par Lewis Krauskopf et Saqib Iqbal Ahmed
Face à une élection présidentielle américaine qui s'annonce très serrée, certains investisseurs se préparent à un résultat incertain, voire contesté, qui pourrait mettre à mal la performance positive des marchés actions cette année.
À moins d'un mois du scrutin, les sondages donnent la candidate démocrate Kamala Harris et son rival républicain Donald Trump au coude à coude. D'après un sondage Reuters/Ipsos publié mardi, Kamala Harris est crédité de 46% des intentions de vote devant Donald Trump, à 43%.
Un résultat serré qui pourrait mener à une contestation, comme cela a été le cas en 2020 lors de la défaite de Donald Trump face au président Joe Biden.
"Les élections seront très serrées. Il va de soi que la probabilité d'un conflit quelconque est plus élevée que la moyenne", estime Walter Todd, directeur des investissements chez Greenwood Capital, qui s'attend à ce que les investisseurs vendent en masse si le résultat demeure incertain pendant plusieurs jours.
"Les marchés n'aiment pas l'incertitude, et ils n'aimeraient certainement pas que nous ne sachions pas qui est le président des États-Unis un jour ou deux après l'élection".
Pour l'instant, l'incertitude politique ne semble toutefois pas éroder l'enthousiasme du marché actions, la résilience de l'économie américaine ayant permis au S&P 500 d'atteindre des sommets. L'indice de référence de la Bourse de New York a progressé de 21% depuis le début de l'année.
Cela ne signifie pas pour autant que les investisseurs se désintéressent du scrutin du 5 novembre. L'indice de volatilité Cboe .VIX , souvent considéré comme l'indice de peur des marchés boursiers, a augmenté d'environ six points depuis le mois de septembre et s'élève à présent à 20,9, un niveau généralement associé à des anticipations modérées ou élevées de turbulences sur le marché. Selon les investisseurs, cette hausse est imputable à l'élection présidentielle américaine imminente.
Les marchés d'options reflètent également les préoccupations accrues concernant le risque de "cygne noir", un évènement extrême peu probable qui provoquerait un choc de grande ampleur sur les marchés. L'indice Nations TailDex .TDEX , qui mesure ce risque, a récemment atteint son niveau le plus élevé depuis un mois.
Pour Michael Purves, directeur général de Tallbacken Capital Advisers, les investisseurs se focalisent trop sur les jours précédent et suivant le vote alors qu'une élection contestée pourrait secouer les marchés durant plusieurs semaines.
"Ce n'est pas tant le résultat qui compte que le risque potentiel du lendemain, si l'élection n'est pas considérée comme valide par une grande partie de la population", a-t-il déclaré. "Pour moi, il s'agit là d'un risque réel (...) un résultat litigieux, où le marché boursier se dégonflera probablement".
RALLYE POST-ÉLECTORAL
Lors de la tentative de Donald Trump de renverser le résultat de l'élection de 2020, les marchés ont à peine réagi. Les indices actions américains se sont redressés dès quelques jours après l'élection, alors même que Joe Biden n'a officiellement été déclaré vainqueur que le week-end suivant.
Toutefois, les investisseurs pourraient se montrer moins confiants cette fois-ci, en particulier si la contestation par l'un des deux partis du résultat gagne du terrain auprès de parlementaires ou de responsables électoraux dans les "swing states", les Etats clés susceptibles de faire basculer le scrutin.
Cela fait plusieurs mois que Donald Trump et ses alliés menacent de contester le résultat en cas de défaite, affirmant à plusieurs reprises craindre qu'un grand nombre de personnes n'ayant pas la nationalité américaine ne se présentent aux urnes alors qu'elles n'en ont pas le droit. Des études ont néanmoins démontré que ces votes illégaux sont extrêmement rares.
En 2000, les marchés ont vacillé alors que l'incertitude a régné pendant plus d'un mois pour départager George W. Bush et Al Gore, ce dernier ayant contesté les résultats en Floride.
Entre le jour de l'élection et la défaite reconnue d'Al Gore à la mi-décembre, l'indice S&P a chuté de 5%, plombé également par les inquiétudes autour des valeurs technologiques et de l'état de santé de la deuxième économie mondiale. Entre novembre et décembre 2000, l'indice a perdu 7,6%.
Une telle volatilité pourrait ternir l'enthousiasme qui gagne généralement les marchés lors des périodes électorales. Depuis 1952, l'indice S&P 500 .SPX a gagné en moyenne 3,3% au cours des deux mois précédent une élection, et progressé dans 78% des cas, selon Keith Lerner, co-responsable des investissements chez Truist Advisory Services.
Face au risque de vote contesté, des stratégies de couverture existent pour protéger les portefeuilles. Reste à attendre que l'incertitude se dissipe.
"Les élections créent de l'incertitude mais les résultats électoraux finissent par diminuer et réduire cette incertitude", observe Stephanie Aliaga, stratège pour les marchés mondiaux chez JPMorgan Asset Management. "En fin de compte, on se retrouve avec un élan voire un rallye post-électoral, parce que l'incertitude est dissipée".
(Rédigé par Lewis Krauskopf et Saqib Iqbal Ahmed; version française Pauline Foret, édité par Blandine Hénault)
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