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Alain Moussy, PDG d’AB Science : «Le programme masitinib a délivré une grande partie de ses réponses en 2020»
information fournie par Boursorama23/12/2020 à 07:39

Alain Moussy, PDG d'AB Science. (Crédits photo : AB Science)

Alain Moussy, PDG d'AB Science. (Crédits photo : AB Science)

Après des résultats encourageants obtenus dans plusieurs pathologies cette année et une trésorerie consolidée, AB Science doit maintenant transformer l'essai pour son candidat-médicament, le masitinib. Entretien avec son PDG, Alain Moussy pour faire le point sur la feuille de route de la biotech.

Boursorama : Vous venez de présenter des résultats très encourageants dans la maladie d'Alzheimer. Il n'est pas toujours simple pour le profane, ou l'investisseur particulier, de comprendre comment le mécanisme d'action de masitinib peut s'appliquer à des pathologies très différentes en apparence. On peut avoir vos explications sur son application dans le cas précis de la maladie d'Alzheimer.
Alain Moussy : C'est un sujet passionnant. Le mécanisme d'action du masitinib dans la maladie d'Alzheimer est totalement innovant et apporte quelque chose que les autres traitements n'ont pas. Dans la maladie d'Alzheimer, on observe deux agrégats, un agrégat de plaques bêta-amyloïdes et un agrégat de protéines Tau. Logiquement, les tentatives pour enrayer la maladie se sont concentrées sur la diminution de ces plaques, sans succès. Les plaques bêta-amyloïdes génèrent un stress oxydatif qui va créer une neuro-inflammation médiée par la microglie. On sait également, même si c'est peu abordé dans la littérature médicale, que les mastocytes sont activés par les plaques séniles de beta-amyloïdes et qu'ils vont contribuer à la destruction de leur environnement tout comme les microglies. En contrôlant ces deux cellules du système immunitaire inné, le masitinib bloque la neuro inflammation. Cela révèle le rôle prépondérant de ces deux cellules du système immunitaire inné, un rôle jusqu'alors sous-estimé. Plus précisément, le masitinib ne détruit pas ces cellules, il les contrôle, les module et empêche les deux agrégats de les activer dans leur rôle neuro-destructeur pour les présenter dans leur rôle neuroprotecteur. Le masitinib a aussi un autre mécanisme d'action en inhibant potentiellement la phosphorylation de la protéine tau via l'inhibition de la kinase FYN. En effet, dans la maladie d'Alzheimer, la protéine Tau est hyper-phosphorylée et c'est ce qui contribue à la formation de l'agrégat de Tau. C'est cet agrégat qui est neuro-destructeur au même titre que l'agrégat des plaques de bêta-amyloïdes. C'est donc un 3e mécanisme d'action complémentaire. J'ajouterai que notre étude a été menée chez des patients souffrant de la maladie d'Alzheimer chez qui la maladie est installée, c'est à dire des patients qui présentent une démence légère à modérée. A titre de comparaison, l'aducanumab de Biogen est destiné aux patients présentant les premiers symptômes d'Alzheimer, ce qui n'est pas du tout le même positionnement. Enfin, dans le bras contrôle, les patients pouvaient prendre les 4 traitements enregistrés, à savoir les 3 anticholinestérases et la memantine. Malgré la prise de traitements enregistrés, les patients déclinaient dans le bras contrôle à la fois dans les mesures des fonctions cognitives et des activités quotidiennes alors qu'ils s'amélioraient sous masitinib à la dose de 4,5 mg/kg/jour, avec une différence significative entre les deux bras. Je pense que tous ces éléments rendent les résultats robustes. Le petit nombre de leaders d'opinion avec lesquels nous avons partagé nos résultats ont d'ailleurs tous salué l'étude comme étant très encourageante.

Boursorama : Il n'y a pour le moment aucun traitement pour la maladie d'Alzheimer qui représente un besoin médical énorme. Quelles sont les prochaines étapes de développement du masitinib dans cette indication ?
Alain Moussy : En effet, le besoin est immense. En France, la maladie d'Alzheimer touche 900.000 patients et on recense 225.000 nouveaux cas chaque année. Aux Etats-Unis, il y a 5,8 millions de cas et 1 million de nouveaux cas chaque année. Il y aurait ainsi 35 millions de cas dans le monde. 4% des plus de 65 ans sont touchés par Alzheimer, 15% au-delà de 80 ans. Avec le vieillissement de la population, le nombre de cas va encore augmenter dans les années à venir. En France, 20% de la population a plus de 65 ans mais ce chiffre monterait à 28% en 2040. Nous allons donc lancer une étude confirmatoire en affinant les critères d'enrôlement des patients. C'est une étude qui démarrera dans le courant de l'année prochaine et dont on aura les résultats à la fin de l'année 2023.

Boursorama : Après la sclérose en plaques (SEP) et la sclérose latérale amyotrophique (SLA) les résultats de masitinib dans la maladie d'Alzheimer sont une autre preuve de son efficacité dans les maladies neuro-dégénératives. C'est désormais un axe prioritaire de développement pour AB Science ?
Alain Moussy : Oui, nous pensons après ces trois preuves d'efficacité dans trois maladies neuro-dégénératives, à la même dose, que ce n'est pas le fruit du hasard mais que le masitinib, à travers son mécanisme d'action innovant, apporte une vraie réponse aux maladies neuro-dégénératives, c'est donc effectivement un axe prioritaire. On se rend compte que traiter la neuro-inflammation et moduler ces deux cellules du système immunitaire inné est une bonne réponse dans ces pathologies. Ce n'est pas la seule, mais ça fait partie des réponses possibles. Si on contrôle le phénotype, à savoir le rôle des microglies et des mastocytes, qui peuvent contribuer à la destruction de leur environnement via la neuro-inflammation, et le retourner en un rôle neuro-protecteur, alors le masitinib va produire deux effets : la réduction des symptômes et le ralentissement de la neuro-dégénerescence, voire une stabilisation si les patients sont traités de manière précoce, avant que les neurones ne soient détruits.

Boursorama : Le Masitinib est aussi en essais et obtient des résultats dans plusieurs autres indications, notamment le cancer du pancréas ou encore l'asthme sévère. Comment allez-vous pouvoir mener de front toutes ces études.
Alain Moussy : Dans le cas du cancer du pancréas et de l'asthme sévère, nous avons fait deux études et nous allons demander aux autorités de santé si elles estiment que ces données sont suffisantes pour déposer une demande d'autorisation, ou s'il faut faire une étude confirmatoire. Il faut compter environ 6 mois le temps de formuler la demande et de recevoir la réponse.

Boursorama : In fine, comment se déterminera le prix du masitinib ? Y a-t-il un risque que la première indication pour laquelle il pourrait être autorisé ne soit pas la plus économiquement intéressante ?
Alain Moussy : Mettons la maladie d'Alzheimer de côté car aucun nouveau traitement n'est actuellement disponible et les anciens traitements enregistrés ont été déréférencés. Dans les autres indications dont nous parlons, le prix pourrait ne pas être très différent, un traitement dans la SEP récurrente rémittente coûte 60.000 dollars par an. C'est à peu près la même chose pour un anti-cancéreux et un peu plus élevé dans la SLA. Ramené au coût du traitement à la semaine, ce sera à peu près la même chose pour le covid-19 où le masitinib est également développé.

Boursorama : Justement, parlons du covid-19, le masitinib est testé pour traiter le virus mais est-ce encore pertinent alors que les campagnes de vaccination ont démarré presque partout dans le monde…
Alain Moussy : Les vaccins vont réduire la présence du virus mais ils ne vont pas le faire disparaitre de la surface de la planète pour autant. De la même manière que dans la grippe où des vaccins existent, la grippe revient chaque année par vague. Par ailleurs, les vaccins sont préventifs et non curatifs. Si on est infecté, il faut des antiviraux pour pouvoir se traiter, comme dans le cas de l'herpès ou du sida. Aujourd'hui, on sait après l'étude Discovery que les antiviraux testés (dont le Remdesivir et l'hydroychloroquine) ne sont pas efficaces.  Après ces résultats, l'université de Chicago a mené une étude préclinique en comparant 1.900 médicaments afin de déterminer celui qui serait le plus à même d'inhiber la réplication du virus dans une cellule épithéliale du poumon, via la protéase du virus, essentielle dans son cycle de réplication. C'est le masitinib qui est décrit par l'Université de Chicago comme le meilleur. L'Université de Chicago a par ailleurs co-crystallisé la protéase du SARS-CoV2 avec le masitinib et a démontré que la structure du masitinib était affine avec celle de la protéase virale. Ces données sont établies in vitro et l'Université de Chicago tente maintenant de prouver que cette inhibition est également visible in vivo chez l'animal, ce qui serait une avancée majeure.

Boursorama :  Ça fait beaucoup de développements à venir, beaucoup d'études. AB Science s'est mis en ordre de bataille sur le plan financier. Ce sera suffisant ?
Alain Moussy : On peut commencer à répondre à cette question en précisant qu'on ne va pas démarrer les études confirmatoires en même temps. Nous allons bien sûr les séquencer. Nous avons déjà deux études confirmatoires ouvertes au recrutement dans la mastocytose et la SLA et nous allons lancer les autres. Nous sommes en capacité de démarrer deux à trois nouvelles études confirmatoires par an. Actuellement, notre rythme de consommation de trésorerie est de 20-25 millions d'euros et il ne devrait pas augmenter de façon significative. A côté de cela, nous avons effectivement assuré le refinancement de l'entreprise au dernier trimestre via quatre opérations : une émission d'obligations convertibles pour 4,5 millions d'euros, une ligne de financement de 38,5 millions d'euros avec Alpha Blue Ocean, un partenariat sous la forme d'un prêt structuré avec la BEI pour 15 millions d'euros et, cette semaine, une augmentation de capital de 10,5 millions d'euros. Si on additionne toutes ces opérations, nous avons de la visibilité au moins jusqu'en 2022.

Boursorama : Quels grands rendez-vous fixez-vous aux investisseurs pour cette année 2021 ?
Alain Moussy : Nous aurons les résultats de l'étude sur le cancer de la prostate métastasée à la fin du premier trimestre. Ceux de l'étude clinique de phase 2 dans le covid-19 interviendront eux dans le courant de l'année. Et puis, nous nous sommes rapprochés de l'université de Chicago pour continuer à travailler avec eux autour du masitinib avec un objectif : réussir à démontrer in vivo, chez l'animal, que le masitinib présente une efficacité en tant qu'antiviral. Il y aura aussi le lancement de nouvelles études confirmatoires et la réponse des agences de santé sur la possibilité ou non de déposer une demande d'autorisation de notre produit dans le cancer du pancréas et dans l'asthme. Le programme du masitinib a rendu une grande partie de ses réponses en 2020, qui s'avèrent positives. Le masitinib peut représenter une innovation majeure dans des indications clés grâce à son mécanisme d'action unique à ce jour.

Propos recueillis par Laurent Grassin

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8 commentaires

  • 01 janvier19:14

    la feuille de route est tracée pour 2021 et suivantes .le Masitinib est un ANTIVIRAL et sera confirmé bientôt en tant que tel.une révolution dans le milieu médical .quand l'ANSM verra que la FDA sera prête à laisser passer, les autorisations vont pleuvoir et la vie des malades ainsi que la votre vont changer :-)))


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