par Lewis Krauskopf
L'optimisme quant au potentiel de l'intelligence artificielle (IA) a récemment contribué à propulser la Bourse de New York vers des records, mais les investisseurs recherchent les points faibles qui pourraient compliquer le parcours de ce secteur en plein essor et ont identifié certains risques à prendre en compte.
L'enthousiasme pour le potentiel de cette technologie est un sujet dominant à Wall Street depuis le lancement du robot conversationnel ChatGPT en novembre 2022. Citigroup estime même que près de 50% de la capitalisation boursière totale du S&P 500, soit environ 57.000 milliards de dollars, est "fortement" ou "moyennement" exposée à l'IA.
L'indice de référence S&P 500 .SPX a pris environ 13% depuis le début de l'année, tandis que le Nasdaq Composite, à forte composante technologique .IXIC a grimpé de 17%.
"Une grande partie de ce qui soutient les marchés est directement ou indirectement lié à ce secteur", observe Yung-Yu Ma, stratège chez PNC Financial Services Group.
Les actions technologiques et liées à l'IA ont toutefois perdu du terrain à plusieurs reprises cette année.
L'apparition en début d'année de Deepseek, un modèle chinois d'IA à faible coût, a provoqué une onde de choc sur les valeurs technologiques et soulevé des doutes quant aux investissements massifs prévus dans le secteur. En août, des questions similaires ont été soulevées, affectant à nouveau brièvement les valeurs technologiques, mais le secteur s'est remis de ces revers et a prospéré depuis lors.
"Il y a là une opportunité énorme, mais tout dépend de ce qui est pris en compte et de ce qui ne l'est pas", note Steve Lowe, stratège chez Thrivent Financial. "La croissance est fortement intégrée aux cours, et c'est l'une des préoccupations, car de nombreux risques subsistent et pourraient déjouer les attentes", dit-il.
Si certains acteurs du marché qui signalent des risques restent optimistes, l'indice S&P 500 .SPX entamant sa quatrième année de tendance haussière, les investisseurs ont identifié des signes d'avertissement à surveiller alors que les entreprises technologiques et d'autres grands groupes américains publieront leurs résultats trimestriels dans les jours à venir.
LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT
Compte tenu des investissement considérables nécessaires à la construction d'infrastructures liées aux applications d'IA, les investisseurs analyseront notamment le rythme des dépenses et le retour sur investissement, ainsi que le potentiel de ces dépenses à éroder la rentabilité des entreprises.
Les dépenses d'investissement des principaux noms du secteur du "cloud" et de l'intelligence artificielle, parmi lesquelles Microsoft <MSFT. O>, Amazon AMZN.O , Alphabet GOOGL.O , Meta Platforms META.O et Oracle ORCL.N , devraient presque doubler entre 2024 et 2027 pour atteindre 500 milliards de dollars par an, selon Barclays.
Ces entreprises génèrent d'énormes liquidités mais il est important de surveiller si elles "dépensent plus vite que leur taux de croissance et réduisent leurs marges de trésorerie disponibles", souligne Michael Arone, analyste chez State Street Investment Management.
Les investisseurs craignent également un ralentissement inattendu des dépenses technologiques, compte tenu de leur importance pour soutenir l'expansion de l'IA.
"Le plus grand risque n'est pas d'investir trop ; c'est de ne pas investir suffisamment en ce moment", estime Garrett Melson, stratège de portefeuille chez Natixis Investment Managers Solutions.
Il pourrait y avoir des turbulences en raison d'accords "circulaires" potentiels impliquant des sociétés d'IA ayant des intérêts communs, à l'image de l'annonce récente du géant Nvidia
NVDA.O d'investir jusqu'à 100 milliards de dollars dans OpenAI.
Si les relations d'interdépendance au sein de l'écosystème de l'IA "ne semblent pas inquiétantes... ces liens financiers et opérationnels étroits présentent un risque systémique important", a écrit cette semaine dans une note Irene Tunkel, responsable de la stratégique pour les actions américaines chez BCA Research.
Les groupes technologiques disposent d'importantes ressources financières pour soutenir leurs dépenses en matière d'IA et conclure des accords, mais un recours accru à l'endettement pourrait également susciter des interrogations.
"Lorsque vous voyez ces annonces importantes, vous voulez que leur financement provienne des flux de trésorerie, et non d'emprunts ou d'augmentations de capital", note Anastacio Teodoro, gestionnaire de portefeuille senior chez Federated Hermes.
LE RETOUR SUR INVESTISSEMENT
Les analystes de Barclays se montrent optimistes quant à l'évolution du secteur au cours des 12 à 18 prochains mois, mais restent prudents face aux signes indiquant que les infrastructures énergétiques pourraient ne pas être suffisantes pour soutenir les centres de données et le développement lié à l'IA.
"La question de l'énergie est probablement l'un des facteurs de blocage les plus importants auxquels vous devriez prêter attention", a pointé Venu Krishna, responsable de la stratégie actions américaines chez Barclays, lors d'une conférence récente avec des journalistes.
Les investisseurs seront également attentifs aux signaux indiquant que la demande diminue ou que les investissements massifs ne portent pas les fruits escomptés.
Patrick Ryan, stratège chez Madison Investments, a déclaré qu'il n'y avait pas encore beaucoup de signes tangibles de gains significatifs en termes de revenus et de productivité découlant de l'IA.
"Si vous en arrivez au point où l'on se demande si tout cet investissement va vraiment porter ses fruits... cela représentera un risque considérable", relève-t-il.
(Rédigé par Lewis Krauskopf ; version française Diana Mandia, édité par Blandine Hénault)
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