les huiles du groupe Vallourec étaient en nombre sur le site d’Aulnoye-Aymeries. La raison ? La présentation au grand public de leur démonstrateur de stockage d’hydrogène. « Un système modulaire avec une empreinte au sol réduite », vu comme « une opportunité prometteuse » imaginée et réalisée pour « écrire le futur », selon les mots ce jour-là de Philippe Guillemot, PDG de Vallourec.
Un an et demi plus tard, qu’en est-il ? L’entreprise ne frôle plus la faillite et dégage 21 % de marge. Ce jeudi 5 juin, le groupe a annoncé la commercialisation de Delphy, le nom de ce projet, qui capable de stocker de 1 à 100 tonnes d’hydrogène, enterré jusqu’à 100 m sous terre. « Nous avons réutilisé nos expertises dans la métallurgie pour répondre aux besoins de l’industrie », assure Vincent Designolle, chargé du développement de cette solution imaginée depuis 2022 notamment au centre R&D d’Aulnoye-Aymeries. En effet, Vallourec a pu compter sur son savoir-faire, notamment pour l’étanchéité VAM ou encore le filetage premium. Pas besoin de créer des sites ou des outils, tout a été fait avec l’existant. Et c’est là toute la force soulignée par Vallourec. « En trois ans à peine, nous sommes passés d’une présentation sur ordinateur à la commercialisation. C’est lié à ce que l’on sait faire, et c’est assez remarquable. »
Solution qualifiée
Après la présentation de 2023, il a fallu faire valider la solution. Avec la qualification de DNV, société de classification norvégienne, tout a été vérifié. « Il s’agit d’une proposition unique sur le marché, qui est sûre et compacte. Cette qualification a de la valeur pour nous et pour le client. Elle garantit un niveau de sécurité optimale. » Reste désormais à vendre Delphy. Avec dans le viseur, l’industrie, évidemment. « La demande de stockage va augmenter », reprend Vincent Designolle.
La stratégie française prone une certaine flexibilité, avec des interruptions d’énergies à certaines heures de la journée. « Elle incite les producteurs d’hydrogène vert à un fonctionnement flexible pour contribuer à la stabilité du réseau. Pour cela, les industries auront besoin de stockage. » Primordial à l’heure de la décarbonation. En tout, une trentaine de personnes ont travaillé sur ce projet.
Reste désormais la question essentielle : où sera produit Delphy ? « L’ambition est mondiale : la production s’organisera en fonction de la géographie des projets de stockage d’hydrogène en s’appuyant sur les capacités de production déjà existantes. Pour l’Europe, il est prévu de s’appuyer sur les usines d’Aulnoye pour le filetage premium des tubes et la production des pièces spécifiques développées pour Delphy. »
Un potentiel à 2 milliards
Parce que Delphy est « aujourd’hui le maillon manquant dans l’industrie », Vallourec vise haut pour le potentiel commercial de sa solution. « Des délégations du monde entier sont venues à Aulnoye-Aymeries pour visiter et observer le démonstrateur, indique Vincent Designolle. On voit qu’il y a un gros intérêt de la filière. »
Ce jeudi, lors de la commercialisation, Vallourec a annoncé « les signatures de deux protocoles d’accord, avec H2V, pour des projets de production et d’utilisation d’hydrogène vert et avec NextChem Tech, pour des projets d’hydrogène vert et d’ammoniac vert ». En tout, une cinquantaine de projets, « à horizon moyen et long terme », serait actuellement en discussion. Pour un potentiel chiffre d’affaires de deux milliards d’euros. Vallourec s’appuie sur son réseau actuel, entre Europe, Amérique du Nord, Amérique du Sud et Moyen-Orient.
« C’est très stimulant pour les équipes, et cela va nous apporter un chiffre d’affaires complémentaire. Aujourd’hui encore, 80 % de notre CA vient du pétrole et du gaz. Quand on voit la manière dont la transition énergétique s’effectue, la bascule ne devrait intervenir que d’ici quinze ans. À nous de trouver des marchés relais. » Mais d’ici là, Vallourec en est certain : même si le marché se développe lentement, Delphy a « un haut potentiel de commercialisation ».