par Philip Blenkinsop
La Commission européenne soumet formellement mercredi pour approbation l'accord commercial entre l'Union européenne et le marché commun sud-américain (Mercosur), finalisé en décembre dernier.
Le Parlement et les Etats membres du bloc doivent se prononcer sur le texte, qui suscite l'opposition de plusieurs pays au premier rang desquels la France.
Voici les principales mesures de l'accord et ce qu'en disent partisans et détracteurs.
MOINS DE DROITS DE DOUANE, DES QUOTAS AGRICOLES ÉLARGIS
Le texte prévoit que le bloc sud-américain supprime les droits de douane sur 91% des produits en provenance de l'UE, notamment sur les automobiles actuellement taxées à 35%, dans un délai de 15 ans. De son côté, l'UE doit progressivement retirer les droits de douane sur 92% des exportations du Mercosur.
Certains produits européens comme le vin, visé actuellement par des taxes douanières de 17%, ou les spiritueux (taxes comprises entre 20% et 35%), ne seront plus soumis à des droits de douane dans les pays du Mercosur.
S'agissant des produits agricoles les plus sensibles, l'UE accepte d'accroître les quotas, avec 99.000 tonnes métriques supplémentaires de boeuf en provenance du Mercosur. En échange, le marché commun sud-américain doit accorder un quota de 30.000 tonnes de fromage européen libres de toutes taxes douanières.
Des quotas sont également prévus pour la volaille, le porc, le sucre ou encore le riz européens, de même que pour les poudres de lait venues du Mercosur.
Par ailleurs, le texte spécifie 350 appellations géographiques afin de protéger certaines spécialités culinaires de l'UE, comme le parmesan.
CE QUE DISENT LES PARTISANS DE L'ACCORD
La Commission européenne et les pays favorables à l'accord, comme l'Allemagne et l'Espagne, mettent en avant un moyen de s'affranchir de la dépendance à l'égard de la Chine, principalement pour les minerais rares, et de compenser l'impact des droits de douane imposés par le président américain Donald Trump.
Bruxelles présente l'accord avec le Mercosur comme le plus important jamais scellé par l'UE pour supprimer des barrières tarifaires, citant 4 milliards d'euros annuels de taxes douanières en moins pour les exportations européennes, et estime l'accord indispensable aux efforts du bloc pour diversifier ses liens commerciaux.
L'exécutif européen voit également une occasion pour l'UE de bénéficier d'avantages en se positionnant dès à présent comme partenaire privilégié du Mercosur, dont le nombre d'accords commerciaux est pour l'heure limité. Les entreprises européennes seront en mesure de se porter candidates pour des contrats publics dans le bloc sud-américain dans les mêmes conditions que les firmes locales - une proposition inédite dans les accords commerciaux conclus jusqu'alors par le Mercosur.
Les pays européens soutenant l'accord soulignent par ailleurs que les quantités supplémentaires de boeuf et de volaille acheminées vers l'UE représentent uniquement 1,6% et 1,4% de la consommation de ces produits en Europe. Le fait que le bloc importe déjà quelque 200.000 tonnes de boeuf sud-américain par an est selon eux la preuve que le Mercosur répond aux normes européennes.
CE QUE DISENT LES DÉTRACTEURS DE L'ACCORD
L'ONG Les Amis de la Terre dénonce un accord "destructeur" pour l'environnement, prévenant qu'il engendrerait une déforestation accrue, notamment en Amazonie, du fait des exportations supplémentaires de produits agricoles et de matières premières qu'effectuerait le Mercosur. Elle avertit également des risques pour les droits humains dans la région.
La France, principal producteur européen de boeuf dont le secteur pourrait être menacé par des importations accrues en provenance du Mercosur, a répété qu'elle approuverait l'accord commercial uniquement si celui-ci "préserve les intérêts" des agriculteurs français et européens.
L'Italie et la Pologne ont également exprimé des réserves.
Ensemble, ces trois pays pourraient bloquer l'accord.
Les agriculteurs européens ont régulièrement manifesté pour protester contre l'accord, qui ouvre selon eux la voie à l'importation à bas coût de marchandises sud-américaines - notamment le boeuf - ne répondant pas aux normes environnementales et sanitaires de l'UE. La Commission européenne a déclaré que les normes ne seront pas assouplies.
Si le texte prévoit des engagements en matière environnementale, dont la promesse d'éviter une déforestation supplémentaire après 2030, des groupes de défense de l'environnement déplorent l'absence de mesures exécutoires.
(Philip Blenkinsop; version française Jean Terzian)
0 commentaire
Vous devez être membre pour ajouter un commentaire.
Vous êtes déjà membre ? Connectez-vous
Pas encore membre ? Devenez membre gratuitement
Signaler le commentaire
Fermer