
La croissance enviable du Royaume-Uni se fait encore grâce à un fort déficit public qui devrait bientôt être interdit.
Toujours pénalisé par un déficit public très élevé, le Royaume-Uni souhaite à son tour inscrire dans ses principes une « règle d'or » consistant à interdire les déficits budgétaires. À ceci près que l'interdiction sera seulement effective « hors périodes de crises ».
« En dehors des périodes de crise, l'Etat britannique devra dégager un excédent budgétaire », annonçaient jeudi Les Echos , qui poursuivaient : « comment sera définie une période "normale" ? Cette tâche incombera à l'Office for Budget Responsability », une instance indépendante placée auprès du gouvernement dont le rôle est proche de celui du Haut Conseil des finances publiques en France ».
La même source rappelait le défi que peut représenter l'instauration de cette interdiction alors que le Royaume-Uni n'a connu que sept années d'excédent budgétaire au cours des cinquante dernières années. D'où le scepticisme de certains analystes vis-à-vis de l'adoption d'une telle mesure. Pour rappel, en 2014, le Royaume-Uni a accusé un fort déficit budgétaire de 5% de son PIB, le chiffre le plus élevé d'Europe.
Décision surprenante
On pourra s'étonner de voir le Royaume-Uni s'apprêter à adopter cette mesure après l'avoir précédemment rejetée quelques années plus tôt. Le principe de la « règle d'or » avait par ailleurs fait naître d'importants débats en Europe continentale quant à son efficacité réelle.
De même, cette mesure inspirée de la « rigueur allemande » correspond assez peu aux principes économiques britanniques, habituellement favorables à une certaine flexibilité. Certes, les premiers principes de « règle d'or budgétaire » avaient été adoptés par les très libéraux Ronald Reagan et Margaret Thatcher dans les années 1980. Mais à l'époque, le but de cette règle était surtout de réduire le rôle de l'Etat dans les interactions économiques, et non de ralentir spécifiquement l'endettement souverain.
Le Royaume-Uni met en effet habituellement la croissance économique avant la rigueur. Pour soutenir l'activité dans l'après-crise de 2008, le Royaume-Uni n'avait pas hésité à creuser son déficit budgétaire. En 2010, le déficit annuel britannique a ainsi dépassé 10% de son PIB, permettant en contrepartie au pays de renouer avec une croissance plutôt élevée (+2,6% en 2014).
Si le Royaume-Uni a pu se permettre une telle dérogation face à l'orthodoxie budgétaire européenne ces dernières années, c'est aussi parce que la dette britannique restait relativement peu élevée. Or, la dette britannique commence à gonfler rapidement à cause des déficits chroniques. En 2014, cette dette a atteint environ 80% du PIB britannique, un ratio dépassant largement les 60% de Maastricht, tout en restant moins élevé qu'en France où la dette approche les 100% du PIB, sans parler du cas italien voire grec. Quoi qu'il en soit, c'est sans doute pour éviter d'être confronté un jour ou l'autre aux mêmes problématiques d'excès de dettes de ces pays que le Royaume-Uni est en passe de limiter ses capacités d'endettement public.
X. Bargue
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