
Le siège d'Intel. (crédit photo : Intel / Robert Noyce )
Intel va publier ses résultats du dernier exercice jeudi et la probabilité est mince de voir le groupe réenchanter les investisseurs au milieu d'un vaste chantier.
Le fabricant de processeurs devrait dégager un très léger bénéfice ajusté par action au quatrième trimestre, de 12 cents par action, selon le consensus des analystes FactSet mais il accusera des pertes sur l'ensemble de l'exercice sous le poids des charges de restructuration ainsi que de marges et de ventes sous pression.
Le chiffre d'affaires au quatrième trimestre devrait avoir reculé de plus de 10%, à 13,17 milliards de dollars, par rapport à la même période un an plus tôt, selon le consensus FactSet.
Ces ternes résultats sont le fruit d'une année au cours de laquelle le groupe a continué de tâtonner sur sa double stratégie de fondeur et de concepteur de puces tandis que les processeurs de ses rivaux Nvidia et AMD submergeaient le juteux marché des centres de données pour l'intelligence artificielle (IA).
Une capitalisation qui a fondu de moitié
Tiré par la performance de Nvidia, le S&P 500 a gagné 25% au cours des douze derniers mois alors qu'Intel a vu sa capitalisation boursière fondre de plus de moitié et descendre largement sous les 90 milliards de dollars.
L'impatience du conseil d'administration sur les performances a conduit au limogeage du patron Pat Gelsinger en décembre et son remplacement par une co-direction provisoire. Mais la marge de manoeuvre de son successeur risque d'être limitée car la double feuille de route demeure: rentabiliser la fonderie de puces et rendre les produits maison, tels que les processeurs CPU, plus compétitifs dans un marché qui retrouve de la vigueur sous l'impulsion de l'IA.
Car même dans le segment des CPU qu'il domine, Intel perd de sa sérénité. Tout d'abord dans les ordinateurs où l'architecture d'ARM, notamment utilisée par Apple pour ses Mac depuis 2020 au détriment des puces d'Intel, grignotent des parts de marché. Mais également dans les serveurs avec la montée en puissance d'AMD, qui a beaucoup insisté sur les économies d'énergie de ses produits pour ces installations gourmandes en ressources.
La co-directrice générale provisoire d'Intel Michelle Johnston Holthaus l'a reconnu lors d'une conférence de Barclays en décembre en estimant qu'Intel avait "mis trop de temps à s'orienter vers la performance et la puissance" et allait devoir avoir disposer désormais "de produits exceptionnels et d'une ingénierie exceptionnelle".
L'autre défi d'envergure est celui de l'essor irrésistible des processeurs graphiques (GPU) dont les opérations en parallèle sont plus efficaces pour les besoins de calcul massifs de l'intelligence artificielle dans les centres de données.
La récente annonce de l'entreprise chinoise DeepSeek sur son modèle d'IA moins couteux en ressources a certes relancé la question sur les prix et les marges des futurs GPU mais Intel reste en retard dans ce domaine. Le groupe a reconnu que sa nouvelle puce Gaudi n'atteindrait pas son objectif de revenus initial et qu'il devrait "bien réfléchir" aux caractéristiques de son nouveau produit pour les centres de données "Falcon Shores", qui réunira des puces CPU et GPU.
Des pertes colossales dans l'activité de fonderie
Et cette quête des produits idoines devra être menée en parallèle du grand héritage de l'ère Gelsinger: la constitution d'un solide pilier dans la fonderie aux côtés de la conception de puces.
La filiale, destinée à la fois à produire des puces maison et celles de clients tiers, pourrait être ouverte à d'autres investisseurs pour accélérer son développement mais elle devrait en théorie rester sous le contrôle d'Intel en vertu de la loi CHIPS de l'ancien président Joe Biden, qui a permis au groupe de récupérer des millions de dollars d'aides publiques pour favoriser la production de semi-conducteurs aux Etats-Unis.
L'activité a perdu 11,3 milliards de dollars au cours des neuf premiers mois de l'année et devrait accuser des pertes de 13 milliards de dollars sur l'ensemble de l'année, selon le consensus Factset, soit deux fois plus qu'en 2023.
Intel dispose d'un nouveau processus de pointe pour la gravure des transistors, le 18A, qui permet de traiter les processeurs les plus avancés mais les clients restent encore à trouver pour espérer rattraper TSMC et Samsung, ses deux principaux rivaux. Pour l'instant, seul Amazon a annoncé un accord marquant dans ce domaine avec un contrat de plusieurs milliards de dollars, mais de nombreux analystes sont sceptiques sur les objectifs, même si Intel promet une forte montée en puissance à partir de 2026.
Au milieu de ces chantiers, la nouvelle direction d'Intel disposera cependant d'un avantage. Après sa chute des derniers mois, Intel n'est plus valorisé qu'au niveau de sa valeur comptable en Bourse. Autrement dit, les investisseurs n'attendent guère de miracle et, à ce cours, les spéculations sur un rachat du groupe ou une vente par appartement pourraient lui fournir un plancher.
-Jérôme Batteau, Agefi-Dow Jones, jbatteau@agefi.fr, ed: JDO
L'Agefi est propriétaire de l'agence Agefi-Dow Jones
Agefi-Dow Jones The financial newswire
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