* Les ETF loués pour leur transparence et leur simplicité * Leur popularité grandit et la gamme s'élargit * Un produit séduisant mais non testé en cas de crise * Certaines variantes éveillent la méfiance des régulateurs par Patrick Vignal PARIS, 10 octobre (Reuters) - Formidable innovation pour les uns, facteur potentiel de risque systémique pour les autres, les fonds indiciels cotés dits ETF (exchange-traded funds) ont bouleversé en quelques années le paysage de la finance et tout indique que leur essor va se poursuivre, non sans soulever quelques inquiétudes pour la stabilité des marchés. Accessibles à peu de frais et séduisants par leur apparente simplicité, les ETF sont, dans leur version la plus basique, des fonds cotés en Bourse et adossés à un indice comme le CAC 40 ou le S&P 500 dont ils ont pour objectif de répliquer la performance. Leur gestion est passive, c'est-à-dire qu'elle se réalise automatiquement, sans intervention humaine. L'encours total de ces "trackers", comme on les appelle encore, atteint presque les 4.500 milliards de dollars, soit un peu moins de deux fois le produit intérieur brut (PIB) de la France, contre 1.500 milliards de dollars en 2011 et moins de 500 milliards en 2005, selon les chiffres du cabinet spécialisé ETFGI. "C'est une croissance extrêmement régulière qui a eu tendance à se maintenir avec la crise de 2008 malgré la hantise des investisseurs pour la nouveauté financière", explique Régis Yancovici, conseiller financier spécialiste des ETF et fondateur d'ETFinances.fr. Depuis 2008, aux Etats-Unis, la gestion active a décollecté 1.000 milliards de dollars pendant que la gestion indicielle collectait 1.400 milliards, ajoute-t-il pour étayer son propos. "En termes de simplicité et de transparence, il n'y a quasiment pas mieux", prolonge Mourtaza Asad-Syed, directeur des investissements et fondateur de Yomoni, une "fintech" qui propose à ses clients des portefeuilles de produits d'épargne investis intégralement en ETF. "C'est un produit facile à appréhender qui permet de se focaliser sur ce qui crée de la valeur à long terme sans se perdre dans les détails." LA PALETTE S'ÉLARGIT Lancés au début des années 1990 aux Etats-Unis par State Street et son SPDR (on prononce spider) S&P 500, les ETF ont fait leur apparition en Europe fin 2000 avec Lyxor, filiale de Société Générale SOGN.PA , et n'ont cessé depuis de s'étendre et de se diversifier. Plus de 200 sociétés de gestion dans le monde en proposent mais le marché reste néanmoins très concentré, les trois leaders (BlackRock BLK.N avec sa plate-forme iShares, Vanguard et State Street), tous américains, en contrôlant près de 70%. L'engouement pour les fonds indiciels est tel que de plus en plus de sociétés spécialisées dans la gestion active comme Candriam, qui a lancé en juin une gamme de cinq ETF sous la marque IndexIQ, ont décidé de s'aventurer dans cet univers. "L'ETF n'est qu'une enveloppe", explique Koen van de Maele, responsable global des solutions d'investissement chez Candriam Investors Group. "C'est un véhicule qui est différent, qui est à la mode et dans l'air du temps. Mais l'important, ce n'est pas l'enveloppe, c'est ce qu'il y a dedans." L'un des reproches souvent faits aux ETF est que la plupart sont pondérés en fonction de la capitalisation boursière des actions qui composent leur panier, et sont donc très exposés à des titres à la valorisation élevée susceptibles de connaître une correction, comme par exemple les valeurs technologiques américaines. Pour y remédier, Candriam et d'autres ont recours à la stratégie dite "smart beta", qui permet de sélectionner les titres en fonction d'autres critères jugés plus fiables comme la taille du bilan, les bénéfices, le chiffre d'affaires ou les flux de trésorerie. La mode des ETF a de beaux jours devant elle et pourrait même connaître un coup d'accélérateur début 2018 avec l'entrée en vigueur de la directive européenne MIF II imposant aux marchés d'instruments financiers davantage de transparence et notamment une justification plus précise de leurs coûts, ce qui n'est pas pour avantager la gestion active. ET EN CAS DE CRISE ? Parfaitement à l'aise dans un marché haussier, l'ETF n'a jamais été testé en période de crise majeure. Un retournement brutal du marché pourrait-il entraîner un vague de rachats immédiats de la part d'investisseurs en ETF, ce qui menacerait de créer un décalage entre la performance des fonds et celle de ses valeurs sous-jacentes ? Souvent posée, la question a besoin d'une crise pour avoir sa réponse mais elle mérite cependant d'être nuancée, fait valoir Koen van de Maele. "Je ne crois pas qu'il faille surestimer le risque systémique lié aux ETF", dit-il. "Les gros volumes sont dans des indices relativement liquides sur lesquels il y a même des contrats à terme". Dès 2011 pourtant, plusieurs régulateurs, dont le Conseil de stabilité financière (FSB), avaient tourné leurs regards vers les ETF, visant particulièrement l'émergence de versions plus complexes dites à réplication synthétique, qui utilisent des "swaps", soit un échange avec un autre acteur financier qui s'engage à "coller" au plus près de l'indice, avec du collatéral en garantie. Si ce type d'ETF est plus avantageux en matière de coûts et d'écarts de suivi, il expose l'investisseur en ETF à un double risque, à la fois sur le collatéral et sur la contrepartie du swap, qui pourrait faire défaut. Théoriques, ces risques n'en rappellent pas moins furieusement ceux à l'origine de la crise financière avec des produits considérés au départ comme transparents et sains qui s'étaient transformés pour devenir opaques et toxiques. "On pointe du doigt ce risque de collatéral sur les ETF mais il n'y a rien dans ce que font les ETF que ne peuvent pas faire les gérants actifs", tempère Régis Yancovici. "Les deux risques pointés du doigt sont les swaps et les prêts de titres, sauf que les volumes sont tels sur les ETF que le contrôle des risques chez Lyxor, Amundi ou Deutsche Bank est certainement mieux suivi que dans les sociétés de gestion de petite taille", ajoute-t-il. A la demande d'investisseurs inquiets des risques, des sociétés de gestion comme Lyxor n'en ont pas moins tendance à réduire la part de leurs ETF synthétiques pour augmenter leur exposition à la réplication physique, rapporte l'expert. BIENVENUE À DISNEYLAND Si les ETF n'ont jamais provoqué pour l'instant d'accident de taille sur les marchés, ils ont cependant connu une petite frayeur, le 24 août 2015, lorsque des fonds indiciels cotés ont été impliqués dans un décrochage brutal de quelques minutes à Wall Street. Le décalage, ce jour-là, de plusieurs ETF, qui se sont mis soudainement à perdre nettement plus que leurs sous-jacents, s'explique par un incident de cotation, à savoir l'absence de mise à disposition des teneurs de marché par la Bourse de New York de prix indicatifs des valeurs avant l'ouverture, explique Régis Yancovici. Un tel événement n'aurait pas pu se produire en Europe en raison d'une réglementation plus stricte, ajoute-t-il. "Le marché américain, c'est Disneyland, il y a tous les produits du monde, le marché est profond, il y a beaucoup d'investisseurs particuliers mais la réglementation est relativement légère et il y aussi beaucoup de trading haute fréquence qui parasite le marché sans apporter de réelle liquidité. Il peut donc y avoir des incidents de cotation", explique Mourtaza Asad-Syed. Si les ETF en tant que tels sont considérés par la plupart des gérants comme des produits fiables, certains mettent tout de même en garde contre l'élargissement de la palette vers des indices de marchés actions exotiques ou des actifs risqués et volatils comme de la dette émergente en monnaie locale ou des paniers de matières premières. L'endettement des investisseurs, leur recherche de la rentabilité à tout prix et la tendance de certains à vendre en panique dès la première alerte sont des facteurs de risque autrement plus importants pour les marchés que les ETF, qui offrent de nombreuses garanties à condition d'être utilisés à bon escient, s'accordent à dire la plupart des experts. "Je me fais quand même un peu de souci sur le nombre d'ETF qui existent", confie Koen van de Maele. "Certains sont très exotiques avec des sous-jacents très peu liquides, surtout dans des ETF avec un effet de levier négatif ou positif vis-à-vis du marché. C'est plus du casino que de l'investissement et là, on va avoir des accidents tôt ou tard, c'est écrit dans le marbre." (édité par Blandine Hénault)
L'essor des ETF se poursuit, non sans craintes
information fournie par Reuters 10/10/2017 à 15:06
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46,800 EUR | Euronext Paris | +0,52% |

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