Les Allemands sont appelés aux urnes dimanche dans le cadre d'élections législatives anticipées, après l'effondrement de la coalition du chancelier Olaf Scholz, qui pourraient déboucher sur un gouvernement de coalition dirigé par les conservateurs.
Donné gagnant par les sondages, le bloc conservateur CDU/CSU dirigé par Friedrich Merz aurait toutefois besoin d'un ou deux partenaires pour gouverner.
La future coalition gouvernementale devra faire face à des pressions en faveur de changements indispensables pour relancer une économie à l'arrêt, notamment en réformant le "frein à l'endettement" afin de dépenser plus pour relancer l'activité.
Voici cinq sujets clés pour les marchés financiers de ces élections:
1/ LA FORMATION D'UNE COALITION GOUVERNEMENTALE
Beaucoup de décisions politiques et économiques cruciales dépendent de la rapidité avec laquelle un gouvernement pourrait être formé et de l'existence d'une majorité des deux tiers au Parlement nécessaire pour toute réforme du frein à l'endettement.
"S'il y a de longues discussions (de coalition) ou trois partis impliqués, cela compliquerait les choses", observe Simon Keller, analyste actions chez Hauck Aufhäuser Investment Banking (HAIB), indiquant que "le plus simple serait que la CDU/CSU et le SPD (social-démocrate de centre-gauche) aient suffisamment de voix pour former une coalition".
Par ailleurs, si une minorité de blocage d'un tiers des partis issus des partis populistes, y compris la formation d'extrême-droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) et celle de gauche radicale BSW, entre au Parlement, cela pourrait réduire à néant les espoirs des marchés d'une réforme budgétaire à grande échelle.
2/ LA REFORME DU FREIN A L'ENDETTEMENT
Les marchés doutent encore de la probabilité d'une réforme radicale du "frein à l'endettement", qui limite étroitement les dépenses publiques fédérales, même si un léger assouplissement est attendu.
Les analystes estiment que le frein constitutionnel à l'endettement a empêché les gouvernements de réaliser des investissements vitaux, par exemple dans les infrastructures, afin de redresser une économie qui s'est contractée pour la deuxième année consécutive en 2024.
Selon Katharine Neiss, économiste en chef de PGIM Fixed Income pour l'Europe, une légère modification du frein à l'endettement permettant un peu plus de discrétion sur les dépenses est possible. "Cela dit, nous pouvons être très convaincus que les dépenses budgétaires augmenteront, ce qui est évidemment une bonne nouvelle à la marge", a-telle ajouté.
3/ EURO ET TAUX
L'euro devrait bénéficier de toute augmentation des dépenses publiques qui améliore les perspectives économiques.
Se négociant à près de 1,0460 dollar EUR=EBS , la monnaie unique a évolué au gré des craintes des droits de douane américains et les espoirs d'un cessez-le-feu entre l'Ukraine et la Russie.
"Une grande coalition (CDU/CSU et SPD), ainsi qu'une majorité des deux tiers nécessaire pour la réforme du frein à l'endettement, seraient probablement positives pour l'euro", ont jugé les analystes de Morgan Stanley.
Une augmentation des dépenses budgétaires pourrait aussi accroître l'offre d'obligations d'État allemandes, ce qui ferait grimper les rendements DE10YT=RR . Les rendements obligataires en Europe sont déjà à la hausse en prévision d'une augmentation des dépenses de défense au sein de l'Union européenne.
Les marchés obligataires dits "périphériques", comme l'Italie, pourraient également bénéficier d'un soutien si une coalition majoritaire dirigée par la CDU émergeait, étant donné que toute mesure visant à stimuler l'économie allemande est également considérée comme positive pour la région dans son ensemble, ont estimé les analystes de Citi.
4/ MARCHE ACTIONS
Les élections législatives pourraient par ailleurs stimuler les actions exposées à l'économie allemande en cas de réductions de l'impôt sur les sociétés et d'une croissance économique allemande plus forte.
L'indice allemand DAX .GDAXI est proche de ses records tandis que les moyennes et petites capitalisations .MDAXI
.SDAXI sont à la traîne, les entreprises les plus exposées à la faible croissance nationale ayant enregistré des performances inférieures à la moyenne.
"Contrairement à la plupart des élections récentes en Europe, celles de l'Allemagne représentent davantage un risque positif qu'un risque négatif", a déclaré Emmanuel Cau, responsable de la stratégie actions européennes chez Barclays.
De quoi favoriser déjà des positionnements: les flux hebdomadaires vers les actions européennes hors Royaume-Uni ont atteint leur plus haut niveau en deux ans au cours de la semaine qui s'est achevée mercredi, ont souligné les analystes de Barclays, citant les données de l'EPFR.
5/ DÉPENSES DE DÉFENSE
Les dépenses de défense pourraient augmenter sous la pression des Etats-Unis avec les négociations entre Washington et la Russie sur un éventuel accord de paix en Ukraine, profitant à certaines valeurs comme le fabricant d'armes allemand Rheinmetall RHMG.DE qui a bondi de 11% lundi et atteint un record en Bourse.
La CDU/CSU estime que l'objectif de 2% du PIB fixé par l'Otan pour les dépenses de défense est un minimum. Les partenaires probables de la coalition - le SPD, les Verts et/ou le FDP - sont favorables à ce que les objectifs de dépenses de l'Otan soient au moins atteints.
"Le frein à l'endettement sera retravaillé, non pas pour mettre en place un plan de relance massif, mais pour augmenter les dépenses de défense, par exemple", anticipe ainsi Simon Keller chez HAIB.
VOIR AUSSI:
LE POINT sur les élections législatives anticipées en Allemagne nL5N3P80LQ
(Rédigé par Samuel Indyk à Londres, Greta Rosen Fondahn à Gdansk et Stefano Rebaudo à Milan ; version française Bertrand De Meyer, édité par Blandine Hénault)
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