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Vance dit que les Européens risquent de tuer l'IA à cause de leur bureaucratie
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Macron juge essentiel de "maintenir la confiance" dans l'IA
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Selon Vance, Trump veillera à ce que les États-Unis restent la puissance dominante dans ce domaine
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USA et GB refusent de signer la déclaration finale du sommet
(Actualisé avec discours final de Macron, précisions)
par Jeffrey Dastin et Elizabeth Howcroft
Le vice-président américain J.D. Vance a mis en garde les Européens mardi contre ce qu'il a qualifié de "réglementation excessive" de l'intelligence artificielle (IA), susceptible selon lui d'empêcher le développement technologique, tandis que le président Emmanuel Macron a appelé les acteurs du secteur à conserver la "confiance" des utilisateurs.
Le regard sur l'IA a évolué à mesure du développement rapide de cette technologie qui pourrait bouleverser les rapports économiques mondiaux, la plupart des acteurs étant passés d'une approche prudente axée sur un besoin de contrôle et de sécurité à une concurrence géopolitique exacerbée pour devenir la puissance dominante dans ce domaine.
J.D. Vance n'a pas pris de gants pour présenter au sommet de Paris sur l'IA le programme "America First" de l'administration Trump, assurant que Washington s'opposerait à quiconque cherche à contester la domination technologique des États-Unis, tout en critiquant l'approche réglementaire beaucoup plus stricte de l'Union européenne comme la politique de contrôle de la population de la Chine - sans la nommer - grâce à l'IA.
"Nous pensons qu'une réglementation excessive du secteur de l'IA pourrait tuer une industrie transformatrice", a déclaré le vice-président américain, qualifiant notamment le règlement général sur la protection des données (RGPD) adopté par l'UE de casse-tête pour les petites entreprises.
"Nous sommes convaincus que l'IA doit rester à l'abri des préjugés idéologiques et que l'IA américaine ne deviendra pas un outil de censure autoritaire", a-t-il ajouté, en allusion à la volonté de modération des contenus en ligne des Européens mais aussi à la Chine, dont il a stigmatisé la diffusion de caméras de vidéosurveillance à reconnaissance faciale et d'équipement 5G "bon marché".
VANCE VISE LA CHINE
"Comme je le sais, et comme je pense que certains d'entre nous, dans cette salle, l'ont appris à leurs dépends, s'associer avec (les régimes autoritaires) revient à enchaîner sa nation à un maître autoritaire qui cherche à s'infiltrer, à s'implanter et à s'emparer de votre infrastructure d'information", a mis en garde J.D. Vance.
"Quand un contrat semble trop beau pour être vrai, rappelez-vous le vieil adage que nous avons appris dans la Silicon Valley : si vous ne payez pas pour le produit, vous êtes le produit", a-t-il ajouté, alors que l'irruption soudaine le mois dernier de l'application d'IA chinoise DeepSeek, peu coûteuse et en accès libre, a ébranlé le secteur des "Big Tech" aux États-Unis.
Tout en promettant que l'administration Trump se ferait la championne d'une IA purement américaine, développée aux États-Unis avec des composants américains, J.D. Vance a assuré que les lois américaines "placeraient les petites et grandes entreprises et tous les autres développeurs sur un pied d'égalité".
Il a lancé une pique à certains opérateurs historiques du secteur qui réclament, selon lui, davantage de réglementations pour asseoir leur domination.
L'UE a adopté l'an dernier le Pacte sur l'IA, première législation d'importance qui fixe un cadre en la matière et promeut notamment un cadre collaboratif dans le domaine du développement de cette technologie.
Mais face à la compétition qui s'accélère, les géants de la tech et plusieurs pays européens, dont la France, ont appelé à ne pas trop se précipiter en matière de régulation et à réduire les formalités administratives afin de favoriser l'essor de l'IA et pouvoir tenir tête à la politique débridée des États-Unis et de la Chine en la matière.
"MAINTENIR LA CONFIANCE"
"Pour sortir du dilemme risque-opportunité, pour éviter de tout de suite aller vers la régulation qui s'impose et qui pourrait bloquer l'innovation, je crois que le défi qui nous est à tous posé (...), c'est de savoir comment la confiance à l'égard de l'intelligence artificielle et sa diffusion est maintenue, parce que ce sera la clé de sa réussite", a déclaré Emmanuel Macron dans son discours de clôture de la session plénière du sommet.
"Si nous cassons cette confiance, l'intelligence artificielle divisera le monde. Si nous cassons cette confiance, alors elle ne sera pas adoptée par des tas et des tas de secteurs. Et vous verrez que dans quelques années, on aura beaucoup de nos compatriotes qui diront qu'on n'en veut pas chez nous, que c'est une source, au fond, de mal vivre."
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a pour sa part assuré que l'UE n'avait pas perdu une course "loin d'être terminée", après avoir annoncé plus de 200 milliards d'euros d'investissements dans l'IA.
Plus d'une centaine de pays ont participé au sommet, dont la Chine et l'Inde qui en est le co-hôte, mais l'espoir de dégager une approche commune sur l'IA "pour le bien de l'humanité", selon les termes utilisés par Emmanuel Macron comme le Premier ministre indien Narendra Modi, se heurte aux intérêts nationaux divergents en la matière.
Illustration des propos tenus par J.D. Vance, les États-Unis, mais aussi le Royaume-uni,
n'ont pas signé
le communiqué final du sommet qui plaide pour une IA "inclusive et soutenable" sur le plan énergétique.
Emmanuel Macron s'en est en revanche fait le chantre dans son discours de clôture, plaidant pour une "IA qui va chercher de l'électricité décarbonée et des modèles beaucoup plus frugaux qui vont nous permettre d'utiliser moins d'énergie" et pour "un accès juste et ouvert de ces innovations à toute la planète" par opposition à la "vassalisation" voulue par certains acteurs.
(Rédigé par Ingrid Melander, avec la contribution de Benjamin Mallet, version française Jean Terzian et Tangi Salaün, édité par Blandine Hénault)
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