Les marchés du crédit européen se sont bien comportés en 2024, mais la performance de la classe d'actif pourrait être mise à l'épreuve en fin d'année, selon des analystes.
Ces actifs risqués dépendants du niveau des taux ont profité du cycle d'assouplissement monétaire en zone euro et de rendements attractifs, liés au rebond du rendement des titres souverains.
Le rendement du Bund est ainsi passé de 2,07% en début d'année à 2,20% au 25 novembre, ce alors que l'écart de taux ("spread") entre le rendement du crédit et celui des titres souverains, qui mesure la prime exigée par les investisseurs pour détenir ces actifs plus risqués, se replie depuis un an.
Mi-novembre, cet écart touche un plus bas depuis septembre 2021, à 98 points de base pour le segment de qualité ("investment grade") et 272 pb pour celui du haut rendement ("high yield").
"Le portage contribue à rendre les obligations 'investment grade' attrayantes, tout comme le faible nombre de défauts", ajoute par ailleurs Claudia Panseri, responsable des investissements chez UBS Wealth Management France, qui surpondère la classe d'actif.
Le taux de défaut anticipé par Moody's a ainsi été revu en baisse de 3,6% à 3,3% en octobre pour la zone euro, les entreprises ayant profité de taux de refinancement réduits durant la pandémie de COVID-19.
L'intérêt des investisseurs se maintient : les flux entrants des particuliers sur le crédit européen atteignaient 157,5 milliards d'euros au 30 octobre, selon des chiffres d'EPFR Global, contre 30 milliards de sorties sur les actions européennes.
INCERTITUDES
La question de la poursuite du mouvement de resserrement des spreads, dans un contexte de valorisations élevées, demeure : Goldman Sachs prévoit que les rendements excédentaires pour le segment de qualité reculeraient à 0,8% en 2025, contre 3,4% en 2024, contre une érosion de 6,1% à 2,2% pour le segment à haut rendement.
Une certaine sensibilité commence à poindre, les spreads ayant rebondi d'une quinzaine de points de base depuis le 18 novembre, avec la flambée des tensions géopolitiques. Lerythme d'émission s'est accéléré ces deux dernières semaines, avec 41 milliards d'euros émis pour l'ensemble du segment en Europe.
"Au début de l'année, aucun de ces facteurs n'aurait eu d'impact important sur les spreads. Nous nous attendons toujours à ce que les spreads se resserrent en fin d'année, mais il semble que le marché soit de plus en plus nerveux", relève Juan Valencia, responsable de la stratégie crédit chez Société Générale CIB.
Pour autant, les facteurs ayant permis aux marchés de bien se comporter devraient perdurer l'année prochaine.
"La faiblesse de la croissance dans la zone euro sera probablement tolérée si elle s'accompagne d'un cycle d'assouplissement plus agressif", soulignent ainsi les stratégistes de Goldman Sachs qui estiment que les valorisations demeureront élevées en 2025, mais que les investisseurs pourraient ne pas avoir d'autre choix que de rester exposés à la classe d'actif.
La composante "taux", la part du rendement total liée aux taux des obligations souveraines, est ainsi suffisamment élevée pour protéger contre une détérioration de l'activité. La sensibilité plus faible aux mouvements de marché des écarts de taux (beta), par rapport au beta des actions, rend aussi au crédit son rôle de protection de portefeuille dans un contexte d'incertitude croissante.
Alors que la trajectoire politique et économie des États-Unis demeure encore incertaine, le crédit investment grade européen "permettra de limiter l’impact de la volatilité liée à l’élection (américaine) et aux déclarations de Donald Trump", résume Claudia Panseri.
(Rédigé par Corentin Chappron, édité par Nicolas Delame)
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