Credit Suisse devrait être absorbée dès le 12 juin par son ex-rivale UBS qui a accepté mi-mars de la racheter sous la pression des autorités suisses pour éviter à tout prix sa faillite. UBS a obtenu de solides garanties de la Confédération pour mener cette fusion. Mais une tâche immense l'attend pour intégrer cette banque fortement fragilisée par deux années de scandales.
(illustration) ( AFP / FABRICE COFFRINI )
Faillite de Greensill
En mars 2021, Credit Suisse annonce la suspension de quatre fonds liés à Greensill, une société britannique qui s'appuie sur des montages financiers complexes pour prêter de l'argent aux entreprises pour leurs factures. Quelque 10 milliards de dollars ont été investis.
Lorsqu'un assureur refuse de renouveler les contrats de Greensill, la banque ne peut plus calculer la valeur des fonds et amorce leur liquidation. Greensill fait faillite, faisant vaciller les entreprises qui en dépendent pour leur trésorerie.
Credit Suisse se lance dans une bataille pour récupérer les sommes investies et rembourser les souscripteurs.
Fonds Archegos
Quatre semaines après, le fonds américain Archegos ne peut plus réinjecter d'argent pour couvrir ses investissements dans des produits dérivés, déclenchant une vente massive d'actions à Wall Street.
Plusieurs banques sont touchées, Credit Suisse est la plus affectée. L'affaire lui coûte quelque 5 milliards de dollars.
Prêts au Mozambique
En octobre 2021, les autorités américaines et britanniques lui infligent 475 millions de dollars de pénalités pour des prêts à des entreprises d'Etat au Mozambique. Les crédits, accordés entre 2013 et 2016, auraient dû financer des projets de surveillance maritime, pêche et chantiers navals, mais ont été en partie détournés pour des pots-de-vin.
La banque s'accorde avec les autorités britanniques pour annuler les 200 millions de dollars dus par ce pays en grave crise. La Finma, le gendarme suisse des marchés, restreint les crédits que la banque peut accorder à des pays financièrement faibles ou exposés à la corruption.
Violation des règles de quarantaine
En décembre 2021, le tabloïd suisse Blick révèle que le président de la banque Antonio Horta-Osorio a enfreint les règles de quarantaine liées à la pandémie de Covid-19. D'autres révélations suivent, notamment sur des entorses aux restrictions sanitaires pour assister à un match de tennis à Wimbledon. Il démissionne moins de neuf mois après son arrivée.
"Suisse secrets"
En février 2022, l'Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), un consortium regroupant 47 médias, dont Le Monde et le New York Times, publie l'enquête "Suisse secrets". S'appuyant sur les données de 18.000 comptes des années 1940 à la fin 2010, elle révèle que la banque a hébergé des fonds de clients sulfureux. La banque rejette "fermement" ces conclusions.
Procès intentés par l'ancien Premier ministre de Géorgie
L'ancien Premier ministre géorgien Bidzina Ivanichvili intente des procès dans plusieurs juridictions sur des pertes subies dans des placements gérés par Patrice Lescaudron, ancien banquier star de Credit Suisse. Licencié en 2015, puis condamné en 2018 à Genève pour escroquerie, il s'était suicidé deux ans plus tard.
En mars 2022, une filiale de la banque est condamnée par une Cour aux Bermudes à le dédommager à hauteur de 607 millions de dollars.
L'affaire rebondit à Singapour en mai 2023 où une Cour ordonne à Credit Suisse de le dédommager à hauteur de 926 millions de dollars (866 millions de dollars), moins une déduction de 79 millions de dollars liés à un précédent compromis. La banque fait appel dans les deux juridictions.
Blanchiment de cocaïne bulgare
En juin 2022, la banque est condamnée en Suisse à une amende de 2 millions de francs suisses dans une affaire de blanchiment liée à un réseau bulgare de cocaïne. Elle était mise en cause dans le procès d'une ancienne conseillère qui avait exécuté ou fait exécuter des transactions entre 2007 et 2008 malgré des indices concrets de l'origine criminelle des fonds.
Deux accords pour des litiges anciens
En octobre 2022, la banque règle un litige aux Etats-Unis datant de la crise de 2008 concernant des titres adossés à des créances hypothécaires, moyennant un versement de 495 millions de dollars.
En France, elle paye 238 millions d'euros afin d'éviter des poursuites pour démarchage illégal de clients et blanchiment aggravé de fraude fiscale entre 2005 et 2012.
Manquements à ses obligations
En février 2023, la Finma accuse Credit Suisse d'avoir "gravement manqué à ses obligations prudentielles" concernant Greensill. La Finma ouvre quatre procédures contre d'anciens managers.
En mars, le gendarme américain des marchés financiers (SEC) soulève des questions au sujet d'une révision de ses comptes pour les exercices 2019 et 2020. La banque repousse la publication de son rapport annuel, puis reconnaît des "faiblesses substantielles" dans les contrôles internes sur ses rapports financiers.
Fin mai, la Bourse de New York l'informe que ses certificats de dépôts ne répondent plus aux exigences de cotation, qui imposent que leur cours atteigne au moins 1 dollar pendant les 30 jours. La banque répond que la question sera réglée par leur dé-cotation lors du rachat par UBS.
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