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Yanis Varoufakis sur Boursorama : l'interview complète en exclusivité
information fournie par Boursorama 30/09/2015 à 18:22

Yanis Varoufakis était l'invité d'Ecorama, l'émission vidéo de Boursorama, ce mercredi 30 septembre.

Yanis Varoufakis était l'invité d'Ecorama, l'émission vidéo de Boursorama, ce mercredi 30 septembre.

Yanis Varoufakis était l'invité de Boursorama mercredi 30 septembre dans l'émission Ecorama animée par David Jacquot. L'ancien ministre des Finances grec est revenu sur les coulisses des négociations de cet été, tout en livrant ses opinions sur l'économie française.

Yanis Varoufakis est de passage en France à l'occasion de la sortie française de son livre « Un autre monde est possible ». Boursorama en a profité pour l'inviter sur le plateau d'Ecorama, son émission vidéo quotidienne.

Habitué aux déclarations tranchantes, Yanis Varoufakis n'a pas gardé la langue de bois pour répondre aux questions de David Jacquot.

Retour sur la crise de l'été

Interrogé sur sa démission du 6 juillet dernier, Yanis Varoufakis a expliqué : « Fin avril début mai, j'ai vu qu'Alexis fléchissait sous la pression. Il accordait des concessions qu'il n'aurait pas dû faire. Une fois qu'on fait des concessions alors que le camp adverse n'en fait pas, on commence à baisser les bras et à rendre les armes. Le deuxième moment important de déception a eu lieu après le référendum. J'espérais que le résultat du référendum le dynamiserait, moi-même j'étais dynamisé ! (…) Mais quelques semaines avant le référendum, l'esprit de conquérant avait disparu et certaines personnes de notre cabinet (…) considéraient que le référendum pouvait être une solution de fuite. Ils espéraient que l'on échoue. Certains ont été déçus de la victoire [du non]. La nuit du référendum, je suis entré dans le bureau [d'Alexis Tsipras], et il était abattu, complètement déprimé, alors que moi j'étais enthousiaste. Le peuple grec a été courageux et a dit non à la Troïka, malgré la fermeture des banques et malgré la propagande des médias. J'ai été déçu à tel point que j'ai démissionné ».

Interrogé sur le bilan mitigé, pour le gouvernement grec, du long bras de fer qu'il a engagé avec ses créanciers cet été, l'ancien ministre estime que « ce n'était pas une erreur. Nous avons fait quelque chose qui a changé la face de l'Europe (…). Nous avons dit à la Troïka que le plan était voué à l'échec, car il est économiquement irrationnel (…). Certes, nous avons dû rendre les armes, mais désormais tout le monde sait comment fonctionne l'Eurogroupe. Avant, on ne le savait pas. Nous avons rendue publique la façon non démocratique et irrationnelle dont l'Europe prend des décisions très importantes qui concernent la vie de tous ». « Je ne regrette pas d'avoir livré cette bataille. J'espère que nous avons ouvert la voie pour une reconfiguration de la zone euro et une redynamisation des discussions ».

La France trop faible dans l'axe franco-allemand

L'ancien ministre des Finances est particulièrement revenu sur la position de la France lors des discussions de l'été. « Le ministre des Finances français a si peu de pouvoir pour parler de sujets si importants ! », s'est exclamé Yanis Varoufakis.

« Je vais être diplomate en disant que la France n'a pas été particulièrement forte dans les discussions. C'est une grosse préoccupation, car la zone euro et l'Union européenne reposent sur l'axe franco-allemand. Donc lorsque l'un des deux piliers de l'union succombe (…), c'est l'union qui a un problème ». Pourtant, explique-t-il, « Je pense que la France est très forte. Regardez le secteur industriel de la France : les industries sont efficaces et productives (…). Mais la France est faible dans le contexte de la zone euro par rapport à l'Allemagne car la France a créé une union monétaire qui étouffe l'économie française. Nous devons repenser l'euro car la zone euro n'est pas un bon équilibre pour la France, ni pour l'Allemagne d'ailleurs ».

Au sujet de la contestation de l'euro tel qu'il fonctionne actuellement, l'ancien ministre a déclaré : « Sortir de l'euro pour retourner à la drachme, c'était quelque chose de trop idéologique pour moi. L'euro est une devise atroce, mal conçue, et qui ne peut pas résister à la pression de l'économie moderne. Mais il faut réparer cette devise (…). Il faut éviter la fragmentation de l'euro ».

Interrogé sur les actuelles réformes économiques d'Emmanuel Macron, Yanis Varoufakis a expliqué qu'« il y n'a que 20% des réformes sur lesquelles nous ne sommes pas d'accord ». « Je pense que [certaines] réformes ne vont pas marcher. Et il le sait, je lui ai dit. On a des désaccords, mais on a aussi des points d'accord ». En revanche, « Je pense que ses réformes font du mal à sa crédibilité au sein de la gauche et qu'elles jouent en faveur du docteur Schäuble. Cela peut être néfaste pour certains aspects de l'économie française », a-t-il ajouté.

Conflits d'idées avec Wolfgang Schäuble et les créanciers

Poursuivant sur son rapport conflictuel avec le ministre des Finances allemand, Yanis Varoufakis a déclaré sur le plateau d'Ecorama : « Je vais partager avec vous une conversation que j'ai eue avec Wolfgang Schäuble lorsque j'étais encore ministre. Je lui ai dit "Wolfgang, ce genre de protocole d'accord va nous ramener à la même situation dans six mois, avec un autre programme voué à l'échec". Il a dit oui. C'est donc un programme voué à l'échec, il est conçu pour échouer. Par exemple, dans un ou deux mois, les PME grecques devront payer en avance, au Fisc, les impôts de l'année prochaine. La messe est dite. Dans une économie cassée, où il n'y a pas de demande, pas de revenus, pas de recettes (…), les revenus de l'Etat seront bien plus faibles que ne le prévoit le programme. La croissance sera totalement en berne, il n'y aura plus d'investissements. ».

« Là où il y a eu un clash avec la Troïka et les collègues de l'Eurogroupe, c'est lorsque je leur ai dit "[je] refuse de signer l'accord de prêt, car je ne crois pas qu'on pourra vous rembourser l'argent que vous nous prêtez". Mais ça leur était égal. Ils savaient qu'on ne rembourserait pas (…). Je ne voulais pas signer et faire semblant que ça marcherait. Je leur disais qu'avant de fixer l'excédent primaire, il fallait connaître le taux d'investissement par rapport à l'épargne. C'est de l'économie de première année. Ils ne voulaient même pas en parler ! On est passé d'un niveau stupide à un niveau idiot ».

Revenant sur les termes de l'accord finalement signé en juillet, l'ancien ministre a relevé que l'impératif d'excédent primaire très élevé après 2018 freine les entrepreneurs pour investir aujourd'hui dans l'économie grecque. Ainsi, « adieu la reprise », a-t-il résumé, avant de déclarer : « Les objectifs fixés sont démentiels (…). C'est de la folie ».

« Il faut créer un mouvement pan-européen pour démocratiser notre euro. C'est ce sur quoi je vais travailler », a terminé l'ancien ministre.

X. Bargue (redaction@boursorama.fr)

24 commentaires

  • 01 octobre 11:30

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