* Les fonds propres des banques n'impressionnent pas * Le ralentissement économique devrait peser sur les revenus * Les investisseurs réticents à investir en dépit des prix bas * Graphique des tests de l'ABE: https://tmsnrt.rs/2D4c7an * Graphique des marges d'exploitation: https://tmsnrt.rs/2PwqxXA par Sinead Cruise LONDRES, 6 novembre (Reuters) - Les grandes banques européennes ont peut-être passé avec succès les tests de résistance, mais l'amélioration de leur bilan compte peu au vu de la faiblesse de leur rendement comparé à celui de leurs homologues américaines, selon des investisseurs. Les résultats publiés vendredi par l'Autorité bancaire européenne (ABE) témoignent de la santé relative du secteur bancaire. Les 48 banques testées, représentant 70% des actifs bancaires de l'Union européenne, ont respecté l'objectif de ratio minimum de fonds propres CET 1 en pleine application ("fully loaded") de 5,5% qui avait été retenu dans le scénario le plus défavorable. Le vice-président de la Banque centrale européenne (BCE), Luis de Guindos, a toutefois invité lundi douze banques de la zone euro, dont BNP Paribas BNPP.PA et Société générale SOGN.PA , qui affichent des ratios de fonds propres durs inférieurs à 9% dans le scénario extrême, à renforcer leur bilan. Deutsche Bank DBKGn.DE figure également parmi elles. La crainte de nouveaux appels de fonds explique en partie la timidité des investisseurs vis-à-vis du secteur. L'indice des banques européennes du Stoxx 600 .SXP7 , qui a lâché 20% depuis le début de l'année, reculait de 0,6% mardi vers 14h10. Leurs réticences devraient perdurer alors que les perspectives économiques de l'Europe s'assombrissent, selon certains gérants de fonds et analystes. Une décennie après la crise financière et malgré des années de politique de relance de la Banque centrale européenne (BCE), la croissance de la zone euro marque le pas. Les économistes interrogés par Reuters tablent sur une progression annuelle du PIB dans le bloc des 19 de 2,1% en 2018 et de 1,8% en 2019. Cette prévision reflète l'ambiance morose tenant en particulier à l'Italie, au ralentissement en Turquie, et aux conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, des facteurs pris en compte dans les scénarios des "stress tests". En apparence, les banques européennes sont attractives. La valorisation du secteur via l'indice bancaire du Stoxx se situe juste au-dessus de ses plus bas historiques, touchés bien après qu'elles se soient débarrassées de leurs actifs toxiques, ce qui a ébranlé la confiance dans le secteur financier en 2007. Mais le fait que les niveaux de capital des banques soient maintenant environ trois fois plus élevés qu'avant la crise n'a pas permis de dissiper les inquiétudes quant à leur manière de générer une croissance de leurs revenus. "La rentabilité reste un sérieux problème pour de nombreuses banques en Europe", a déclaré à Reuters, Mario Quagliariello, responsable des analyses économiques à l'ABE. RUDE ANNÉE Les taux directeurs - 0,75% en Grande-Bretagne et moins 0,4% dans la zone euro - obligent les banques à réduire leurs marges et à prendre davantage de risques alors que la demande de prêts ralentit dans un contexte de croissance stagnante, ce qui entraîne de piètres rendements pour les investisseurs. "Jusqu'à présent, l'année a été difficile pour les actions des banques européennes - et jusqu'à ce que les indicateurs économiques annoncent une croissance économique robuste dans la zone euro, un redressement de leurs cours paraît improbable", a souligné Mike Olivia, conseiller de WestPac Wealth Partners, qui détient des valeurs bancaires dans son portefeuille. Une réglementation plus stricte a rendu le secteur plus sûr mais moins rentable, relèvent des gérants de fonds, ce qui l'a rendu moins séduisant aux yeux de leurs clients, qu'il s'agisse des assureurs ou de fonds de pension. Le rendement moyen des fonds propres des banques de l'UE en 2017 s'est établi à 5,6%, soit un peu plus de la moitié du niveau de 10,6% enregistré en 2007, selon les données de la Fédération bancaire européenne, et inférieur aux 9% enregistrés par les banques américaines. Les banques américaines ont accru leurs part de marché dans les activités de banque d'investissement au détriment de leurs concurrentes européennes. Elles ont ainsi dégagé des marges opérationnelles - l'indicateur clef en matière de rentabilité - nettement plus impressionnantes. Les activités actions et taux fixes des grandes banques américaines ont dégage des marges de respectivement 31% et de 42% au premier semestre de cette année, selon les données de Coalition, contre 14 et 27% pour les mêmes activités dans les plus grandes banques d'investissement européennes. IMPUISSANCE Les deux principaux signaux d'achat pour les investisseurs dans les banques sont une hausse des taux d'intérêt et la croissance de la demande de crédit. Vincent Vinatier, gestionnaire de portefeuille chez AXA IM AXAF.PA , qui détient également des valeurs bancaires, estime toutefois que ces deux facteurs dépendent des responsables politiques et non des dirigeants de banques. "La plupart des gens pensent que nous ne verrons plus jamais les profits que nous avions avant la crise (...) Le ROE (rendement des fonds propres, ndlr) ne représentera qu'une fraction de ce qu'il était", a-t-il déclaré à Reuters. Les hausses de taux attendues de longue date interviendront, mais ceux qui ont investi dans les actions des banques européennes en février, quand les espoirs de changement de politique monétaire avaient atteint leur sommet, ont été sanctionnés par une chute des prix de 20%. Lorsque les taux augmenteront, cela se produira probablement très progressivement. De plus, l'impact sur les marges des banques sera probablement largement compensé par la nécessité de rembourser les prêts très bon marché octroyés par la Banque centrale européenne ces dernières années pour les remplacer par des financements plus coûteux, estiment les analystes de Berenberg. COÛTS La croissance des revenus étant difficile à réaliser, il est essentiel de maîtriser davantage les coûts pour reconquérir les investisseurs. "Il y a encore beaucoup de réductions de coûts à réaliser, ce qui signifie d'autres fermetures d'agences et des baisses d'effectifs", observe Marc Halperin, responsable du Federated International Leaders Fund, qui possède des participations dans ABN AMRO ABNd.AS , AIB AIBG.I , Credit Suisse <CSGN .S>, BNP Paribas, Intesa Sanpaolo ISP.MI et UniCredit. Les promesses de rendements annuels de dividendes de 4%, 5%, voire 6% ne permettent pas à eux seuls d'attirer les investisseurs, car les services aux collectivités, les télécoms et les assureurs européens peuvent offrir les mêmes dividendes à moindre risque, ajoutent des gérants de fonds. Les banques sont le deuxième secteur le moins cher en terme de Price earning ratio (PE, derrière l'automobile, et se négocient à 9,1 fois leurs bénéfices estimés de 2019, soit une décote de 30% par rapport au marché, avec un rendement estimé de 5,7% pour 2019, selon les données de Berenberg. Bien que neutres sur le secteur, les analystes de Bernstein jugent que les investisseurs ont rarement eu une meilleure occasion d'acheter le ROE actuellement offert à des prix aussi bas. Les investisseurs les plus réticents indiquent que cette désaffection pour les banques européennes reflète les craintes grandissantes de l'échec du projet européen ou d'une autre crise financière mondiale déclenchée par des guerres commerciales ou de l'insolvabilité imminente de certains Etats. "La prochaine crise financière sera déclenchée par la dette souveraine, plutôt que par les banques elles-mêmes. Cependant, les banques en détiennent une grande partie, ce qui crée un risque de contagion", explique Matthew Gallagher, membre de la direction d'Odinic Advisors. "La Grèce et l'Italie commencent à montrer des signes de faiblesse et ne seront pas aidées par la hausse des taux d'intérêt aux États-Unis." <^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^ Graphique sur les tests de résistance de l'ABE https://tmsnrt.rs/2D4c7an Graphique sur les marges d'exploitation https://tmsnrt.rs/2PwqxXA ^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^> (Avec Lawrence White et Huw Jones Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Matthieu Protard et Jean-Michel Bélot)
Des banques européennes attractives... en apparence
information fournie par Reuters 06/11/2018 à 14:09
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