
Donation au dernier vivant : peut-on l’annuler discrètement ? / iStock.com - Goran13
La révocation d'une donation
Une donation entre époux est possible du vivant des époux (donation entre vifs) ou à l'occasion du décès de l'un des deux (donation au dernier vivant). Cette seconde option est, de loin, la plus courante. Face à une loi favorable aux enfants du conjoint décédé, ce dispositif juridique permet d'octroyer des droits supplémentaires au conjoint survivant et d'augmenter sa part successorale. En matière de révocation, il existe une différence entre la donation entre vifs et la donation au dernier vivant. Le premier est a priori un acte définitif, sauf dans trois cas spécifiques : quand le donataire (bénéficiaire) a fait preuve d'ingratitude envers le donateur en commettant des actes graves (délits, sévices, injures graves ou atteintes à la vie) ; quand il ne respecte pas les engagements qui ont conditionné la donation (loger le donateur par exemple), ou en cas de naissance d'un enfant du donateur (ou d'une adoption plénière), sachant que ce dernier peut renoncer à son droit de révoquer la donation. Dans ce dernier cas de figure, la demande doit être formulée dans les cinq ans qui suivent la naissance ou l'adoption. Dans tous les cas, c'est le juge qui sera habilité à prononcer la révocation, sauf si une condition suspensive est prévue dans l'acte notarié.
La révocation d'une donation au dernier vivant
Si la révocation d'une donation classique exige un motif légitime, la donation au dernier vivant ne répond pas aux mêmes règles. Elle est irrévocable lorsqu'elle est intégrée à un contrat de mariage, et seul un divorce peut l'annuler. Les conjoints peuvent cependant décider de la maintenir, à condition de le formuler dans l'acte de divorce. En revanche, si elle est contractée devant notaire après le mariage, elle est révocable unilatéralement à tout moment. Dans ce cas, le donateur n'a pas à justifier sa décision et n'est pas obligé d'en parler à son conjoint. Cette possibilité légale permet de protéger un conjoint sous emprise, qui aurait été contraint d'accepter une donation. Compte tenu du secret professionnel auquel il est tenu, le notaire ne peut pas informer un bénéficiaire d'une décision de révocation. En général, celui-ci découvre donc la révocation à l'ouverture de la succession, au décès du donateur.
Comment demander la révocation d'une donation ?
Dans le cas d'une donation classique, le tribunal judiciaire doit être saisi par le donateur en cas de recours pour ingratitude ou non-exécution des conditions. La demande doit être déposée dans l'année qui suit les agissements répréhensibles du donataire, ou la découverte de ceux-ci. Le juge sera seul compétent pour évaluer la situation et prononcer la révocation. Si la donation dépasse la réserve héréditaire, autrement dit si elle rogne la part de succession à laquelle peuvent prétendre les héritiers réservataires (enfants ou petits-enfants), ceux-ci peuvent demander une "action en réduction" auprès du tribunal. Cette démarche permettra de diminuer la donation, afin que chaque héritier puisse percevoir la part qui lui revient au regard de la loi. En cas de révocation d'une donation au dernier vivant, le fait de ne pas informer son conjoint peut créer de graves tensions dans le couple, et par extension dans la famille. Il est donc toujours préférable de miser sur la transparence et d'en discuter en amont avec son conjoint, ou de solliciter les conseils de son notaire. Celui-ci sera en mesure d'informer le donateur des conséquences familiales et juridiques d'une telle décision.
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