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Le cas Peng Shuai lève le voile sur les rouages du contrôle chinois
information fournie par Reuters 23/11/2021 à 16:02

par Gabriel Crossley et Yew Lun Tian

PEKIN, 23 novembre (Reuters) - Le sort de la star chinoise du tennis Peng Shuai a concrétisé pour une grande partie de l'opinion internationale les réalités de la censure en Chine et de la discrétion que s'attachent à cultiver ses hauts dirigeants, à seulement quelques mois des prochains Jeux olympiques d'hiver, qui se dérouleront du 4 au 20 février prochains à Pékin.

La joueuse de 35 ans, ex-numéro un mondiale en double, a soudainement disparu après avoir révélé le 2 novembre sur Weibo (réseau social chinois comparable à Twitter) que l'ancien vice-Premier ministre Zhang Gaoli l'avait contrainte à des relations sexuelles avec lui avant d'entamer une relation discontinue durant plusieurs années.

Ses accusations sur internet ont ensuite été censurées et la jeune femme n'est réapparue en public que dimanche dernier, près de trois semaines plus tard, selon des photos d'un tournoi pékinois diffusées par les organisateurs.

La mécanique bien rodée de la censure a permis d'étouffer le scandale à l'échelle de la Chine en supprimant très rapidement les messages de Peng Shuai et en bloquant toute référence à la championne dans les discussions en ligne, les internautes étant contraints de recourir à des astuces de langage pour contourner le contrôle strict appliqué à l'internet chinois.

Pour les experts, la priorité à Pékin est d'éviter tout embarras ou remise en question du Parti communiste chinois (PCC) et du président Xi Jinping sur la scène domestique, une politique qui ne devrait pas varier même si les contestations internationales à l'égard de la Chine s'accroissent à l'approche des Jeux.

"Depuis plusieurs années maintenant, la Chine a répondu aux critiques internationales soit en fournissant des explications peu convaincantes, soit en ignorant stoïquement les accusations", explique Zhang Ming, professeur de sciences politiques retraité de l'université Renmin.

Alors que les responsables chinois évoquent régulièrement la nécessité de bien relayer les versions chinoises officielles de certains événements sur la scène internationale, "en une seule fois, le cas de Peng a mis en évidence la faillite de cette ambition", explique David Bandurski, de l'organisation de recherche China Media Project, basée à Hong Kong.

"VERSION OFFICIELLE"

Le gouvernement chinois ne s'est pas exprimé à ce sujet mais les efforts de journalistes en vue de médias chinois pour tenter de dissiper les inquiétudes au sujet du sort de la joueuse n'ont pas calmé le concert de protestations internationales.

Ainsi, la publication sur Twitter (mais pas sur les réseaux chinois) de messages relayant un prétendu courriel dans lequel Peng Shuai assurait qu'elle allait bien et qu'elle se reposait simplement chez elle n'a pas convaincu grand monde.

Ces tentatives de Pékin d'imposer une version officielle de l'histoire ont heurté l'opinion internationale, et le cas de Peng Shuai a donné de nouveaux arguments aux partisans d'un boycott des JO de Pékin, qui dénoncent la situation des droits humains dans le pays, en particulier à l'égard de la minorité musulmane ouïghoure dans la région chinoise du Xinjiang.

Le président Joe Biden a annoncé la semaine dernière que les Etats-Unis envisageaient un boycott diplomatique des Jeux olympiques de Pékin - qui signifie qu'aucune délégation officielle américaine n'assisterait à la cérémonie d'ouverture des Jeux d'hiver 2022.

Le journal d'Etat chinois Global Times a publié lundi un éditorial accusant des "forces anti-chinoises" de tenter de générer des troubles à l'approche des Jeux et précisant que cela "ne valait pas la peine" pour la Chine de dépenser de l'énergie à ce sujet, sans mentionner le cas de Peng Shuai.

Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a quant à lui invité mardi "certaines personnes" à cesser "le battage médiatique malveillant" et la "politisation" du sort de Peng Shuai.

Au-delà du seul cas de Peng Shuai, ce dossier illustre également le culte du secret autour de la classe dirigeante chinoise, dont la vie privée reste largement méconnue du grand public, à l'exception de quelques détails.

Ni le gouvernement chinois ni Zhang Gaoli - désormais retraité - ne se sont exprimés au sujet des accusations lancées par la joueuse.

"Le parti doit le protéger, car c'est l'image du PCC qui est en jeu", explique Jean-Pierre Cabestan, spécialiste de la politique chinoise à l'université baptiste de Hong Kong.

(Reportage Gabriel Crossley et Yew Lun Tian ; version française Myriam Rivet, édité par Blandine Hénault)

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