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Comment investir ses liquidités à court terme ?
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 05/01/2024 à 10:10

François d'Hautefeuille
François d'Hautefeuille

François d'Hautefeuille

Evariste Quant Research

Cofondateur & président

https://www.evariste-quant-research.com/

(Crédits photo : Adobe Stock -  )

(Crédits photo : Adobe Stock - )

La hausse des taux offre des opportunités pour investir ses liquidités à court terme. Faut-il craindre une forte baisse des taux ? Tel est l'objet de cet article.

La guerre en Ukraine a fait fortement monter le prix des matières premières à commencer par l'énergie. De fait, la Russie est un exportateur majeur. Cette guerre a été l'étincelle qui allumé le brasier de l'inflation. Mais la cause profonde de cette flambée de l'inflation doit être vue dans l'excès de liquidité créé par les banques centrales lors de la crise Covid. Le confinement a de fait détruit autour de 10% du PNB réel. L'effondrement du PNB nominal a été évité par les mesures du « quoi qu'il en coûte » de maintien du pouvoir d'achat nominal des ménages au prix d'un déficit budgétaire exceptionnel (autour de 10% du PIB), refinancé à 100% par la création monétaire.

L'inflation est-elle maitrisée ?

Beaucoup d'acteurs de l'économie réelle ont du mal à comprendre la dimension monétaire des mouvements de prix. Ainsi, l'explosion du prix du bois à la suite de la guerre en Ukraine n'est pas tant liée à cette guerre qu'au rattrapage du prix nominal vers le prix réel d'équilibre long terme.

Ce sont donc les banques centrales et non pas les facteurs micro économiques qui fixent le niveau moyen des prix par la création ou destruction de masse monétaire. La politique de resserrement des taux et de « FED tapering » (contraire du « quantitative easing » par vente d'obligations par la FED) sont autant de mécanisme de destruction de la sur création de monnaie. La stabilisation de l'inflation tant remise en cause par certains acteurs économiques était ainsi inéluctable du fait de la théorie quantitative de la monnaie.

Quelle tendance pour l'inflation et les taux ?

Contrairement à ce qu'ont affirmé certains analystes, la hausse des taux nominaux a aussi permis de remonter les taux réels. Ces taux sont peu connus du grand public. Ils sont pourtant fondamentaux. Ils garantissent un rendement net d'inflation. De facto, ils sont l'anticipation par l'intelligence collective du marché du taux de croissance long terme de l'économie réelle. Avant la crise COVID, ils étaient devenus négatifs dans bien des pays de l'OCDE ; ceci reflétait la grande stagnation liée à une japonification des économies occidentales via le piège de la liquidité de Keynes décrit durant la crise des années 30.

C'est le fameux « saving glut » (surplus d'épargne) dénoncé par Bernanke après la crise de 2008 et au cœur du quantitative easing. De ce fait, ce piège à la liquidité conduisait lentement mais sûrement à une destruction des classes moyennes, et donc de la démocratie et du capitalisme comme durant les heures sombres de la montée du nazisme et du communisme. Friedrich von Hayek a très bien décrit ce processus de décrépitude du capitalisme dans son livre séminal «Les Chemins de la Servitude».

C'est dans ce contexte de renormalisation des taux réels et nominaux vers leur taux naturel qu'il faut analyser l'évolution des taux. Powell a clairement affiché cet objectif dans un discours séminal lors de la conférence de Jackson Hole de 2022. Il a reconnu alors que les banques centrales avaient commis une erreur majeure en laissant les taux nominaux tombés à zéro. La théorie de Wicksell explique en effet qu'une manipulation du taux nominal trop loin du taux naturel crée une mis allocation de l'épargne avec un sous-investissement et une sur épargne. C'est exactement le mécanisme de désindustrialisation des économies occidentales au profit de la Chine tel que nous l'avons connu de Clinton à Trump.

Quel taux naturel pour la zone euro ?

Un grand financier allemand m'avait expliqué que le taux des Bunds fluctuait entre 3% et 9% avec un taux moyen de 6%. Nous sommes loin de ces taux d'équilibre long terme. De fait, la globalisation et le vieillissement de la population ont impacté les variables structurelles de l'économie européenne.

La formule de Fisher permet d'estimer le taux neutre. Il est la somme de l'objectif d'inflation de la banque centrale (2%) + le taux de croissance structurel de l'économie réelle (entre 1 et 2%) + une prime de risque (entre 0.5% et 1%). On retrouve bien des taux neutres correspondant aux 30 dernières années :

1.  Avant la création de l'Euro et la globalisation au profit de la Chine, on avait 2% de croissance + 2% d'inflation + 1% de prime de risque soit autour de 5% de taux neutre.

2. Après la crise de l'Euro et le piège à la liquidité, on avait 0% de croissance + 0.5% d'inflation + 0.5% de prime de risque, soit des taux neutres obligataires nominaux autour de 1% et des taux réels autour de 0%.

3.  Pour le futur, tout va dépendre des élections américaines. Trump est clairement plus « pro growth » avec son « America First ». Biden est plus globaliste et proche de la Chine.

a. En cas de victoire de Trump, on peut penser que le taux neutre Européen sera autour de 1.5% de croissance + 2% d'inflation + 1% de prime de risque soit 4.5%, on n'est pas loin des taux actuels.

b. En cas de victoire de Biden, on pourrait avoir des taux plus bas soit à 1% de croissance + 1.5% d'inflation + 0.5% de prime de risque soit un taux neutre autour de 3%, voire un retour à la grande stagflation du piège à la liquidité soit 0.5% de croissance + 0% d'inflation + 0.5% de prime de risque soit un taux neutre autour de 1%.

Qu'anticipe le marché ?

Nous sommes des grands fervents de lire le langage caché du marché en tant qu'expression de l'intelligence collective. C'est là la grande force du capitalisme et de la démocratie de pouvoir dépasser l'hubris des plus grandes intelligences des soi-disant experts et/ou des plus puissants et des cartels, par une intelligence encore plus puissante et moins humaine, celle du marché.
On peut ainsi analyser la structure de la courbe des taux, c'est-à-dire des taux d'intérêt sur différentes maturités pour en extraire l'anticipation implicite du marché quant au niveau des taux de la banque centrale dans le futur. Ces anticipations ou taux futures sont traités sur le marché de l'Euribor et de l'Eurodollar. Ces marchés sont peu connus du grand public mais ils sont pourtant extrêmement liquides car très utilisés par les banques pour gérer leur risque actif / passif.

Si on regarde la structure des taux futurs Euribor, on peut dire qu'elle anticipe de facto une victoire de Trump et donc des pro growth. Contrairement aux périodes de resserrement précédentes, en particulier avant la crise de l'euro, le marché ne voit pas les taux courts rebaissés sur des niveaux de piège à la liquidité à moins de 1%. Au contraire, ils anticipent une stabilisation autour de 2.5% pour l'Europe et 3.5% pour les USA.

On conserve donc cet écart de croissance entre les USA et l'Eurozone qui reflète la difficulté de la BCE et de la Commission Européenne de faire de l'union monétaire une zone de croissance à l'américaine mais plutôt une zone de grande stagnation à la japonaise. Les Allemands y voient le signe des limites structurelles à la croissance avec le vieillissement de la population, la stagnation de la population active, et la baisse de la productivité du fait de la concurrence chinoise. Mais la mort de Schauble, grand financier de l'ère Merkel et grand acteur de la crise de l'euro marque la fin d'une époque. Le ralentissement de l'Allemagne du fait de sa sur-intégration avec la Chine ouvre la porte à l'arrivée de politique plus « pro growth » même en Europe. La politique de réindustrialisation du Président Macron va dans ce sens. Elle est de facto liée à une transformation de la globalisation avec le « decoupling » de la Chine  (transfert de certaines unités de production hors de Chine pour réduire la dépendance occidentale à un risque systémique chinois).

La structure des taux futures Euribor permet d'anticiper la politique monétaire de la banque centrale. La structure actuelle anticipe une forte baisse des taux en 2024 passant de 4% à moins de 2%. Nous ne partageons pas ce pessimisme et pensons que le taux neutre est autour de 3%.

Source Bloomberg LLP.

Source Bloomberg LLP.

Comment investir ses liquidités ?

Comme nous l'expliquons ci-dessous, nous pensons que la structure des taux actuelles sur anticipe la baisse des taux à venir. De ce fait, nous recommandons des placements à maturité très courte type fonds monétaire régulier et d'éviter les obligations court à moyen terme ou les dépôts à terme de plus de 6 mois.

Le graphe ci-dessous montre la performance sur un an d'un fonds Amundi régulier, d'un ETF Amundi monétaire (CSH FP), et d'un fonds monétaire AXA référencé sur beaucoup d'assurances vie (AXA Court Terme). La performance est autour de 3.5% sur un an. Elle est donc attractive par rapport à des dépôts à terme bancaires.

Source Bloomberg LLP.

Source Bloomberg LLP.

Conclusion

La hausse des taux de la BCE offre une opportunité majeure de recycler les fonds en Euros sur des placements monétaires à court terme pour profiter des taux actuels. Nous sommes plus réticents à acheter des fonds monétaires sensibles ou des obligations court terme. La structure actuelle des taux nous semble sur anticiper une forte baisse des taux.


Disclaimer. Cette analyse financière n'est pas un conseil en investissement. Evariste Quant Research et ses clients peuvent détenir des titres mentionnés dans cette analyse.

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