
Une pancarte brandie lors de la convention républicaine en juillet 2024. (crédit : Jacek Boczarski / ANADOLU / Anadolu via AFP)
L'année 2025 devrait encore être mouvementée pour la finance durable avec le retour de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis qui pourrait renforcer les divergences régionales tant sur le plan des flux financiers que sur ceux des affaires judiciaires et de la réglementation.
La réponse politique des gouvernements reste encore trop lente pour atteindre l'objectif mondial de limitation du réchauffement climatique fixé il y a près de 10 ans malgré des températures records et des phénomènes météorologiques extrêmes.
Alors que les régulateurs du monde entier durcissent progressivement les règles qui régissent la finance et les entreprises afin de réduire plus rapidement les émissions de carbone nocives pour le climat, le rythme du changement est inégal, les États-Unis étant déjà à la traîne par rapport à l'Europe.
Les choix de Donald Trump à l'égard des politiques environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) pourraient creuser cet écart, bien que les engagements de réduction des émissions à court terme et les coûts croissants des événements climatiques maintiennent pour de nombreuses entreprises l'orientation générale inchangée.
"Nous prévoyons qu'en 2025, nous verrons une résilience pour l'investissement durable à l'échelle mondiale, même s'il est probable qu'il restera des différences fondamentales entre l'approche des États-Unis et celle de l'Europe", a déclaré Tom Willman, responsable de la réglementation chez Clarity AI, une entreprise spécialisée dans les technologies de développement durable.
"Aux États-Unis, on peut s'attendre à une approche plus conservatrice, les investisseurs privilégiant les rendements à long terme ajustés au risque afin d'éviter les risques politiques ou de réputation potentiels."
Alors qu'un peu plus de la moitié des cadres américains s'attendent à des réglementations nouvelles ou élargies en matière de développement durable cette année, ce chiffre atteint 60% en Grande-Bretagne et de 80% à Singapour, selon une enquête menée en décembre par Workiva auprès de 1.600 cadres.
La réalité politique américaine a déjà incité certaines entreprises à réduire leurs efforts en matière de climat et de diversité pour éviter le feu des critiques, à l'image des plus grandes banques américaines qui ont récemment quitté la principale coalition mondiale du secteur sur le climat.
La pression juridique s'accentue également sur les efforts mondiaux en matière de climat. L'an dernier, une analyse du Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment a montré qu'un litige climatique sur cinq n'était pas aligné sur les politiques de réduction des émissions. La majorité d'entre eux se trouvaient aux États-Unis.
Les fonds ESG américains ont vu leurs clients retirer 15,9 milliards de dollars, alors que les fonds européens ont reçu 37,3 milliards de dollars, selon les données de l'observateur du secteur Morningstar.
Le nombre de nouveaux fonds axés sur l'ESG lancés aux États-Unis est tombé à 7 seulement, contre 189 en Europe.
Pour la première fois, davantage de fonds durables ont été fermés que lancés, sous l'effet de la politique américaine mais aussi des règles plus strictes de 'reporting' et labellisation en Europe.
Selon Hortense Bioy, responsable de la recherche sur l'investissement durable chez Morningstar Sustainalytics, la demande de fonds durables a été inférieure à celle du marché en général à cause des performances mitigées, des inquiétudes quant à savoir si certains fonds étaient aussi verts qu'ils le prétendaient, de l'incertitude réglementaire et de la réaction des acteurs ESG.
Malgré des perspectives incertaines en raison de la possibilité que Donald Trump édulcore certaines initiatives ESG, par exemple le soutien du gouvernement aux véhicules électriques, de nombreux moteurs de marché sous-jacents de la demande de finance durable, tels que le besoin d'énergie verte, sont restés, a-t-elle ajouté.
Le montant des fonds levés par le biais d'obligations durables a également continué à augmenter dans les Amériques (+16,9 %) et en Europe (+10,7 %) en 2024, selon les données de LSEG.
Compte tenu des pressions concurrentes, Leon Kamhi, responsable de la responsabilité chez le gestionnaire d'actifs Federated Hermes, a déclaré qu'il s'attendait à ce que les investisseurs "mûrissent" et se concentrent sur les impacts obtenus dans l'économie réelle.
"Pour que la transition soit réussie, il est essentiel que ces investissements génèrent des retours économiques tant pour les entreprises que pour les investisseurs."
(Reportage Simon Jessop, avec Toby Chopra ; version française Bertrand De Meyer, édité par Kate Entringer)
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