(AOF) - Renault (+1,15% à 34,70 euros) a annoncé hier soir l’annulation de l’introduction en Bourse d’Ampère, son "pure player" européen du véhicule électrique et du software, envisagée pour le 1er semestre 2024. Le constructeur considère que les conditions de marchés actuelles ne sont pas réunies pour servir au mieux les intérêts du groupe, de ses actionnaires et d'Ampere. Renault invoque également des niveaux de cash-flow plus élevés que prévu. UBS et Kepler Cheuvreux ne sont pas surpris de cette décision, et voient leur scepticisme conforté.
Un contexte plus difficile pour les véhicules électriques
Berenberg rappelle que le marché des véhicules électriques est de plus en plus difficile : la concurrence sur les prix et les produits reste forte, la croissance de la demande s'essouffle et les incertitudes générales concernant les subventions et les valeurs résiduelles n'aident pas à alimenter l'appétit des investisseurs pour les "pure players".
UBS rappelle avoir prévu qu'une IPO "ne contribuerait probablement pas à cristalliser la valeur pour les actionnaires du groupe Renault".
Invest Securities rappelle que cette IPO devait permettre de donner un étalon sur la valorisation de la "pépite" de Renault et que la disparition de ce "catalyseur" réduit "l'intérêt de la séparation du groupe en différentes entités voulue par Luca de Meo".
De son côté, Stifel relève que la dilution pour les actionnaires de Renault pourrait être réduite, voire éliminée : un investissement de Qualcomm est maintenant écarté et l'implication des partenaires de l'alliance Nissan et MMC en tant qu'actionnaires pourrait également être remise en question.
"Une solution organique évite également de distraire la direction à un moment critique pour l'industrie et renforce la crédibilité de la direction en matière d'allocation de capital" a commenté pour sa part Jefferies. Il ajoute que la valorisation actuelle des "pure players" de l'électrique rendait cette introduction en Bourse peu attractive.
Aucun impact sur sur les perspectives financières
Renault souligne que depuis le 1er novembre 2023, sa filiale "opère de manière autonome", avec des "bénéfices opérationnels et industriels" qu'il constate déjà. Le groupe continuera de financer le développement d'Ampere "jusqu'à l'atteinte de l'équilibre financier" attendu en 2025. UBS estime que Renault "devrait pouvoir financer Ampère avec sa trésorerie interne jusqu'en 2025", la consommation de trésorerie d'Ampère sur 2024 et le premier semestre de 2025 ayant été quantifiée à 1,5 milliard d'euros.
Tous les objectifs annoncés lors de la journée investisseurs d'Ampere sont confirmés, et cette décision n'aura "pas d'impact sur les perspectives financières de Renault Group, ni sur sa stratégie d'allocation du capital".
AOF - EN SAVOIR PLUS
Points clés
- Quatrième constructeur automobile mondial créé en 1898 et présent sous les marques Renault, Dacia, LADA, Alpine et Mobilize ;
- Positionnement industriel mondial, avec un chiffre d’affaires de 46,2 Mds€ réalisé pour plus de 50 % hors d’Europe et avec des positions fortes principalement dans les pays suivants : France, Italie, Turquie, Espagne, Belgique-Luxembourg, Roumanie, Maroc et Pologne ;
- Modèle d’affaires : repositionnement sur les véhicules de taille intermédiaire, sur la qualité de l’offre en véhicules électriques ou hybrides et les services flexibles ;
- Capital détenu à 15 % (29,05 % de droits de vote) par l’Etat français, à 15 % par la filiale Nissan, et à3,61 % (5,88 %) par les salariés, le conseil d’administration de 17membres étant présidé par Jean-Dominique Senard, Luca de Meo étant directeur général ;
- Bilan renforcé avec une dette nette réduite à 426 M€, les disponibilités atteignant 15,8 Mds€.
Enjeux
- Stratégie “Renaulution“ en 3 étapes, dont les objectifs seront mis à jour à l’automne 2022 : résurrection jusqu’en 2023 : autonomie des marques, rationalisations des plateformes de 6 à 3, offre “milieu de gamme“ portée à 40 % des revenus contre 15 %, marge opérationnelle de + 3 %, autofinancement libre de 3 Mds€ / rénovation de 2023 à 2025 par le renouvellement des gammes / renaulution : montée en puissance de l’utilisation de l’hydrogène dans les véhicules professionnels avec un objectif de part de marché de 30 % en 2030 ;
- Stratégie d’innovation focalisée sur la connectivité, les services et le véhicule électrique : réseau d’experts, d’innovation labs (Californie, France, Israël), ReKnow Université dédiée à l’électrification, la cybersécurité des données… / partenariats : CEA et les pôles compétitivité Moveo, Sysematic et ID4Car… / projet NeVeOS d’architecture électronique des véhicules / technologie hybride E-TECH et batteries françaises et décarbonées / fonds d’investissement Renault Venture Kapital et Alliance Ventures pour le capital-risque et l’accompagnement de start-up;
- Stratégie environnementale visant la neutralité carbone en 2040 en Europe et en 2050 dans le monde : objectif d’une gamme de véhicules particuliers tous électriques en Europe en 2030 via 23 Mds€ d’investissements d’ici 2027 et 5 plateformes communes / économie circulaire de la mobilité portée par l’usine de Flins ;
- Effet mix produit positif pour le chiffre d’affaires avec le lancement de Arkana, Jogger et Mégane Electric ;
- Vers la filialisation des activités électriques et « software », qui seraient introduites en Bourse, et des activités de traction thermique.
Défis
- Impact du manque de semi-conducteurs : perte de 300 000 véhicules en 2022 ;
- Impact de l’inflation des matières premières compensé par la politique commerciale ;
- Impact de la guerre Russie-Ukraine : perte nette de 2,3 Mds€ des activités abandonnées mais réduction de la dette ;
- Lancement opérationnel de Mobilize, regroupant les services de mobilité, énergie, financement, assurances et maintenance, visant 20 % des ventes en 2030 ;
- Après une stabilité du chiffre d’affaires et un triplement , hors impact russe, du bénéfice net au 1 er semestre, objectifs 2022 révisés en hausse : autofinancement opérationnel de + 1,5 Md€ et marge opérationnelle de + 5 %.
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Un marché français en forme
Le marché automobile français a enregistré son dixième mois consécutif de croissance en octobre 2023 avec 152383 immatriculations de véhicules particuliers neufs (+22% sur un an). Il a progressé de 16,49 % sur les 10 premiers mois de 2023, avec 1,44 million d'immatriculations, quasiment autant qu'en 2022 (1,52 million) mais bien moins que le niveau de 2019 (2,2 millions). Toutefois les indicateurs prévisionnels ne sont pas bons car les nouvelles commandes se sont repliées de 13 % à fin septembre 2023. Le ralentissement des commandes s'expliquerait par l'inflation, la hausse des taux d'intérêt, et une gestion plus prudente de leur trésorerie par les entreprises (la moitié du marché). Si Stellantis (Peugeot, Citroën, Fiat, Opel, Jeep) reste le leader du marché français, avec une part de marché supérieure à 28%, le groupe Renault (Renault, Dacia, Alpine) a bénéficié de belles performances en octobre 2023, avec près de 31% de nouvelles immatriculations supplémentaires sur un an. Le groupe français représente 24,6 % du marché des voitures de particuliers.
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