L’une de ses lampes de table vient de partir pour 7,5 millions de dollars, deux ans après un plafonnier vendu 2,9 millions. Pourquoi cette folie autour des objets conçus par l’architecte Frank Lloyd Wright ?
Généralement, quand on parle d’une lampe d’architecte, on pense plutôt à un équipement utilitaire de bureau, plus ou moins inspiré des modèles éclairant une table à dessin. Le design s’en est emparé et au-delà des modèles basiques, certains peuvent valoir quelques centaines d’euros. Mais lorsque l’on parle des lampes de l’architecte Frank Lloyd Wright on passe dans une autre dimension où cet élément de déco peut valoir plusieurs millions d’euros. Cet Américain qui est considéré comme l’un des fondateurs de l’architecture moderne avait une conception globale de son métier et se plaisait à dessiner également le mobilier et la décoration de ses réalisations à la manière de ce qui se faisait aussi dans l’ Art nouveau français.
Toujours est-il qu’une véritable frénésie semble s’emparer des enchérisseurs internationaux qui viennent de s’arracher l’une de ses lampes à «double piédestal» pour 7,5 millions de dollars (6,7 millions d’euros). En 2002, elle était partie quasiment pour un montant quasiment quatre fois moins élevé et les estimations de prix de la maison Sotheby’s, chargée de la vente, se situaient entre 3 et 5 millions de dollars. Un objet remontant à 1904 et mesurant seulement 60 x 80 x 50 cm. Et en 2023, toujours chez Sotheby’s, un petit plafonnier datant de 1902 s’est arraché pour 2,9 millions de dollars. En comparaison, l’une des dernières ventes concernant l’une de ses maisons la Winn House à Kalamazoo (Michigan), vient de se conclure pour 850.000 dollars . Il est vrai que le prix avait baissé d’un million de dollars après une année de commercialisation infructueuse.
Une tour à 1,4 million de dollars
Même la Price Tower, la seule tour jamais édifiée par l’architecte, est partie pour seulement 1,4 million de dollars. Mais il est vrai que dans ce cas, comme plusieurs des réalisations de Frank Lloyd Wright, les acheteurs devront s’engager dans d’ambitieux et coûteux programmes de rénovation. Dans les demeures de Wright qui restent toujours à vendre, on peut aussi citer la résidence Eppstein, toujours dans la région de Chicago, proposée à 2,1 millions de dollars ou encore cette étonnante maison circulaire, la Norman Lykes House, surplombant Phoenix dans l’Arizona et affichée à 8,9 millions de dollars .
C’est certes plus cher que la lampe mais le bien ne semble pas vendre à ce tarif. Comment alors expliquer cet engouement pour ces lampes, sachant qu’en 2023, un plafonnier conçu par le même architecte s’était déjà arraché pour 2,9 millions de dollars ? Il faut rappeler que Frank Lloyd Wright, à la manière d’ Hector Guimard en France était un tenant d’un art total. Tout comme Guimard (l’auteur des bouches de métro parisiennes emblématiques), il dessinait lampes, meubles et jusqu’aux vitraux, ferronneries et autres éléments décoratifs. Ce mouvement connu sous le nom d’Arts&Crafts chez les Anglo-Saxons (avec également l’architecte écossais Charles Rennie Mackintosh ) est en vogue chez les collectionneurs depuis des années déjà.
Le contraire de l’immobilier
Et c’est ainsi que bon nombre d’acheteurs de maisons de Wright se sont empressés de revendre rapidement et au prix fort les éléments décoratifs conçus par l’architecte. C’est ainsi qu’a été créé dès la fin des années 1980 le Frank Lloyd Wright Building Conservancy , un organisme qui soutient la préservation des bâtiments de l’architecte mais aussi la conservation sur place du mobilier et de la décoration. Il est vrai que ces objets sont peu encombrants, se revendent très bien et nécessitent peu d’entretien. Tout le contraire de l’immobilier...
Dans le cas de la lampe à double piédestal, elle faisait partie d’un projet de transformation de la maison de Susan Lawrence Dana, dans l’Illinois. Pour cette vaste demeure de 1100 m², l’architecte avait conçu pas moins de 100 éléments de mobilier sur mesure ainsi que 450 vitraux et éléments d’éclairages. Il y avait d’ailleurs deux lampes identiques à double piédestal, la seconde ayant été acquise à la fin des années 1980 par la Dana-Thomas House Foundation. Ces lampes reprennent des motifs naturels et des tons de terre en harmonie avec les vitraux de la maison. Les spécialistes estiment qu’il a pu s’inspirer des parois japonaises en papier (shōji) pour ces créations, Wright ayant toujours admiré l’architecture et l’artisanat japonais.
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