
Le Premier ministre britannique Keir Starmer en visite dans les West Midlands
par Alistair Smout, Andrew MacAskill et Andrea Shalal
WASHINGTON/LONDRES (Reuters) -Le président américain Donald Trump et le Premier ministre britannique Keir Starmer ont annoncé jeudi un accord commercial majeur, avec un accès réciproque élargi à leurs marchés agricoles, dans le cadre duquel les droits de douane de 10% imposés par les Etats-Unis vont toutefois rester en vigueur pour nombre de produits britanniques.
Cet accord est le premier dévoilé par Washington depuis que Donald Trump a décidé d'un éventail de droits de douane élevés contre les principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis, provoquant une guerre commerciale mondiale que le président américain entend apaiser, au bénéfice de son pays, en concluant de multiples pactes.
L'annonce a été effectuée par Donald Trump lors d'un événement organisé dans le Bureau ovale de la Maison blanche auquel Keir Starmer a participé par conférence téléphonique, se réjouissant d'une journée "historique".
Le président américain a écarté l'idée que cet accord puisse servir de base aux autres négociations commerciales menées par Washington, déclarant aux journalistes que Londres a "réalisé un bon accord" mais que de nombreux autres pays pourraient devoir continuer de verser des droits de douane élevés du fait de leur important excédent commercial avec les Etats-Unis.
Donald Trump avait détaillé en avril des taxes dites réciproques, allant de 10% à 50%, sur les importations en provenance de dizaines de pays, avant de les suspendre pour 90 jours afin, a-t-il dit, de permettre des négociations.
La Maison blanche a aussi fixé des droits de douane de 25% sur l'automobile, sur l'acier et sur l'aluminium importés aux Etats-Unis, tandis que les produits en provenance de Chine sont visés par des droits de douane de 145%.
"UN MARCHÉ CONSIDÉRABLE"
Donald Trump et Keir Starmer ont revendiqué avoir conclu un accord majeur, qui prévoit notamment que les taxes douanières imposées par la Grande-Bretagne sur les produits américains soient réduites à 1,8% contre 5,1% en moyenne actuellement.
"Cela nous ouvre un marché considérable", a déclaré le président américain devant les journalistes.
Saluant une journée "vraiment fantastique, historique", le Premier ministre britannique a déclaré que l'accord permettrait de "dynamiser le commerce entre et à travers nos pays". "En plus de protéger des emplois, il va en créer, en ouvrant les accès au marché", a ajouté Keir Starmer.
Alors que la politique commerciale déroutante de Donald Trump a alimenté les craintes d'un regain de l'inflation et d'une récession mondiale, les investisseurs pressent l'administration américaine de signer des accords commerciaux pour apaiser l'escalade des droits de douane.
Le défi le plus important de Washington réside toutefois dans ce qui est devenu de facto un embargo commercial avec la Chine, alors que Pékin a imposé des droits de douane de 125% sur les produits américains en réponse aux taxes de 145% fixées par les Etats-Unis. Représentants américains et chinois doivent prendre part samedi à Genève à de premières discussions.
Donald Trump a dit jeudi s'attendre à ce que la réunion entre les deux plus grandes puissances économiques mondiales donne lieu d'emblée à des avancées importantes, ajoutant avoir la certitude que les droits de douane mutuels seraient réduits.
Pour Londres, la question des droits de douane a été une pression supplémentaire alors que l'économie britannique peine à croître. Jaguar Land Rover a annoncé avoir suspendu pour un mois ses livraisons vers les Etats-Unis, tandis que le gouvernement britannique a été contraint de prendre le contrôle de British Steel pour que le groupe ne cesse pas ses opérations.
PREMIER PAS
Le gouvernement Starmer s'est évertué depuis le Brexit à nouer de nouvelles relations commerciales avec les Etats-Unis, l'Union européenne et la Chine, en tentant d'éviter un rapprochement trop important à même de fâcher l'un d'entre eux. Londres a par ailleurs conclu cette semaine un accord de libre-échange avec l'Inde.
L'ambassadeur britannique aux Etats-Unis a décrit l'accord annoncé jeudi comme étant simplement un premier pas dans les efforts des deux pays pour réduire les droits de douane et les barrières non-tarifaires. "Ce n'est pas une photo définitive", a dit Peter Mandelson. "C'est un film, qui se poursuit".
D'après un communiqué du gouvernement britannique, l'accord prévoit que les droits de douane américains sur les voitures britanniques vont être réduits à 10%, contre 27,5% actuellement, avec une limite de 100.000 véhicules - soit près de la totalité des exportations automobiles de la Grande-Bretagne vers les Etats-Unis l'an dernier.
Par ailleurs, les taxes américaines sur l'acier britannique vont être levées, de même que les droits de douane britanniques sur l'ethanol américain - jusqu'à présent de 19%. Washington et Londres sont convenus également d'un nouvel accès réciproque à leurs marchés pour le boeuf, sans que les normes britanniques sur les importations alimentaires ne soient modifiées.
La taxe prélevée par Londres sur les entreprises du numérique, à 2% de leurs revenus britanniques, restera en place.
S'exprimant au côté de Donald Trump dans le Bureau ovale, le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick, a déclaré que Londres devrait annoncer sous peu l'acquisition d'appareils Boeing pour une valeur totale de 10 milliards de dollars. En contrepartie, a-t-il ajouté, les Etats-Unis vont exempter les moteurs britanniques Rolls-Royce de droits de douane.
L'accord entre les deux pays va générer 5 milliards de dollars de nouvelles opportunités annuelles à l'export pour les producteurs américains, a dit Howard Lutnick, tandis que les droits de douane qui resteront en vigueur permettront d'engranger quelque 6 milliards de dollars annuels de nouveaux revenus pour les Etats-Unis.
Donald Trump a fait savoir que les taxes dites "plancher" de 10% resteraient en vigueur et que d'autres pays pourraient être soumis à un pourcentage plus important même s'ils venaient à négocier également un accord avec Washington.
(Alistair Smout, Andrew MacAskill et Andrea Shalal, avec la contribution de James Davey et Paul Sandle; version française Jean Terzian)
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