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Une proposition de loi examinée en séance publique à l'Assemblée nationale vise à faciliter l'expulsion de locataires, impliqués dans des trafics de stupéfiants.
Les locataires de logements HLM et du parc privé, soupçonnés de trafic de drogue, pourraient être plus facilement expulsés . C'est ce que contient l'article 24 de la proposition de loi (PPL) adoptée par le Sénat le 4 février 2025 et renvoyée à la Commission des Lois de l'Assemblée nationale qui l'a adoptée le 7 mars. La PPL est désormais examinée en séance publique à l'Assemblée nationale. Elle imposerait aux locataires de « s'abstenir de tout comportement ou de toute activité qui, aux abords des locaux [loués], porte atteinte aux équipements collectifs utilisés par les résidents, à la sécurité des personnes ou à leur liberté d'aller et venir ».
« Lorsqu'il constate que les agissements en lien avec des activités de trafic de stupéfiants de l'occupant habituel d'un logement troublent l'ordre public de manière grave ou répétée et méconnaissent les obligations définies au b de l'article 7 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986, le représentant de l'État dans le département peut enjoindre au bailleur de saisir le juge aux fins de résiliation du bail dans les conditions prévues à l'article L. 442‑4‑2 du présent code », est-il stipulé dans la PPL.
Le logement est « un droit »
Cette proposition de loi grincer des dents la Fondation pour le logement des défavorisés (anciennement Abbé Pierre). « Il est proposé de faire perdre leur logement à des personnes dont on peine à identifier précisément les faits qui leur sont reprochés et leur degré de gravité qui pourraient justifier de leur faire perdre leur logement ; des personnes autrices de délits qui sont déjà sanctionnées dans le Code pénal et qui ne devraient pas pour autant remettre en question leur droit fondamental au logement ; toute la famille de l'auteur des faits reprochés, quand bien même cette famille n'aurait rien à voir avec ceux-ci, occuperait paisiblement son logement et paierait son loyer », dénonce la Fondation. Avant d'ajouter : « Le logement est un droit qui ne doit pas devenir conditionné à un comportement exemplaire ».
De même, la Défenseure des droits, Claire Hédon, alerte sur les risques pour le droit au logement et la précarisation des familles, en l'absence de solution de relogement. Elle « souhaite insister sur le fait que la possession d'un logement conditionne l'exercice effectif de l'ensemble des droits. La perte de son logement constitue une sanction aux conséquences très lourdes qui est de nature à précariser fortement, sur le plan matériel, physique, psychique et familial la personne qui la subit ainsi que les autres personnes partageant le même foyer », est-il indiqué dans l'avis du Défenseur des droits en date du 13 mars.
Une augmentation du nombre d'expulsions sèches
Elle « relève que les nouvelles dispositions contenues dans la proposition de loi risquent d'accroître le nombre d'expulsions sèches, sans proposition de relogement ni accompagnement en vue de trouver un nouveau logement, non seulement pour les personnes auxquelles des agissements en lien avec le narcotrafic sont reprochées mais également pour les autres personnes résidant dans le même logement, y compris donc des personnes vulnérables notamment personnes mineures, âgées ou en situation de handicap ». Et sur le fait d'intégrer la famille du narcotrafiquant présumé dans la sanction, elle souligne « qu'en faisant porter sur l'ensemble d'une famille les conséquences tirées des agissements reprochés à l'un des membres composant le foyer, la proposition ne respecte pas le principe de responsabilité personnelle ». Le pouvoir donné aux préfets qui peuvent même saisir la justice à la place du bailleur pour lancer une procédure d'expulsion, est également source d'inquiétude. Reste à voir si la PPL est adoptée en séance publique à l'Assemblée nationale ou si les arguments des détracteurs de la proposition seront entendus.
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