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A Paris, des riverains protestent contre l'implantation prévue d'un centre de livraison
information fournie par Le Figaro 01/09/2021 à 16:22

En bas de leur immeuble, dans le XVIIIème arrondissement, se prépare l'ouverture d'une plateforme de livraison de 2400 m². Les habitants craignent que ce projet ne dénature leur quartier et n'amplifie la circulation routière.

L'immeuble est situé au 170 rue Ordener, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. En face de lui, la cité Montmartre-aux-artistes, toute en briques rouges. À sa gauche, un petit bistrot parisien, à sa droite, une étroite boutique de prêt-à-porter et une boulangerie. Mais surtout, au rez-de-chaussée de cet immeuble, s'expose un grand garage automobile désormais sans activité. C'est lui qui déchaîne les passions dans le quartier depuis mars dernier. Ce local devrait en effet prochainement se transformer en une plateforme de livraison logistique. Autrement dit, il sera mis à la disposition d'acteurs de la livraison de colis pour réaliser leurs opérations « du dernier kilomètre ». La bête noire des riverains confrontés aux nuisances du ballet incessant de livreurs en scooters.

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Porté par la société immobilière Corsalis et par Ordinvest, une société que dirige le propriétaire du garage, ce projet inquiète vivement une partie des riverains. Car transformer les 2400 mètres carrés de locaux en plateforme de livraison, c'est risquer « la multiplication de véhicules de livraisons dans les alentours, et des nuisances sonores sur des amplitudes horaires importantes », redoute Loïc Lagadec, habitant de la copropriété à laquelle appartient le garage. Cet habitant a ainsi mis en ligne, comme le relevait ce mardi Le Parisien, une pétition visant à s'opposer à ce projet. À ce jour, le texte a recueilli un peu plus de 670 signatures.

Une réunion d'information

Interpellée par la mobilisation des riverains, la mairie du XVIIIe arrondissement a finalement organisé hier soir une réunion d'information, mettant en présence les instigateurs du projet et les habitants du quartier. « Deux points inquiètent des riverains : la question de l'affectation, et la question du trafic que cela pourrait engendrer. Mais actuellement, seule une minorité des propriétaires est contre ce projet », affirme Fabio Coppo, partenaire de gestion au sein de Corsalis, qui estime: « suite à cette réunion, les riverains ont manifesté une meilleure compréhension des sujets ».

Les porteurs du projet se targuent ainsi d'avoir pu rappeler certains principes: les véhicules de livraison circuleront six jours sur sept, pas plus, et jamais après 22 heures. En outre, le site sera fréquenté « seulement par des petits porteurs, des camionnettes ou des vélos-cargos par exemple », dont le nombre quotidien sera limité, nous indique Rémi Goleger, directeur associé de Corsalis.

Les habitants qui ont participé à la réunion sont cependant, de leur propre aveu, loin d'être convaincus et rassurés par ces engagements. Alice Bournigault, riveraine qui a participé aux échanges, estime que l'on dirait « tant pis aux habitants » en validant ce projet. « Humainement, c'est très dur et déstabilisant, poursuit-elle. J'habite juste à côté, je vais être affecté par l'impact de cette activité sur le trafic, et je n'ai pas le sentiment que l'on ait été écouté. »

Les riverains espèrent encore pousser la mairie vers un refus du permis de construire, qui est en cours d'examen. Parallèlement, ils demandent la réalisation d'une étude d'impact, qui n'a pas été menée au cours de l'instruction du permis de construire car « pas requise », affirme-t-on chez Corsalis. Mais au fil des échanges organisés mardi soir, les habitants affirment avoir reçu un soutien timoré de la part de la mairie d'arrondissement. « Soi-disant, cette plateforme fait partie de la logistique urbaine que la mairie de Paris souhaite installer », soupire Alice Bournigault. Interrogé par France 3, Mario Gonzalez, adjoint au maire en charge de l'urbanisme, a en effet fait valoir que « si nous n'avons pas ces infrastructures, les poids lourds vont continuer à accéder à la ville alors qu'ils sont surdimensionnés pour la dernière partie du trajet, avec des nuisances multipliées par dix ».

Enjeu d'actualité

Les conflits de ce type pourraient bien se multiplier alors que les acteurs du secteur de la livraison tentent de manière croissante d'implanter des entrepôts urbains pour faciliter les opérations sur le « dernier kilomètre ». En effet, selon une étude du cabinet de conseil en immobilier Cushman & Wakefield, ce dernier segment qui relie leurs opérateurs à la porte d'un client peut représenter plus de 50% des coûts globaux de la chaîne logistique.

Pas opposé aux services de livraison en soi, Bruno Tesnière, également habitant de l'immeuble concerné et opposé au projet, estime qu'il vaut mieux trouver un espace pour de telles plateformes « dans la périphérie, loin des habitations. C'est beaucoup plus efficace et moins contraignant », plaide-t-il. Un avis partagé par une autre propriétaire de l'immeuble, qui jouit de sa tranquillité et de sa cour intérieure arborée depuis plus de 25 ans. « Bien sûr, il m'arrive de commander moi-même des articles en ligne et je comprends que ce soit un service contraignant. Mais je ne pense pas que placer un entrepôt au cœur d'un quartier calme soit la bonne solution ». Des habitants de la copropriété ont ainsi décidé de mettre en demeure leur syndic pour obtenir procédure de négociation sur ce projet.

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Juste à côté de la rue Ordener et de la rue Désiré Ruggeri, étroite voie pavée sur lequel devrait donner le site de livraison, les habitués d'un café observent les divers livreurs qui défilent déjà à un rythme soutenu à travers le quartier. Témoin de l'agitation que suscite cet espace de distribution urbaine dans le voisinage, le patron de l'établissement se fend d'un rire sec: « les gens veulent continuer de recevoir leurs colis, mais surtout pas que ça affecte leur quotidien », grince-t-il. Accoudés au bar, deux clients s'interrogent malgré tout: « tu imagines Amazon dans cette rue, toi ? »

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