est là, ce qui arrive inévitablement un jour. Et se comprend d'autant mieux que, nous l'avons dit, Moulinvest est une société familiale, et qu'elle est donc gérée dans une optique de long-terme, et en corollaire sans se soucier du cours de Bourse au jour le jour. Ce qui est vraisemblablement le commencement de la sagesse, et toujours un vrai point à vérifier quand on est investisseur et qu'on envisage de mette un peu d'argent dans une affaire : une direction qui gère en fonction du cours de Bourse, ça finit souvent dans les larmes (pour les autres), qu'on se le dise.
… surtout avec un bon bilan…
Et cette vraie optique de long-terme est rendue très possible par un bilan en béton, c'est le moins que l'on puisse dire, avec i) zéro dette financière à court-terme, à en croire les comptes consolidés, ce qui n'est pas vraiment banal, ii) un endettement très faible, soit un ratio Dette Nette/Fonds Propres de seulement 13% fin août 2024, ramené à 10% dans le bilan semestriel de l'exercice en cours à fin février 2025 (et un levier Dette Nette/Ebitda moderne respectivement de seulement 1x fin août et 0,4x fin février, si votre serviteur compte bien), et, plus important encore, iii) une situation de trésorerie nette positive de +30 millions d'euros.
Entre autres parce que Moulinvest a généré pas mal de cash dans les (trop ?) belles années d'avant, et s'est empressé de ne rien faire avec, et de le garder au chaud dans sa caisse. Ce qui, là aussi, déroge aux grands principes de la finance moderne avec leurs raisonnements purement comptables et la théorie du bilan efficient pour ne rien arranger. Mais permet sans aucun doute de voir venir en Auvergne, et de bien voir au-delà des péripéties du court-terme.
… et une petite reprise en cours, déjà saluée par le marché, il est vrai
Lequel court-terme va nettement mieux, en plus, puisque l'activité va nettement mieux au premier semestre de l'exercice en cours à fin février, avec des ventes en progression de +4,5%, tout simplement parce que les volumes et les prix s'améliorent un peu dans la construction. Soit tout de suite une meilleure absorption des coûts fixes (: le levier opérationnel, pour les fins connaisseurs) et une remontée de la marge résultat opérationnel courant/chiffre d'affaires de 0,4% à 5,1%, ce qui est nettement mieux.
De bonnes nouvelles qui ont bien aidé le cours de Bourse à reprendre un peu d'altitude, soit plus de +25% sur ces trois derniers mois.
Désolé, j'aurais pu y penser plus tôt. Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire, c'est bien connu.
Et investir en tendance dans les titres qui montent est une stratégie qui en vaut bien d'autres : prendre un train en marche ne fait de tort à personne. C'est bien connu aussi.
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