
Face à la baisse du fonds euros, les fonds prudents sont-ils une solution ? (Crédits photo : Unsplash - Maryna Yazbeck )
Après le temps des annonces, voici le temps de l'action. Les assureurs avaient averti le marché du coup de massue porté aux fonds en euros, avec une baisse drastique du rendement (parfois attendu autour de 1%) et des restrictions d'accès de plus en plus fortes. Avec la nouvelle année, nous y sommes. Quels avis portent les sociétés de gestion sur cette nouvelle donne ?
« Enfin ! », s'exclame Christophe Tapia, Directeur du Développement de Sunny AM, qui rappelle que Solvency 2 date de mars 2009. Cette réglementation contraignait les assureurs à acheter de la dette, désormais passée en territoire négatif, ce qui impactait structurellement le rendement embarqué de leurs fonds euros. « Ce n'est pas une nouveauté mais une suite logique », poursuit Christophe Tapia.
Si cette situation peut sembler problématique au vu de l'importance des stocks sur le fonds en euros, elle peut aussi être source d'opportunités. D'une part pour les acteurs de marché, mais également pour les investisseurs finaux. « L'épargnant sera très content quand on lui aura expliqué que c'est mieux de faire 2/3% avec un petit peu plus de risque, que 1% avec quasiment pas de risque », assure Clément Duval, en charge des relations partenaires chez Keren Finance.
Les fonds prudents en relais du fonds euros ?
Il n'est pas facile de définir un fonds prudent. Alors que prendre en considération ? Le SRRI (indicateur de risque-rendement) ? Le "max drawdown" (perte maximale sur une période donnée) ? « Au départ, c'est quand même un abus de langage. Aujourd'hui, la réglementation est en retard car prudent ne veut pas uniquement dire moindre volatilité », considère Alexandre Taieb, gérant-analyste chez Sycomore AM.
« Le terme "prudent" est dangereux. Quand on dit prudent, on a l'impression qu'il ne va rien se passer », renchérit Christophe Tapia de Sunny AM. D'où l'importance de faire très attention à la sémantique. « Beaucoup se sont cachés derrière un SRRI. In fine, cela peut être très décevant », regrette-t-il. Avant même de chercher un fonds prudent, il recommande donc de trouver un fonds "simple", c'est-à-dire avec un fonctionnement lisible et de la visibilité sur le rendement.
Pour autant, ces fonds dits "prudents" peuvent-ils remplacer le fonds en euros ? « Fuyez ceux qui vous parlent d'alternatives au fonds euros, rien ne le remplace. Au mieux, on peut parler de complément », prévient Clément Duval de Keren Finance.
Le fonds daté, une solution pertinente ?
En parlant de fonds "simples", beaucoup de sociétés de gestion mettent en place des fonds datés dont la souscription est souvent ouverte durant une période restreinte et qui portent des obligations ayant une échéance déterminée. Est-ce la panacée pour remplacer le fonds en euros ? Non, selon Christophe Tapia qui distingue fonds daté... et vrais fonds datés. Il met en garde contre ceux qui proposent des fenêtres de commercialisation de plusieurs années. « Ce n'est pas un fonds daté ça, c'est un fonds ouvert », s'offusque-t-il. Il peste également contre les produits qui sont "rollés", autrement dit qui se prolongent une fois que l'échéance approche.
Cependant, Clément Duval de Keren Finance pointe qu'au travers d'un fonds obligataire daté, on retrouve une certaine visibilité. Il loue donc la philosophie de ces produits, qui va « énormément se rapprocher de celles des fonds euros ». Par ailleurs, celui-ci met en avant le grand nombre de lignes au sein des fonds datés, ce qui permet de compenser les éventuels défauts. On a tous en tête l'exemple de Rallye l'année dernière : « Un défaut peut arriver mais n'empêchera pas de performer dans le temps », assure Clément Duval.
Quelques conseils pour 2020...
Finalement, le maître-mot reste souvent le même en matière d'allocation : diversification. Plus que jamais, elle va s'avérer essentielle en l'absence d'un fonds euros tout-puissant. « Il ne faut pas se détourner du risque, y compris pour les fonds prudents », avertit Alexandre Taieb. « Vous allez y être contraints, mais il faut prendre cela comme une opportunité », rassure-t-il. Un message appliqué à la lettre par beaucoup d'investisseurs qui sont allés sur… le très volatil fonds H2O Multibonds. « Mais 25% de volatilité, c'est plus qu'un fonds de petites capitalisations », rappelle Alexandre Taieb.
Diversification, cela veut dire ne pas délaisser l'obligataire. Dans un monde de taux bas ou négatifs, elle reste la plus grande classe d'actifs au monde : 250 000 milliards de dollars contre 80 000 milliards pour les actions. « C'est la classe d'actifs sur laquelle on a entendu le plus d'âneries depuis 10 ans. Mais c'est un marché ultra protéiforme, attention à ne pas crier au loup tout le temps. N'ayez pas peur des obligations », martèle Christophe Tapia de Sunny AM.
Enfin, il faut encore et toujours donner du temps à ses investissements. La prise de risque n'est rémunérée qu'au prix du respect d'un horizon de placement. Un engagement pas facile à prendre quand on a eu accès pendant plusieurs décennies à un produit rémunérateur, garanti et liquide comme le fonds euros. « Le secret des bonnes allocations de demain est la pédagogie d'aujourd'hui », glisse Clément Duval de Keren Finance. Une invitation à se faire accompagner par des professionnels qui seront à même de garder la tête froide face à ce nouvel environnement.
Cet article ne doit en aucun cas s'apparenter à un conseil en investissement ou une recommandation d'acheter, de vendre ou de continuer à détenir un investissement. Boursorama ne saurait être tenue responsable d'une décision d'investissement ou de désinvestissement sur la base de cet article.
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