
(Crédits photo : - L. Grassin )
Imerys a l'ambition d'exploiter la mine française dite « de Beauvoir », dans l'Allier, pour son lithium, élément clé de la transition énergétique, qui sert notamment pour la production des batteries des voitures électriques. Un projet profitable et qui redonnerait de la souveraineté à la France et à l'Europe alors qu'aujourd'hui 100% de ce minéral est importé, de Chine notamment.
Une histoire de décarbonation et de souveraineté qui plaît à la Bourse. La possible ouverture d'une mine de lithium en France fait, aujourd'hui, les gros titres de la presse et les affaires de son exploitant: Imerys. Les actions du spécialiste des minéraux industriels gagnent quasiment 6% ce lundi, 38,3 euros, au plus haut depuis la fin avril. L'entreprise, fournisseuse méconnue de l'industrie automobile (7% des facturations, un chiffre appelé à grossir), figure à nouveau parmi les rares à être gagnantes depuis le début de l'année sur Euronext Paris.
«Je suis très enthousiaste […], réagit Alessandro Dazza, le PDG d'Imerys, dans un communiqué. En cas de succès, le projet [baptisé «Emili», pour Exploitation de MIca Lithinifère] constituera une source d'approvisionnement en lithium durable, compétitive et nationale pour les constructeurs automobiles français et européens et contribuerait de façon majeure à relever les défis de la transition énergétique.» Aujourd'hui, l'Europe importe 100% de son lithium, de Chine, d'Argentine ou du Zimbabwe.
Les minéraux industriels extraits par Imerys valent de l'or, ils servent des marchés en forte croissance, dont celui des voitures électriques. Le noir de carbone est notamment utilisé pour accroître les performances des batteries lithium-ion des véhicules, pour lesquelles l'engouement est manifeste.
Il y a trente minéraux en moyenne dans une voiture. Le talc, le wollastonite et le kaolin servent à fabriquer des pare-chocs et des capots de moteur plus fins, plus légers et plus rigides ainsi que des pneumatiques allégés avec une résistance au roulement réduite. «Ceci participe à réduire le poids global des véhicules ainsi que leur consommation en carburant », explique Imerys sur son site Internet. « Le graphite peut remplacer le cuivre dans les plaquettes de frein. Le diatomite, un minéral aux propriétés absorbantes très élevées, réduit les composés organiques volatils à l'intérieur des voitures. Le carbonate de calcium augmente la durabilité des enduits et améliore le confort en réduisant le bruit. »
Bas carbone
La mine à ciel ouvert de Beauvoir, située dans l'Allier, à une cinquantaine de kilomètres de Vichy, est déjà exploitée en surface pour le kaolin, destiné à l'industrie céramique depuis la fin du XIXe siècle. Désormais, le groupe envisage aussi de produire 34.000 tonnes d'hydroxyde de lithium par an à partir de 2028, et ce pendant au moins 25 ans, de quoi équiper environ 700.000 voitures électriques par an. «Les résultats des études réalisées confirment que le gisement présente des concentrations et des quantités de lithium très intéressantes», indique Imerys dans un communiqué.
La mise en œuvre de ce projet, soutenu par le gouvernement, nécessite environ 1 milliard d'euros de dépenses d'investissement (Capex). Plusieurs ministres, dont Bruno Le Maire à l'économie, Agnès Pannier-Runacher à la transition énergétique et Roland Lescure à l'industrie, saluent le lancement par Imerys de la première exploitation de lithium bas carbone en France (mixte énergétique moins émetteur de CO2, transport en train…), annoncé comme «exemplaire sur le plan environnemental et climatique.»
Sa sortie de terre n'est pas une surprise pour la communauté financière. Cet été, à l'occasion de la publication par Imerys de ses comptes du premier semestre, le patron de l'entreprise «avait semblé raisonnablement optimiste concernant la possibilité d'exploiter la mine de lithium de Beauvoir dans la mesure où les derniers détails concernant les réserves et les Capex pourraient être finalisés à la fin de l'été», écrivait la banque privée Oddo BHF. Une réunion aura lieu cet après-midi, à 16 heures, avant la grande réunion investisseurs du 7 novembre, au cours de laquelle plus de détails sur la stratégie du groupe seront fournies.
800.000 tonnes en réserve
Imerys, qui fournit aussi la construction (un peu plus de 30% de son chiffre d'affaires), a lancé une transformation en profondeur marquée par les cessions de Calderys, son activité très polluante de « solutions de haute température », qui servent à la protection des fourneaux industriels, des creusets ou des incinérateurs, utilisés par les sidérurgistes ou les cimentiers, et de sa branche servant les marchés du papier (10% du chiffre d'affaires) pour financer un virage dans la production de lithium. Ces grandes manœuvres permettent de réduire la cyclicité de l'activité d'Imerys, qui va monter en puissance dans l'électrification des véhicules. De quoi réveiller «cette belle endormie» en Bourse, estiment les analytes Sven Edelfelt et Virginie Rousseau de la banque Oddo BHF. Ils calculent que le projet «Emili» est valorisé 1,523 milliard d'euros, soit 18 euros par action.
Le Bureau national de recherches géologiques et minières (BRGM) avait mesuré la réserve de lithium à environ 320.000 tonnes, Imerys annonce aujourd'hui une réserve de lithium de 800.000 tonnes, en ligne avec les estimations d'Oddo. «Les Capex ressortent à 1 milliard pour une production de 34.000 tonnes, nous les avions estimés à 800 millions et 35.000 tonnes sur une période de 25 ans, expliquent les analystes. En première approche, notre valorisation du gisement de Beauvoir serait ramenée à 1,523 milliard (soit 18 euros par action, contre 20 précédemment) sur la base d'un coût de production de 8.000 dollars par tonne (6.949 dollars dans nos estimations), une subvention de 25% des Capex et une valeur long terme de revente du lithium prudente à 15.000 dollars par tonne contre 70.000 aujourd'hui. Le TRI [taux de rentabilité interne] ressortirait 29%.» Oddo BHF voit Imerys gagner encore plus de 40% en Bourse (objectif de cours de 55 euros). Le consensus des analystes est globalement acheteur. Les cinq équipes qui suivent la valeur, dont Oddo BHF, tiennent toutes une recommandation d'«achat» ou «surpondérer», avec un objectif de cours médian de 45,8 euros.
Nous sommes à l'achat d'Imerys pour viser 43 euros.
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