(AOF) - Affichant un des plus forts replis du CAC 40, Pernod Ricard (-0,88% à 76,22 euros) recule après la publication de deux notes d'analystes qui anticipent des perspectives défavorables sur l'exercice 2025-2026 pour le groupe de vins et de spiritueux. Oddo BHF maintient sa recommandation à Neutre sur Pernod Ricard, avec un objectif de cours abaissé à 85 euros, contre 95 euros précédemment. "Le momentum est très fragile et ne cesse de glisser trimestre après trimestre avec des espoirs de redressement repoussés depuis plusieurs mois", souligne le broker pour justifier sa décision.
"L'un des seuls signaux positifs reste le redressement du travel retail en Asie (inférieur à 3% du CA groupe) après deux exercices très difficiles. Mais la demande aux Etats-Unis et en Chine ne montre pas de signes de redressement pour ne pas dire que les tendances récentes sont plutôt en faveur d'une dégradation. Les vents contraires sont trop forts à ce stade pour envisager le redressement ambitieux attendu sur le second semestre par le management. Les objectifs pour l'exercice 2025-2026 sont à risques et le bas de la guidance moyen terme (+3-6% de croissance organique) nous semble également questionnable", poursuit Oddo BHF.
De son côté, Jefferies reste à l'Achat et a aussi abaissé son objectif sur le titre du groupe français des vins et des spiritueux de 120 à 110 euros. "Nous prévoyons que les ventes organiques du groupe au deuxième trimestre (-5,4%) seront moins mauvaises que celles du premier trimestre (-7,3%). La dynamique devrait se renforcer au second semestre face à des bases de comparaison plus faciles et avec la reprise du travel retail (commerce de voyage). Toutefois, nous abaissons nos prévisions de croissance organique des ventes et de l'Ebit pour l'exercice à -4,2% et -6,3% (contre -2,7% / -2,3% précédemment) afin de refléter la persistance d'un environnement extérieur atone".
"À mesure que la confiance dans la reprise s'accentuera, nous prévoyons un rerating (une réévaluation) du titre", précise ensuite ce bureau d'études.
Des revenus trimestriels impactés par un effet de change négatif
En octobre dernier, Pernod Ricard avait dévoilé ses ventes du premier trimestre de l'exercice 2025/2026. Sur cette période, elles ont dépassé les attentes selon Invest Securities, en ressortant à 2,384 milliards d'euros, contre un consensus de 2,35 milliards d'euros. Impactées encore par le ralentissement de son activité en Chine (-27%) et aux États-Unis (-16%), elles se sont repliées sur ce trimestre de 7,6% en organique et de 14,3% en publié.
Les revenus du numéro deux mondial des vins et spiritueux ont été impactés par un effet de change négatif de 143 millions d'euros, principalement dû au dollar américain, à la roupie indienne, à la lire turque, et à l'impact du périmètre négatif de 54 millions d'euros, principalement lié à la cession des vins.
Il y a deux mois, en parallèle de la publication de ses ventes au premier trimestre de son exercice 2025/2026, Pernod Ricard a confirmé ses objectifs sur cette période. Cet exercice sera "une année de transition avec une amélioration des tendances en chiffre d'affaires organique, se matérialisant au deuxième semestre", avait déclaré le groupe de vins et de spiritueux.
Il vise toujours à préserver sa marge opérationnelle organique autant que possible, notamment grâce à un strict contrôle des coûts et à l'exécution de son programme 2026-2029 d'efficacités opérationnelles pour un montant de 1 milliard d'euros.
Pernod Ricard souhaite continuer à délivrer une forte génération de cash, avec des investissements stratégiques inférieurs à 900 millions d'euros, une optimisation du besoin en fonds de roulement, et une amélioration de la conversion cash comparée à 2024/2025.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Points clés
- Numéro 2 mondial, derrière Diageo, des vins et spiritueux, né en 1975 de la fusion entre Pernod, fondé en 1805, et Ricard, en 1932 ;
- Chiffre d’affaires de 10,6 Mds€ généré aux 2/3 par les 12 marques stratégiques internationales et réparti entre l’Asie-Pacifique pour 42% dont la Chine pour 8% et l’Inde pour 13%, l’Europe pour 29% et les Amérique pour 29%, dont les Etats-Unis les pour 19%, puis le « travel retail » ;
- Fortes positions dans les alcools blancs, rhums et anisés (n° 1 mondial), les whiskies et liqueurs (n° 2), les cognacs, brandies et amers (n° 3) ;
- Ambition de forte croissance des revenus et des marges à partir de l’identification de 4 accélérateurs -positionnement unique par marque, services premium et luxes accélération digitale- et un outil -La Conviviality Platform d’optimisation du potentiel des marques ;
- Capital détenu à 15 % (30% environ des droits de vote) par la famille fondatrice, devant les salariés (2,3 % et 1,77%) et le groupe Bruxelles-Lambert (6,7% et 12%), Alexandre Ricard étant président-directeur général du conseil de 14 administrateurs.
Enjeux
- Agilité du modèle d’affaires, « Fit for future » :
- nouvelle simplification de l’organisation : 2 entités « fonctions globales’ et « marques globales » au service de 10 entités géographiques,
- recentrage du portefeuille sur le premium, notamment des marques dites « Prestige » après les cessions des vins stratégiques et des marques Finlande, puis Imperial Blue, Clontarf et Knappogue Castle,
- distribution par un réseau propre dont une unité opérationnelle d’e-commerce (The Whisky Exchange, Drinks&Co et Bodeboca),
- face au recul des ventes, focus sur la reprise des ventes via les Key Digital Programs, les partenariats et le maintien des investissements publi-promotionnels à 16% des revenus, avec focus sur les Etats-Unis,
- grande discipline sur les coûts, avec 900 M€ d’économies 2025/26, afin de maintenir le taux de marge opérationnelle et diminution des besoins en fonds de roulement,
- regroupement dans un Hub unique de l’innovation (hors les sites « ready to drink » du champagne et du prestige), approche « Consumer insights » d’anticipation des tendances, expérimentation TLO -test, learn, optimize;
- Stratégie environnementale « S&R roadmap » visant la neutralité carbone en 2050 :
- point d’étape 2030 : zéro émission nette de CO2 pour les opérations propres,
- préservation des 350 terroirs par agriculture régénératrice, partenariats avec + 5 000 agriculteurs, maintien de la biodiversité et réutilisation des eaux,
- économie circulaire « écoSPIRITS » (zéro déchet en décharge, 100 % d’électricité renouvelable sur les sites de production…),
- emprunts et facilités de crédits verts ;
- Structure financière maîtrisée : face à 16,2 Mds€ de capitaux propres, 10,7 Mds€ d’une dette nette abaissée donnant un effet de levier de 3,3, l’activité générant un autofinancement libre de 1,1 Md€.
Défis
- Forte saisonnalité : 2/3 de l'activité réalisé au 1er semestre (juillet-décembre dont 1/4 en décembre) et impact très négatif des parités de change (euro/livre turque, peso argentin et roupie indienne) sur le résultat net;
- Sensibilité aux droits de douane instaurés aux Etats-Unis et en Chine, avec impact estimé autour de 80 M€ ;
- Confirmation d’une inversion de la tendance baissière au 2nd semestre de l’exercice en cours ;
- Après un repli de 5,5 % des ventes et de 8 % du bénéfice par action en 2024/25, objectif pour l’exercice de transition 2025/26 d’un maintien de la marge opérationnelle ;
- Anticipations 2026/27 à 2028/29 revues à la baisse ; croissance du chiffre d’affaires entre 3 % et 6 %, progression de la marge opérationnelle organique grâce aux mesures d’efficacité d’un montant total de 1 Md€, investissements stratégiques à moins de 1 Md€ ;
- Dividende 2024/25 stable pour la 3ème année consécutive à 4,7 € dans le cadre d’une distribution autour de 10 %.

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