
( AFP / DAMIEN MEYER )
Historiquement plutôt discret, le géant de la grande distribution Les Mousquetaires/Intermarché est beaucoup plus visible depuis l'arrivée à sa tête de Thierry Cotillard, qui multiplie les chantiers, entre acquisition des magasins Casino, évolution de l'image ou restructuration du pôle agro-industriel.
"On peut me reprocher peut-être de fatiguer les équipes en demandant sans cesse d'accélérer, mais on est porté par une dynamique dont il ne faut pas qu'elle s'arrête, et quand tout est lancé, la dynamique appelle la dynamique": interrogé par l'AFP en mai, le quinquagénaire avait assumé son "impatience" à engager les chantiers sur la table des Mousquetaires.
M. Cotillard est arrivé début 2023 à la tête du géant de la distribution, troisième distributeur alimentaire de France derrière E.Leclerc et Carrefour, mais aussi acteur puissant du marché du bricolage sous les enseignes Bricomarché, Brico Cash ou Bricorama. Ensemble, les quelque 4.000 points de vente, en France (3.226) mais aussi au Portugal, Belgique et en Pologne, propriétés de quelque 3.100 chefs d'entreprise, ont réalisé 53 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2023.
Son mantra: que le groupement employant 150.000 personnes soit "invulnérable en France et dynamique dans les pays, avec trois piliers, le discount, la croissance et la dynamique humaine".
En un peu plus d'un an, et alors que le distributeur se réunit en assemblée générale cette semaine à son siège de Tréville à Bondoufle (Essonne), il a opéré la plus grosse opération de concentration du secteur des supermarchés depuis le rachat de Promodès par Carrefour en 1999, en rachetant près de 300 magasins du concurrent à bout de souffle Casino.
Kantar a pour la première fois mesuré l'impact de l'intégration de certains de ces points de vente dans les parts de marché des Mousquetaires lundi: ils ont dépassé les 17%, selon le panéliste qui fait référence en la matière. De quoi regarder dans les yeux Carrefour, 18,6% du marché dans l'attente d'intégrer les magasins Cora et Match, et dans une moindre mesure E.Leclerc, 24,1%.
- "Arme incroyable de différenciation" -
Dans le même temps, Thierry Cotillard a engagé le groupement dans une alliance sur les achats d'une durée inhabituellement longue - dix ans - avec ses concurrents Auchan et Casino. L'objectif est d'améliorer le rapport de force avec les fournisseurs agro-industriels pour négocier de meilleures conditions d'achats des denrées commercialisées dans les rayons des supermarchés.
Le groupement a aussi fermé Brico Privé, jeune pousse toulousaine rachetée en 2020 mais lourdement déficitaire. Un total de 174 personnes ont perdu leur emploi dans un dossier qui a mobilisé jusqu'à la présidente du conseil régional d'Occitanie (PS) Carole Delga.
Fin mai auprès de l'AFP, Thierry Cotillard a en outre anticipé le "chantier qui nous attend": Agromousquetaires. Contrairement à ses concurrents, le distributeur dispose d'usines agro-industrielles, 57 "unités de production" de produits laitiers, céréales, produits carnés ou de la mer.
Il possède même dans le Morbihan une usine de couches pour bébé, "la seule alternative à l'unique groupe belge qui fabrique" celles vendues par les autres distributeurs sous leurs marques respectives en Europe, selon Agromousquetaires.
Ces usines emploient 11.000 personnes en France et réalisent environ 4,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
"C'est une arme incroyable de différenciation" par rapport à la concurrence, estime Thierry Cotillard auprès de l'AFP, Intermarché mettant en avant son slogan "producteur et commerçant". Et aussi "une arme pour faire des prix sans intermédiaire".
"Quand je fais le steak haché à moins de 10 euros (le kilo), Carrefour ou les autres n'auront jamais ça" de leur fournisseur, qui refusera d'écraser ses marges autant que la filiale des Mousquetaires, a expliqué Thierry Cotillard.
Alors que le distributeur veut fêter les cinquante ans d'Agromousquetaires lundi 10 juin dans le Finistère, son patron estimait toutefois en mai que "quelques unités de production peuvent ne pas être saturées, ce qui n'est pas satisfaisant". "Donc on se pose la question de savoir s'il faut garder l'usine, pas pour la fermer mais pour chercher un partenariat avec quelqu'un qui aurait des volumes additionnels à produire."
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