par Jeffrey Dastin
La capitale française attirera les regards du monde la semaine prochaine à l'occasion du Sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle (IA) centrée sur une question : l'administration du président américain Donald Trump, la Chine et près d'une centaine d'autres pays peuvent-ils s'entendre sur la manière de développer durablement l'IA ?
Un an après le sommet de Bletchley Park, au Royaume-Uni, où les grandes puissances ont pris conscience des dangers de l'IA, un nombre plus conséquent de pays se réunit à Paris pour discuter de ses usages.
Désireuse de promouvoir son industrie nationale, la France co-organise avec l'Inde ce sommet international programmé les 10 et 11 février au Grand Palais, au coeur de Paris.
L'événement s'attardera sur deux sujets qui constituent aussi des atouts pour la France : des IA en code source ouvert - permettant aux utilisateurs d'accéder au code programmant l'IA - et l'alimentation des centres de données par une énergie propre.
Parmi les autres sujets à l'ordre du jour figurent l'impact de l'IA sur le travail, l'emploi et le fonctionnement des démocraties.
Des cadres d'Alphabet, maison-mère de Google GOOGL.O , Microsoft MSFT.O et des dizaines d'autres entreprises sont attendus.
Un dîner réunissant des chefs d'État et patrons autour du président français Emmanuel Macron et du Premier ministre indien Narendra Modi est prévu lundi à l'Elysée.
Sam Altman, dirigeant de l'entreprise à l'origine de ChatGPT, OpenAI, donnera une conférence mardi lors d'une journée baptisée "Business Day", ont dit à Reuters deux personnes au fait du programme du sommet.
Une incertitude demeure : les États-Unis parviendront-ils à un accord avec d'autres pays sur l'IA, et si oui comment ?
Depuis son entrée en fonction le 20 janvier, Donald Trump a révoqué le décret de son prédécesseur Joe Biden sur cette technologie, retiré les Etats-Unis de l'Accord de Paris sur le climat et subi la pression du Congrès pour contrôler l'exportation des puces essentielles à l'intelligence artificielle afin de contrer la Chine.
Le vice-président JD Vance dirigera la délégation américaine.
Un communiqué non contraignant sur les principes de gestion de l'IA portant les signatures des États-Unis, de la Chine et d'autres pays est en cours de négociation et constituerait une avancée majeure s'il était conclu, a-t-on appris auprès de sources au fait du dossier.
Ces sources ayant requis l'anonymat ont refusé de détailler le communiqué ou de développer d'éventuels points de désaccord entre signataires potentiels.
Un représentant de la présidence française a affirmé que le sommet permettrait à tous les pays représentés, pas seulement aux Etats-Unis et à la Chine, de s'exprimer sur le sujet.
"On montre que l'IA est là, que les entreprises doivent l'adopter, que c'est un vecteur de compétitivité pour la France et pour l'Europe", souligne aussi l'Elysée.
AUCUNE RÉGLEMENTATION
Les questions de sécurité ont dominé les discussions lors des précédents sommets mondiaux sur l'IA de Bletchley Park et Séoul. À Paris, la mise en place d'une réglementation n'est cependant pas à l'ordre du jour.
L'Europe et en particulier la France souhaitent discuter d'un cadre pour l'usage de l’IA, mais pas de règles qui ralentiraient leurs champions nationaux, en retard par rapport à leurs concurrents américains.
Des pays comme la France envisagent une règlementation européenne sur l'IA la plus flexible possible afin qu'elle ne décourage pas l’innovation, ont indiqué les sources.
L'enjeu est plutôt de faire bénéficier les pays en développement de l'IA via des modèles meilleur marché fabriqués par des entreprises comme la start-up française Mistral et la chinoise DeepSeek.
La société basée à Hangzhou a secoué les marchés mondiaux le mois dernier en montrant qu'elle pouvait rivaliser avec les poids lourds américains dans le domaine des technologies de raisonnement de type humain, et pour bien moins cher.
La France considère ce développement comme une preuve que la course mondiale vers une IA plus puissante est toujours de mise, estime l'une des sources interrogées par Reuters.
Lors du sommet de Paris, les organisations philanthropiques et les entreprises devraient s'engager à verser un capital initial de 500 millions de dollars, pouvant aller jusqu'à 2,5 milliards de dollars sur cinq ans, pour financer des projets d'intérêt public sur l'IA dans le monde entier, ont indiqué les sources.
Un autre défi consiste à répondre à la crise énergétique que l'industrie juge inévitable, ses modèles d'IA étant gourmands en énergie.
"La France a une position exceptionnelle en Europe, et dans le monde d'ailleurs, eu égard à notre énergie décarbonée, pilotable, disponible immédiatement, et évidemment le parc nucléaire, dans le cadre des implantations de data centers, est un atout", fait valoir la présidence française, qui laisse entrevoir des annonces à cet égard lors du sommet.
(Reportage Jeffrey Dastin, avec Elizabeth Pineau et Anna Tong, version française Florence Loève, édité par Augustin Turpin)
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