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L'action Société Générale à la traîne malgré le plan de redressement de son DG Slawomir Krupa
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Les analystes s'interrogent sur l'amélioration de la marge nette d’intérêt de Société Générale
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Faiblesse des marges dans la banque de détail en France éloigne les speculations de rachat
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par Mathieu Rosemain
Le directeur général de Société Générale SOGN.PA Slawomir Krupa s'apprête à resserrer encore davantage la vis sur les coûts alors qu'il poursuit une stratégie de redressement annoncée il y a un an qui ne porte pas ses fruits pour relancer le cours de l'action de la banque française.
Société Générale, qui est l’une des banques cotées les moins chères d’Europe, se négocie à moins de 30% de sa valeur comptable malgré des ambitions de réduction de coûts de 1,7 milliard d'euros d'ici 2026 et plus de 2,7 milliards d'euros de ventes d'actifs.
Outre la vente d’une participation dans ses activités en Guinée annoncée vendredi, la banque a par exemple engrangé 1,2 milliard de dollars en cédant ses activités de financement d'équipements professionnels en avril.
Société Générale resserre désormais les budgets dans toutes les divisions et les cadres intermédiaires sont encouragés à aller plus loin que la simple atteinte de leurs objectifs de réduction des coûts, rapporte une source proche du dossier.
Les voyages d'affaires sont notamment limités et l'offre de services informatiques a été réduite, précise la même source, s'exprimant sous couvert d'anonymat car elle n'est pas autorisée à s'exprimer publiquement.
Société Générale a refusé de commenter cet article.
Romain Burnand, président de Moneta Asset Management, qui détient une participation de 0,46% dans la banque selon les données LSEG, affirme que les mesures de réduction des coûts commencent à se traduire en résultats et parie sur une amélioration des performances au troisième trimestre.
"Il y a quand même eu des déceptions, je dirais, réelles sur les résultats. Mais c’est une valorisation qui nous paraît très dépréciée et la banque a des atouts", explique Romain Burnand, dont la participation dans Société Générale représente environ 4% de son fonds principal de 1,8 milliard d'euros.
Slawomir Krupa a choisi de renforcer les réserves de capital de la banque plutôt que de viser des rendements rapides ou des ventes d'actifs transformatrices. L'accord avec la Guinée aura un impact positif d'environ 2 points de base sur le ratio de fonds propres de base de la banque (CET1), une mesure clé de solidité financière.
Le directeur général a anéanti les espoirs de rendements plus élevés des investisseurs lorsqu'il a reporté d'un an un objectif de rentabilité clé, visant un rendement des capitaux propres corporels compris entre 9% et 10% en 2026, tout en limitant le ratio de distribution à 40%-50%.
"Je ne dirais pas qu'ils ne sont pas en bonne voie pour atteindre leurs objectifs, mais nous ne pourrons savoir s’ils y parviendront que lorsque nous commencerons à voir une inflexion significative des bénéfices, en particulier dans le secteur de la banque de détail en France. Et jusqu'à présent, cela ne s'est pas produit", explique Flora Bocahut, analyste chez Barclays.
"Ce n'est pas un problème d'ambition", juge Olivier Cassé, responsable des stratégies actions européennes de Sycomore AM, qui détient 0,4% du capital de SocGen, selon les données de LSEG. "Le nouveau DG a voulu s'attaquer à la question du capital".
Cela signifie une baisse des rachats d'actions et des dividendes, ce qui pèse sur le cours de l'action. L'action Société Générale a clôturé à 22,9 euros jeudi, en baisse par rapport au niveau précédant l'annonce de la revue stratégique en septembre dernier où le cours évoluait environ à 26 euros.
BANQUE DE DETAIL EN FRANCE
Une autre inquiétude concerne les activités de banque de détail de Société Générale en France, où l’établissement a abaissé un objectif clé en août, éclipsant ses bénéfices et grevant le cours de l’action.
Les banques françaises, dont Société Générale, n'ont pas profité autant de la hausse des taux d'intérêt en raison du coût élevé des dépôts en France. Société Générale a également souffert d'une politique de couverture des taux d'intérêt mal calculée.
Le revenu net d'intérêt de la banque, soit la différence entre ce qu'une banque gagne sur les prêts et ce qu'elle paie pour les dépôts, a été touché, l'incitant à réduire son objectif précédemment fixé.
"Ils n'ont pas su nous rassurer sur la trajectoire (...) du second semestre et de 2025 sur cette marge d'intérêt", regrette Olivier Cassé.
"L'exécution a été juste, c'est la communication qui a été mauvaise", ajoute Sebastiano Pirro, directeur des investissements du fonds spéculatif Algebris Investments à propos des projets du directeur général. Algebris n'a actuellement aucune participation dans Société Générale, selon les données de LSEG.
Selon lui, les problèmes de Société Générale sont une faible rentabilité et un capital insuffisant pour réduire considérablement les coûts.
SPÉCULATION DE PRISE DE CONTRÔLE
La récente prise de participation de UniCredit CRDI.MI dans Commerzbank CBKG.DE a soutenu les cours de Bourse des banques et amené les analystes à spéculer sur la possibilité que Société Générale devienne une cible.
Deux banquiers d’affaires qui couvrent le secteur européen de la finance ont toutefois rejeté l’hypothèse, évoquant l’exposition de Société Générale aux activités de banque de détail en France aux faibles marges nettes d’intérêts.
Les banquiers ont déclaré qu’une prise de contrôle par ses rivaux BNP Paribas BNPP.PA ou Crédit Agricole CAGR.PA susciterait des vigilances en matière de concurrence et un examen minutieux de la part des autorités françaises sur l’emploi, entre autres obstacles.
(Reportage de Mathieu Rosemain à Paris, avec Tommy Reggiori Wilkes et Sinead Cruise à Londres, version française Bertrand de Meyer, édité par Sophie Louet)
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