La durée d'indemnisation pourrait varier de 14 à 45 semaines en fonction du marché de l'emploi dans telle ou telle région. (Photo di'llustration) (Pixabay / wir_sind_klein)
Depuis sa campagne à l'élection présidentielle de mai dernier, Emmanuel Macron défend une nouvelle réforme de l'assurance chômage qui se baserait sur le modèle canadien. Ce dernier fait varier les conditions d'accès et la durée d'indemnisation en fonction du marché de l'emploi. Si les économistes y voient une piste potentielle, les syndicats sont eux défavorables à cette idée.
Système vertueux ou danger ? Le modèle canadien d'assurance chômage, dont le gouvernement français entend s'inspirer, inquiète les syndicats. Emmanuel Macron s'est engagé au printemps à réformer l'assurance chômage en la rendant « plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé » . Depuis, le ministre du Travail Olivier Dussopt a cité plusieurs fois le modèle canadien en exemple.
Une assurance chômage variable en fonction des régions
Ce modèle prévoit que les conditions d'accès et la durée d'indemnisation varient selon le taux de chômage régional. Dans une région où le chômage est inférieur à 6 %, il faut avoir travaillé 700 heures pour être indemnisé, contre 420 heures dans une région avec un chômage supérieur à 13 %, selon une note de l'Unédic de 2021. La durée d'indemnisation varie, elle, de 14 à 45 semaines.
En France, dans un premier temps, les règles actuelles qui arrivent à échéance fin octobre seront prolongées via un texte de loi à la rentrée. Olivier Dussopt envisage ensuite une « concertation » avec les syndicats et le patronat. « Des pistes peuvent être ouvertes, sur la durée d'indemnisation et son caractère dégressif » , a-t-il déclaré.
Les économistes prudemment favorables à l'idée
Mais l'impact de la dernière réforme controversée de l'assurance chômage, entrée en vigueur en décembre dernier, n'a pas encore été mesuré. Au printemps 2021, l'Unédic estimait que jusqu'à 1,15 million de personnes ouvrant des droits après la réforme toucheraient une allocation plus faible de 17 % en moyenne qu'avant, avec une « durée théorique d'indemnisation » allongée.
Pour Bruno Coquet, spécialiste de l'assurance chômage à l'OFCE, ce projet de réforme est une bonne idée mais « le diable est dans les détails » selon lui. L'exécutif postule que « les gens qui touchent l'assurance chômage pourraient occuper les emplois disponibles, donc qu'il faut baisser les droits » , explique l'expert. Mais 60 % des chômeurs ne sont pas indemnisés et ne prennent pas les emplois disponibles. Pourquoi ? « Il faudrait quand même éclairer ce point » , note l'expert.
De plus, le système canadien ne permet pas de réduire les difficultés de recrutement, précise l'économiste qui y voit plutôt un « habillage d'une réduction des droits » . De son côté, Stéphane Carcillo estime le modèle « assez vertueux d'un point de vue théorique » . « Quand l'économie va bien, les règles un peu plus strictes poussent vraiment les gens vers l'emploi » , note l'économiste de l'OCDE. Tous les experts mettent cependant en garde contre les risques d' « usine à gaz » du chômage.
Les syndicats vent debout
Du côté des syndicats, unanimement opposés à la dernière réforme, ce modèle canadien est froidement accueilli. « C'est flou et c'est dangereux » , résume-t-on à la CGT, où l'on craint de voir arriver un « instrument de pression pour accepter n'importe quel travail » . Le modèle canadien « va surtout frapper des personnes qui ont des difficultés pour trouver un emploi » , renchérit un représentant de la CFE-CGC.
Pour Michel Beaugas, de chez FO, « c'est la double, voire la triple peine » pour les chômeurs. L'indemnisation a déjà baissé avec la dernière réforme et un tel projet la raccourcirait encore. Pour le syndicaliste, la raison des tensions de recrutement, « ce n'est pas l'assurance chômage, c'est bien l'attractivité des métiers, les horaires, les conditions de travail et le salaire » .
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