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« La jungle on la veut dans les forêts, pas dans les marchés financiers »
information fournie par Agefi Asset Management  22/03/2024 à 08:15

C’est à une «mission difficile» que s’est attelé l’IAPB, autrement dit le Panel international de conseil sur les crédits biodiversité (I nternational Advisory Panel on Biodiversity Credits ). Cet organisme créé en juin dernier à l’initiative du Royaume-Uni et de la France réfléchit à « savoir comment utiliser l’argent privé pour financer ce qui est un bien commun, c’est-à-dire la nature », a expliqué Sylvie Goulard qui est coprésidente de cet organisme, à l’occasion de la Conférence Biodiversité organisée par L’Agefi ce 14 mars.

Difficile parce qu’il s’agit d’obtenir une valorisation qui n’est pas prise en compte par l’économie. « Jusqu’à présent, on nous a appris qu’une économie fonctionnait avec du travail et du capital. On a totalement raté le fait qu’il ne faut pas seulement cela, il faut aussi des ressources naturelles, car toutes les activités humaines puisent à pleines mains dans les ressources naturelles », a expliqué l’ancienne députée européenne et ministre des Armées sous le gouvernement d’Edouard Philippe.

L’IAPB s’est formé avec une vingtaine de personnes au niveau mondial, « y compris des autochtones des régions concernées, des ONG et, de grandes institutions financières pour concevoir ensemble ce qui pourrait conduire à ce que des entreprises achètent des crédits qui seraient liés à la conservation de la nature », explique Sylvie Goulard.

Face à une centaine d’investisseurs et d’entreprises, elle a expliqué que la création de ce marché devrait permettre de « faire du business », mais aussi de « regarder toute la chaine de valeur des entreprises ». « Si vous produisez du café, du coton ou si vous avez besoin de ce type de matière première il y a des zones dans lesquelles vous aurez intérêt à investir pour que vos fournisseurs restent capables de vous apporter ce dont vous avez besoin ». Pour elle, il ne s’agit pas de dire combien vaut le dernier oiseau ou le dernier poisson (…), mais de dire qu’une action de restauration a un coût et peut faire l’objet d’un financement, d’un apport, qui soit dans une finance à impact profitable.

Eviter les écueils du marché des crédits carbone

Afin d'éviter les écueils qu’a connu le marché du crédit carbone (fraudes, blanchiment, etc), elle a indiqué que des leçons de ce qui n’a pas fonctionné devront être tirées. « Là où il y a une différence c’est que nous n’allons probablement pas arriver à un seul marché, avec une seule unité. Il ne s’agit pas de bons du Trésor américain où on achète quelque chose de fongible avec un marché secondaire. Ce n’est pas du tout ça et ce n’est même probablement pas souhaitable. Les écosystèmes sont spécifiques, locaux, il ne sera pas question d’échanger des tonnes d’océan contre de la forêt ».

Il pourrait donc y avoir une juxtaposition de marchés différents qui démarreront autour de projets pilotes. Puis une phase d’observation pour rectifier éventuellement le tir. " Ce ne sera pas un système de compensation au niveau mondial. La nature n’est pas un bien comme un autre», précise Sylvie Goulard. L’IAPB devrait rendre un rapport ainsi que des principes conducteurs autour d’une coalition d’acteurs en octobre prochain lors de la Cop16 Biodiversité en Colombie.

Face à cette financiarisation probable de la biodiversité, René Lalement, directeur adjoint à l’Office français de la biodiversité (OFB) qui intervenait sur le même panel, a estimé que cette éventualité peut avoir un côté très positif mais aussi négatif. Le côté positif est effectivement la possibilité de financer la restauration de la biodiversité, « mais on pourrait être inquiet de la financiarisation de la biodiversité si ce type de marché devenait le seul lieu d’appréciation gouverné par l’offre et la demande. Avec pour effet que la nature en bon état devenant de plus en plus rare, on serait amené à spéculer sur le fait qu’elle devienne encore plus rare. Ce serait un effet contre productif et désastreux ».

Sylvie Goulard a réagi en pointant le fait que « la jungle on la veut dans les forêts, pas dans les marchés financiers ».

Réjane Reibaud

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